PAGES PROLETARIENNES

jeudi 31 décembre 2015

LA BOURGEOISIE REGNE PAR SES CONDOLEANCES AUX BESTIAUX



« Si voter changeait quelque chose, il y aurait longtemps que ce serait interdit ». Coluche

Critique élogieuse du livre:  "Les citoyens ont de bonnes raisons de ne pas voter" de Thomas Amadieu et Nicolas Framont, le Bord de l'eau , Latresne (Gironde) collection Pour mieux comprendre , (octobre 2015)

Deux sociologues décryptent les causes de la montée de l'abstentionnisme en France et mettent en cause les institutions ainsi que la classe politique pendant que le Président présente encore ses condoléances pour une année de massacres. Le livre a rencontré un succès d'estime chez les fabricants d'opinion, sans doute l'attaquer de front lui eût trop rendu service. Lorsqu'un ouvrage est bien calibré, sans haine, sans parti-pris, sans ton vindicatif, et quelque peu dérangeant pour la doxa, ne vaut-il pas mieux jouer profil bas pour éviter des vagues, comme Anne Crignon dans son résumé pour l'Obs :
« Si les abstentionnistes sont bel et bien majoritairement issus des classes populaires, ouvriers, employés, lesquels représentent 60% de la population, l’étude d’Amadieu et Framont fait ressortir ceci: d’une élection à l’autre, les «aquoibonistes» alternent entre vote et abstention, ce qui démontre un choix : participer ou ne pas participer. La certitude que, de plus en plus, les élus ne représentent pas l’intérêt général est au coeur de ces désaffections. Après enquête, les sociologues leur donnent encore raison : l’action des gouvernements est tournée depuis 1983 (droite et gauche confondues donc) vers... 10% de la population française, une élite hétéroclite composée des grandes fortunes, des classes «aisées» et des gens d’influence, universitaires, journalistes de renom, figures du sport et du spectacle. Au XXIe siècle, les rois sont nus. C’est pour cela qu’ils sont si mal élus. »

La critique, plus qu'une dénonciation, dénude en grande partie la mystification de la démocratie représentative ; cette poulpe possède tant de ramifications que sa mise à nu reste toujours incomplète, j'en sais quelque chose avec mon livre « La croyance électorale ». On croit avoir épuisé le sujet mais il a tant acquis la prégnance d'une religion qu'il reste toujours un peu insaisissable. Le livre des deux sociologues s'il démonte bien le poids inégalitaire de l'argent dans le processus électoral n'aborde pas les différentes formes de l'encadrement électoral dans leur réglementation fallacieuse (proportionnelle, référendum, élections différées des sénateurs et des maires, etc.) qui, toutes, dessaisissent les électeurs de tout contrôle ; ni non plus le plus éloquent dans l'entourloupe, l'élu qui démissionne aussitôt pour refiler le poste à un inférieur du parti ou cet autre élu qui change de parti en cours de route...1

Plus que d'une analyse sur la mécanique oligarchique du système électoral bourgeois, et de ses divers rouages, les auteurs, qui sont des chercheurs scientifiques, font pourtant mieux que n'importe quelle brochure révolutionnaire pour l'abstention depuis celles des anars de la fin du XIX ème siècle.
Le livre est à lire en son entier parce que chaque phrase, chaque paragraphe a le poids de la vérité. Trois données actuelles sont évidentes désormais : les jeunes votent bien moins que les seniors, l'abstention n'est pas la marque d'un manque de civisme individuel ni indifférence politique. Plus intéressant à notre point de vue, réduisant à néant le mensonge médiatique d'une classe ouvrière acquise à l'oligarchie du FN, les abstentionnistes sont dans leur immense majorité des prolétaires, et la couche la plus importante de cette classe, celle « d'en bas » des salaires, alors que les cadres votent largement : « Il n'y a jamais eu de classe moyenne majoritaire en France. Les ouvriers et les employés représentent 60% de la population. Les membres de la classe populaire ont donc pour point commun d'appartenir à ces deux catégories socioprofessionnelles (PCS) qui dénotent un statut professionnel dominé hiérarchiquement, un plus faible niveau de diplôme ainsi que des revenus moyens ou bas au regard du reste de la population ».
Cinquième idée-force qui vient contrebattre aussi le discours dominant : « l'abstention n'est pas un signe d'individualisme », c'est le fruit d'une réflexion de classe dans les échanges de ses membres au boulot ou en famille, le fait de n'être pas inscrit sur les listes électorales mais nullement à cause de cette idée misérabiliste que « les citoyens de la classe populaire se désintéresseraient de la vie politique à cause de leurs difficultés quotidiennes » ; « les jeunes ne sont pas dépolitisés, ils sont simplement méfiants vis à vis du politique », « … ils ne conçoivent pas la démocratie comme limitée au vote ».

LA POLITIQUE EST-ELLE UNE AFFAIRE DE SPECIALISTES ?
C'est ce que voudrait faire croire la bourgeoisie du haut de son mépris. Les auteurs démontrent que les incapables sont du côté des gouvernants et que du haut de leurs fauteuils en cuir ils ne peuvent nous prendre que pour des bestiaux à évacuer de leur vue comme les terroristes nous prennent pour des poux à éradiquer.

SOMMES-NOUS MANIPULES PAR LES PUISSANTS ?
A partir de la page 36 l'ouvrage devient passionnant, abordant des questions tues même par nos robustes minorités maximalistes marxistes, qui s'y connaissent autant en réglementations hiérarchiques que les partis bourgeois. Les constats sont égrenés impitoyablement, mettant à poil la trilogie jacobine :
  • L'institution scolaire joue en premier lieu un rôle décisif dans la dépossession des classes populaires... en postulant l'égalité des chances de tous, elle renforce les inégalités, et « lorsque les enfants de pauvres échouent, l'école leur affirme que c'est de leur faute car ils ont bénéficié des mêmes conditions que tous »2. Les enfants des cadres et des professions intellectuelles supérieures bénéficient d'un réel capital culturel eux. Cet argument de la dépossession des couches inférieures est à son tour utilisé pour justifier l'hypocrite processus de sélection : « Le sentiment d'infériorité, engendré par l'école, (serait) ensuite redoublé par un sentiment d'indifférence à l'égard de la vie publique au quotidien... la propension à s'intéresser à la vie publique diminue, les difficultés de la vie privée reprennent le dessus » (bis repetita).
  • Les classes dominées seraient particulièrement influençables mais dominées « parce que effectivement incompétentes politiquement », «  la politique est affaire de raisonnement froid et distancié, qui nécessite une compétence d'analyse – la montée en généralité – qui ne serait pas à la portée de tous ». En gros la même étroitesse d'esprit caractériserait cette masse de « salariés » comme la goujaterie jadis caractérisait selon les nobles les paysans.
  • Comme successeurs des curés - quoique ceux-ci dans leur « diversité » soient aussi convoqués par temps terroristes à donner aussi des leçons de morale – le système valorise le rôle des intellectuels, experts technocrates, universitaires et philosophes dits penseurs critiques.
ET SI LE PEUPLE ETAIT PLUS SAGE QUE LES ELITES ?

Les auteurs sont moins clairs à cet endroit n'évoquant que « certains » mouvements politiques pensent que : « le peuple serait au contraire doté d'une force morale, d'une capacité d'analyse plus fine que les dominants ». Ils ne parlent point du prolétariat mais qualifient cette thèse de populiste, ce qui est aussi réducteur pourtant que l'incompétence présumée des dominés ! Et de nous extraire le nommé Michéa, électron libre moqueur d'une extrême gauche détournée du « bon sens populaire ». Et de nous assurer qu'une étude américaine démontre que le fait d'avoir de hauts revenus favorise l'adoption de comportements malhonnêtes et égoïstes, ce dont personne ne doute, mais pour nous démontrer quoi en nageant dans la notion fumeuse de peuple ?
On frôle pourtant la vérité de la conscience de classe (pas de peuple) : « Parce qu'à l'abri du besoin, ils (les riches) ont moins besoin de liens sociaux pour survivre (le mot est trop fort!), et place donc plus facilement leur intérêt individuel avant les règles collectives ». Si c'est au fond pour nous dire que l'usage politique de la thèse populiste a des limites, on le savait déjà, et même que cela sous-tendait une allusion au FN 3; les auteurs ont l'honnêteté de retomber sur leur pied en soulignant que la « référence au peuple, la démagogie populiste quant au bon sens populaires est aussi le fait de tous les partis politiques, du genre : « Les français savent bien que... les réformes sont nécessaires... la dette doit être remboursée »4. Or, indépendamment des délires autistes des vrais populistes que sont tous les politiciens, existe une conscience de classe qui se reproduit par elle-même depuis plus de 150 ans que la classe ouvrière a fait son apparition, dont on ne s'abaissera pas à détailler les fondements naturels ici pour l'expliquer aux bourgeois ou même à ces auteurs académiques.
Quelles que soient les raisons invoquées par les uns ou les autres, le populisme dans son simplisme n'apparaît pas comme l'explication adéquate pour l'abstention. 

LA QUESTION DE LA REPRESENTATION

« Pour beaucoup, les élus de la république ne représentent pas l'intérêt général mais d'autres intérêts : les leurs, ceux de leurs pairs ou encore ceux des plus riches ou du «système ». Les auteurs semblent voguer encore, dans le chapitre du « tous pourris », dans le populisme, non ?
Non car ils nous engagent dans la compréhension – même à leur insu - des différences de classes :
  • l'appartenance des élus à une élite déconnectée des conditions de vie
  • l'appartenance sociale des élus, leur patrimoine et leurs revenus influencent directement leurs intérêts, leurs idées politiques et donc les choix qu'ils feront ;
  • les professions les plus représentées : les cadres et professions intellectuelles supérieures dominent largement (et aussi avocats et fonctionnaires... supérieurs.
Ils posent cette admirable question : « Pourquoi nos élus font-ils très majoritairement partis (sans e) des classes supérieures ? » ; réponse comique : « mieux vaut être riche pour devenir un élu de la république, et être élu permet de devenir riche ». Le constat serait presque subversif. Cet autre constat nous importe peu : « un militant de base ne peut pas devenir un élu » ; quand on choisit d'être un mouton de telle ou telle oligarchie, faut pas venir se plaindre de ne brouter que de l'herbe aux grands banquets.
Les constats ne sont pas nouveaux. Connaissant un peu l'histoire non pas du peuple mais du prolétariat, nos auteurs ne sont pas sans rappeler les études de ce bon Robert Michels qui avait démontré que même dans les partis se présentant comme les défenseurs de la classe ouvrière, « les dirigeants sont tous issus de la bourgeoisie » 5. Passons sur les descriptions et les chiffres sur l'enrichissement des élus, qui ne choque plus personne, pour nous intéresser à un paragraphe pas assez développé : « les limites du beau discours de la diversité ». On peut se demander si les auteurs ne se sont pas auto-censurés car il y avait beaucoup plus à dévoiler en particulier concernant la « préférence immigrée » ou l'immigré, mais seulement au plan électoral, a remplacé l'ouvrier sociologique, et où la leçon de morale antiraciste et identitaire a remplacé le discours anti-communiste, comme l'a bien illustré Pieter Lagrou :
« Depuis les années 1970, l'engagement individuel connaît une désaffection et laisse la place à des critères d'appartenance de type « identitaire » auxquels les critères du « commémorable » se sont adaptés. La victime ciblée malgré elle, pour son origine ethnique ou autre, a pris la place du héros. La commémoration est le reflet des préoccupations de la société qui commémore et non celle des commémorés » 6. La politique des dominants fonctionne tant et si bien sur des critères sentimentaux convenus – seuls accessibles au commun des bestiaux - que le top des retrouvailles de l'élite avec le vil peuple ne semble plus être que les périodes de condoléances à chaque épisode dégoulinant de sang du « djihad mondial » 7, permettant l'oubli de la politique par le chagrin et les larmes nationales. La politique n'est plus phénomène pour raisonnement rationnel également pour les bourgeois gauchistes, les vocables ne relèvent plus que d'un impressionnisme apolitique, de l'émotionnel: haine (pour le F.Haine), phobie (pour l'anti-islam), frères et soeurs qui remplacent camarades auprès de l'électorat voilé), etc.  Personne ne discute plus des programmes, puisque les plate-formes électorales des partis sont effectivement plates, y inclus celle du FN : « La différence se joue de plus en plus sur les sujets de société » (p.104).
Les auteurs ont choisi de se moquer du « nécessaire renouveau de la classe politique » dans des discours qui : « évoquent rarement l'appartenance sociale des élus ou leur importante richesse, mais préfèrent s'intéresser à trois variables : le sexe, l'âge et l'origine (…) aménagements cosmétiques (…) saupoudrant de quelques représentants de la « diversité ». La variable d'âge n'a que peu de pertinence tant pour les jeunes que pour les vieux. Par contre le personnel politique bourgeois dominant est très vieux, très ancien, attachés à ses privilèges, fiers cumulards.
Qui dit corruption dit complot, qui dit complot dit bestiaux qui ne comprennent rien. Or cette théorie, qualifiée immédiatement de populiste par le ministre et le gauchiste de base, est certes simpliste, permettant même des délires du niveau des Sages de Sion, permet de cacher une vérité... de classe : l'homophilie !

QU'EST-CE QUE L'HOMOPHILIE SOCIALE?

Rassurez-vous ce n'est pas une nouvelle homophobie, islamophobie ou haltérophilie, plutôt une sorte de... prolophobie 8: « Les grandes écoles forgent sociabilité et renvois d'ascenseur (…) Elles ont pour but de promouvoir la création de réseaux dont la constitution, pour un étudiant, est indispensable à sa future carrière (…) Etre camarade de « promo » n'a pas le même sens dans des formations démocratisées comme l'université, où les étudiants se parlent relativement peu, que dans les formations sélectives comme les grandes écoles. A HEC, l'administration encourage l'organisation de multiples soirées et week-ends d'intégration ».
Les auteurs s'éloignent ensuite du sujet – bizarres digressions dans le plan - pour nous décrire le pantouflage et le parisianisme, l'impuissance des élus et les marchés financiers tout puissants, abandonnant ce qui était esquissé avec le thème de l'homophilie : on ne se mélange pas entre classes différentes. Ils y reviennent pourtant au chapitre III « Blanc bonnet et bonnet blanc ? ». Il faut bien constater qu'il y a deux mondes différents et cloisonnés – bonnet rouge contre bonnet blanc ? - quand « le clivage gauche-droite a quasiment cessé d'exister » : « la grande majorité de la classe médiatique, politique et intellectuelle, ainsi que les artistes et tous ceux qui ont droit à la parole publique , ne cessent d'affirmer, tous les cinq ans, que le choix de la gauche ou de la droite sera déterminant pour l'avenir du pays... ». Suit une longue démonstration du fonctionnement du capitalisme aujourd'hui où l'Etat exploite les prolétaires au profit du privé tout en criant au « moins d'Etat ».
On en revient enfin à nouveau à l'homophilie qualifiée de « sociologie du vote » où la représentation politique est surtout l'expression des élites, les « relais d'opinion » ou « leaders d'opinion » tels que les qualifient leurs collègues US ; quant à l'expression des « citoyens ordinaires » elle est plus diluée, toutes catégories, dans les invectives et insultes entre millions d'internautes, que ne l'imaginent nos deux sociologues. Nouvelle digression, sans doute pour nous ramener à la réalité scientifique de l'exploitation économique (et pour ne pas en rester au niveau sentimental du populisme en colère) : « entre 2008 et 2011, le revenu annuel moyen des cadres supérieurs a augmenté de 1000 euros (alors que celui des employés a baissé de 500 euros, et celui des ouvriers de 230 euros ». La délimitation de ces cadres supérieurs n'est pas très claire et on nous dit que ce sont les 10 % les plus riches... alors que nombre de cadres intermédiaires descendent au niveau de vie de la classe inférieure et vont voter FN (20 % des cadres aux dernières élections).
On lance des séries de faux débats avec toute la palette de l'indignation surjouée pour distraire les bestiaux électeurs, tout en leur instillant que c'est trop compliqué pour qu'ils expriment un avis éclairé ou valable. Peine perdue : « ce qui ne marche globalement pas, en particulier dans les classes populaires, qui observent ces débats avec distance ».
Les auteurs sont un peu nunuches avec leur référence rébarbative aux « classes populaires », sans doute de peur de ne pas être édité en nommant l'hérétique et ringarde « classe ouvrière » ; mais leur démonstration déshabille très bien l'éloge bourgeois et gauchiste de la diversité et de l'antiracisme qui voilent si bien l'homophilie de classe bourgeoise :
« Sur la question des discriminations – un thème dont la gauche de gouvernement se fait traditionnellement la spécialiste – les différences ne sont pas non plus flagrantes. Chacun des deux grands partis partage une préférence pour la notion de « diversité », consistant à faire la promotion de la différence (sur la base essentiellement des critères de sexe et de la race) au détriment de l'égalité. C'est ce qu'a montré Walter Benn Michaels ; pour éviter de devoir réduire les inégalités sociales (particulièrement de revenu), les hommes politiques et les dirigeants des grandes entreprises préfèrent afficher la diversité de leur composition : tel conseil d'administration a une femme à sa tête, tel gouvernement a des ministres issus de la « diversité ». Bien évidemment, il ne s'agit pas de lutter réellement contre les discriminations mais, au contraire, d'en favoriser l'expression par le biais de discriminations « positives » à laquelle les élites sont converties ; notamment depuis que Sciences Po a mis en place des modalités de concours sur cette base. (…) La diversité, comme beaucoup de thèmes de société, sert d'écran de fumée pour éviter d'être contraint de réduire réellement les inégalités socio-économiques et de favoriser la représentation des classes populaires ». Nos auteurs qui abusent de ces termes idiots de classes populaires (pourquoi pas classes populistes pendant qu'ils y sont!) ratent une donnée fondamentale depuis l'invention de l'Europe flagorneuse des régions au-delà des patries : la théorie de la diversité est surtout un moyen de liquider tout réel internationalisme car diversité rime parfaitement avec nationalité, avec ou sans condoléances. De même que ce n'est pas exclusivement le chômage et sa menace perpétuelle qui fondent la réflexion dans la conscience de la classe prolétarienne, mais de plus en plus, face à une société ultra-consumériste et de règne du bazar et du folklore du tiers-monde, les questions du mode de vie.
Les auteurs se rattrapent pourtant superbement malgré des mailles dans leur raisonnement, ou en ne poussant pas au bout leurs constats, en particulier en relevant le jeu entre Valls « le fasciste » et ses colistiers « humanitaristes » de l'extrême gauche, dont la conflictualité « produit les effets recherchés » : « relancer la conflictualité sur les questions migratoires et d'intégration tout en faisant oublier la question sociale ».
Le chapitre IV est incontestablement le plus intéressant. Il analyse la composition et le mode de fonctionnement des divers partis bourgeois. La description est précise et rigoureuse, notamment concernant le FN ; puis le couperet tombe : tous ces partis sont irréformables.

LA PREMIERE VERITABLE CRITIQUE DU FRONT NATIONAL

Pas vraiment du côté des cercles maximalistes, autrement lucides sur la nature de ce parti bourgeois que les gauchistes hystériques, mais pour un large public si. Au niveau de « l'offre politique », face à une gauche radicale (dite) devenue élitiste – il eût été convenable d'ajouter « moraliste » - si l'on peut comprendre le vote contestataire pour le FN, il ne faudrait pas que ses électeurs le prennent pour une véritable roue de secours ou le miroir enfin trouvé de leurs préoccupations ; il pue non le fascisme mais la petite bourgeoisie plouc et le népotisme ridicule : « … sa rhétorique ouvriériste ne doit pas faire oublier qu'il est avant tout un parti de commerçants, d'artisans et de chefs d'entreprise, contrôlé par une famille et désormais en vois d'énarquisation ». Ses buts institutionnels ne sont en rien différents de ses autres concurrents, comme les ont définis deux de leurs collègues : « un article de Katz et Mair - « L'émergence du parti cartel » - dans lequel ils montrent que les partis ne cherchent plus à attirer en masse des sympathisants mais simplement à s'assurer des ressources de l'Etat pour permettre la survie de l'équipe dirigeante ». Paf dans le mille, c'est leur but à tous, de Washington à Téhéran quand Daech n'est qu'un petit arriviste. Tous ces partis technocrates déploient un « clientélisme oligarchique » et les bestiaux peuvent continuer casque sur la tête à écouter barrir la grosse Adèle à la caisse du supermarché. Nos auteurs n'osent pas le dire mais la gouvernance moderne telle qu'ils la décrivent tient du fascisme sublimé : « 'la réalité' est une politique économiste clientéliste en faveur des 10% les plus riches »9. Ils n'ont plus qu'à recopier le célèbre sociologue Michels avec sa « loi d'airain de l'oligarchie » qui démontre que toutes les directions de parti sont constituées inévitablement de plus en plus de bourgeois, et que cette « professionnalisation de la politique est une dérive très ancienne ». Pour eux en tout cas elle semble nouvelle quand, nous, en 68, avions prétendu nous emparer de la politique pour la séparer du fric. La gauche bourgeoise était morte cette année-là même si on nous l'a ressorti de la naphtaline avec le chimiste Mitterrand ; mais nous sommes contents que des tit'jeunes sociologues lui administrent encore une raclée : « être de gauche est devenu une valeur conforme aux pratiques d'une certaine partie des classes supérieures, mais non plus une idéologie porteuse d'un projet majoritaire ».
Revenons à la famille Le Pen, après les tribulations souvent mal informées de nos auteurs en milieu gauchiste – il est vrai que les extrèmes se côtoient dans la même bêtise : « Le Front national a toujours été un parti dynastique, tenu depuis sa création en 1972, par un membre de la riche famille Le Pen ». Autre constat dérangeant pour les journalistes gauchistes qui méprisent la classe ouvrière (et font partie des 10 % de profiteurs nationaux) : « Traditionnellement, le Front national rencontre ses succès dans le Sud de la France, auprès d'une population de petits commerçants et d'artisans ». Même s'il a abandonné le volet libéral de sa plate-forme électoral, et que, dans le Nord, des couches populaires plus proches du lumpen que de la classe ouvrière le soutiennent : « les ouvriers s'orientent davantage vers l'abstention que vers le Front national. Il y a d'ailleurs, indéniablement une forme de mépris de classe à associer systématiquement les ouvriers au Front national ». 
 
QUELLES ALTERNATIVES ?

Les auteurs sont très lucides sur les causes non tant de l'abstention (on s'en fout, c'est même un faux problème pour les bourgeois qui s'en accommodent sans complexe) que sur l'état du mouvement ouvrier : « des salariés atomisés géographiquement et mis en concurrence », éclatement entre unités de production, l'entreprise qui n'est plus un lieu de discussion : « On tend à être davantage seul au travail, ce qui a des conséquences sur l'image que l'on a de soi et de sa catégorie sociale (la référence à la classe ouvrière diminue, et tout le monde tend à se dire membre de la « classe moyenne ») mais aussi à sa capacité à s'organiser sur son lieu de travail ». Quant à s'organiser au niveau politique, moins borné que la syndicalisation, il est impossible pour la majorité des prolétaires vu les horaires délirants (et nos auteurs l'oublient, l'éloignement du travail) quand sont surreprésentés dans les partis pourris, employés du public, profs et cadres...
Le temps sur le lieu d'exploitation est si décalé qu'il accroît encore cette solitude sur laquelle prospère les élites dirigeantes. La plupart des couches de « salariés » de l'ouvrier au cadre moyen ne voient comme avenir que le cri de Munch.
Les auteurs brossent enfin rapidement les recettes offertes par la bourgeoisie pour un éventuel repêchage des bestiaux :
  • la démocratie participative : on se souvient des meetings présidentiels de S.Royal assise sagement en coin et prenant des notes des bestiaux au micro ;
  • les consultations citoyennes : autour d'un verre dans l'appart d'un bobo parisien ;
  • les conseils de quartier, figuratifs et non décisionnaires, les bestiaux sont contents d'avoir eu le micro trois minutes10 ;
  • l'uberisation politique par la décharge internet : no comment
  • les marginaux zadistes, etc.
Devant le ridicule de toutes ces alternatives bourgeoises et petites bourgeoises, les auteurs ne baissent pas les bras, et frôlent le maximalisme marxiste : « Cependant, il nous semble tout à fait vain de considérer qu'il est possible de restaurer la démocratie sans bouleverser profondément la société, notamment ses structures socio-économiques ». Malheureusement ils reprennent des solutions, telles que la révocabilité immédiate des élus, qui dépendent étroitement seulement d'une révolution prolétarienne11. Ils s'égarent enfin sur des espoirs désormais frelatés sur les cliques Syrisa et Podemos, avant-dernières crottes du clientélisme oligarchique.
Il reste beaucoup à attendre d'une révolution violente, pas de discours prometteur pour un prolétariat qui raserait gratis. Leur bouquin reste indéniablement un sacré bon outil de travail pour tout militant maximaliste digne de ce nom.




Extraits pour les fauchés ici :

Mais Contretemps ne saisit pas le suc de l'ouvrage et ne cite que ce qui pourrait arranger la démocratie bourgeoise.

ET interview des Inrocks : http://www.lesinrocks.com/2015/12/03/actualite/labstention-des-classes-populaires-est-tout-%C3%A0-fait-logique-11791601/







1Ni non plus, au niveau local, une sélection par l'argent entérinée par la loi ; pour briguer un mandat municipal , le candidat doit payer de sa poche, comme le notent p54 les auteurs. Contrairement à la bienveillante propaganda, les maires « si proches du peuple », sont souvent les pires magouilleurs.
2C'est faux comme l'a montré Bourdieu, et c'est pourquoi tant d'ouvriers haïssent les enseignants, qui en plus posent à leurs représentants politiques ou aux donneurs de leçon d'antiracisme...
3Plus démagogue que les démagogues, M. Le Pen assure que « le peuple est supérieur aux élites parce qu'il se méfie de l'immigration »..
4Page 92, ils signalent la même démagogie avec l'usage aléatoire de la lutte contre le chômage, comme Leclerc lutte contre les prix : « Au nom de la lutte contre le chômage, il s'agit en fait de soutenir les grands groupes privés en creusant la dette publique et en réduisant les protections sociales des salariés »
5Y inclus chez les particules gauchistes (les auteurs reviennent plus loin sur les désarrois de Poutou au NPA), et j'ajoute idem chez les « minorités » ultra-gauches ou maximalistes, une pléthore de profs du supérieur occupaient ou ont toujours squattés les postes des CC ; il est vrai qu'ils payent en général de généreuses cotisations, dont je ne pouvais pas m'acquitter moi même lorsque je fus dans un de ces CC, ce qui me valut des dénigrements dans les couloirs. Je ne pouvais pas payer plus, point à la ligne. Je ne peux m'empêcher de penser que, comme dans le cas de l'église de scientologie, dans tous les divers organismes politiques, vous devez apporter une contribution financière en rapport avec votre position, si celle-ci est « élevée ».
6Pieter Lagrou « Mémoires patriotiques et occupation nazie », ed complexe CNRS 2003. Il faut noter que le "camp musulman" dans sa "diversité" assume souvent sans honte ses massacres; Erdogan est le premier chef d'Etat moderne à s'être flatté publiquement d'avoir fait tuer 3000 kurdes (alors que les chefs d'Etat occidentaux eux, plus discrets, ont souvent fait tuer un plus grand nombre de gens) et qu'il n'y a pas de quoi s'en vanter. Les potes des assassins du Bataclan répondaient dernièrement à l'interrogation d'un journaliste - "mais ils ont aussi tués des musulmans? - réponse: ce sont des dégâts collatéraux et qu'est-ce qui prouve que c'étaient des bons musulmans? Le cynisme moderne de l'esprit capitaliste moderne et décadent dans toute sa hideur.
7La Bataille socialiste « Site d'éducation, d' informations et de ressources documentaires pour le marxisme vivant etc. », publie l'histrion Y.Coleman, bouche bée comme tous les inutiles depuis un mois, qui se prend pour le roi du monde antiraciste et présente ses condoléances aux victimes (qui s'en foutent et de la solidarité de l'histrion plus encore) et aux proches comme s'il était le président Hollande. Incapable de la moindre idée originale ce stalinien dégénéré en démocrate apolitique est bien dans l'air du temps. Il compile un tas de textes d'ânes intellectuels pour « stimuler la réflexion », sortir des discours automates et des « appels abstraits à la guerre de classe ». Rue de Solférino on n'attend plus qu'il vienne signer sa carte d'adhérent.
8En sociologie, l'homophilie est un discours déterministe qui dit qu'on a tendance à s'associer à des gens avec lesquels on partage des formes de complémentarité liée à la langue, au sexe, au niveau culturel ou à l'ethnicité... Dans l'étude de l'amitié comme processus social, on a longtemps pensé que les gens évoluaient dans leur amitié par sexe, même milieu géographique, social, etc.
9Les camarades « antifascistes » de la diversité du résidu du PCF en font désormais partie, sans honte : « Le Parisien rapporte samedi que l’édile Didier Paillard, élu depuis 2004, a obtenu du conseil municipal une augmentation de 16 % de ses émoluments, qui passeront de 4 574 à 5 295 euros bruts par mois. Sa première adjointe Florence Haye passera de 1 957 à 4 477 euros (+129 %) et son adjoint au sport, Bally Bagayoko, de 1 577 à 3 183 euros (+102 %).
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/politique/article/2015/12/19/a-saint-denis-l-augmentation-des-indemnites-de-certains-elus-passe-mal_4835304_823448.html#1LQKraLBu7ImGAzQ.99

10On est entré dans l'ère du syndrome de Nimby, acronyme de 'not in my backyard' (« pas dans mon jardin », le groupe de quartier ou l'assoc (cette merde à histrionnes) est organisé afin de protester pour son intérêt propre, en cherchant à éloigner des installations polluantes ou un aéroport (sic) de chez lui, sans considérer l'intérêt général. Le triomphe du fédéralisme proudhonien quoi !
11Après la révolution, je proposerai aussi l'interdiction du cumul des mandats dans le parti communiste, car le cumul était un mode de vie quand le CCI était nombreux, avec pour argument « trop de peu de camarades ont les capacités pour écrire ou réfléchir » … de façon suiviste .

samedi 26 décembre 2015

APPEL à la sérénité des bandits corses dans l'île de Beauté !


Un problème corse qui se corse ? L'actualité de Noël est idéale pour nous resservir la soupe religieuse, et coïncidence charmante ce 25 décembre était venu peaufiner la « concorde nationale » avec la fête simultanée de Mahomet, des musulmans faisaient rempart de leur corps pour protéger l'entrée d'une église... quand la scandaleuse Corse vint jeter le trouble. Accumulation d'événements imprévisibles, manip des « bandits corses », ou du FN (comme le dénonça immédiatement un imam pacificateur de la république), ou manip planifiée ou souhaitée par l'équipe de l'Elysée pour minorer son fiasco électoral dans l'île de Beauté ? Comment les attentats et les élections ont créé  des circonstances étranges et une situation telle qu'elle permit à un personnage médiocre et grotesque de faire figure de héros...
Les frottements « communautaires » sont très anciens et traditionnels en Corse. Les islamologues assurant que depuis toujours les corses sont racistes et des corses répondant qu'au moins « chez eux » les racailles immigrées ne font pas la loi ; d'autres fournissent des explications plus objectives1.
Un des bréviaires gouvernementaux, Médiapart, conseiller de Terra Nova et soutien à l'islamisation de la France, qualifie de « nationalisme ethnique » l'ambigu et peu courageux nationalisme corse qui fait porter ses exactions au FN, et dont on ne peut nier une évidente complicité; même si les amis de la doxa gouvernementale - le "petit journal" de C+, Le Monde et son maître à penser Huffington post - s'engagent à dédouaner ce nationalisme "ethnique". Voici leur prose :
«« Etre maghrébin en Corse, écrit L. Terrazzoni, –mieux vaudrait dire auprès de certains  Corses– c’est être mis à l’écart par une série de dispositifs des plus violents (l’action physique ou la  ratonnade ) aux plus symboliques (être désigné par des tags tels qu’Arabi fora. Rien de bien spécifique à la Corse diraient certains. »
« A cela près qu’ici ces dispositifs peuvent aller chercher leur justification dans  la défense du «  peuple corse »…Doit-on voir là le signe d’un  racisme débridé… J’y vois pour ma part les symptômes d’un phénomène plus complexe, produit des dérives locales d’une manipulation politique dangereuse de l’idée de minorité et des « potentialités oppressives » contenues dans tout nationalisme… ». « Au centre de l’idéologie nationaliste  corse il y a l’idée selon laquelle « le peuple  corse » serait  une minorité, un groupe opprimé culturellement, politiquement et économiquement par une majorité incarnée par l’Etat français…. On parle sérieusement de « substitution ethnique », de génocide méthodique mis en place par l’Etat français » dans le dessein de « faire disparaître  le peuple corse » ! Persécution contre les entreprises corses, aliénation de la terre, remplacement des fonctionnaires et des cadres corses par des continentaux, immigration d’étrangers et de continentaux sont dénoncés»2 .
Les jardins de l'Empereur, équivalent mineur des quartiers nord de Marseille, ce quartier haut d'Ajaccio fait régulièrement l'objet de faits divers voire de ratonnades qui ne choquaient plus personne ou en tout cas demeurait à la rubrique faits divers. Sans recenser depuis longtemps des bagarres considérées comme secondaires comparées aux meurtres rituels entre mafiosos corses ou assassinat de Préfet, voici quelques exemples :
- en octobre 2008, « trois garçons d'origine maghrébine » (la formulation est de Libé qui use d'habitude de la formule « jeunes ») sont blessés par balles par un couple immédiatement arrêté par la police ;
  • en mai 2011 : la villa d'un algérien est plastiquée ;
  • en avril 2012 : une salle de prière musulmane est incendiée ;
  • en mai 2013 est publié un communiqué du CMSC (Comité de la Majorité Silencieuse Corse) sur le site Identité juive, communiqué très clair contre les prétentions expansionnistes islamistes molles ou dures ;
  • le slogan « I arabi fora » (dehors les arabes)3 apparaît de façon publique au lendemain du massacre de janvier 2015 à Paris, plus significatif de la collusion entre FN et nationalisme corse est ce drapeau français brûlé au fronton d'une école. Il est brûlé entre le drapeau européen et le drapeau corse... et remplacé par celui du Maroc !



SUS AUX AGRESSEURS DE POMPIERS ET AUX CASSEURS DE MOSQUEES ?

Ça se corse vraiment? Et comme vient de le déclarer sur la radio d'Etat un imam collabo, cela va-t-il « délivrer les fanatiques djihadistes ? ».
L'épisode corse peut apparaître malgré tout (sauf en Corse) comme une première, pas vraiment une ratonnade mais un genre d'expédition punitive qu'on n'avait encore jamais vue ailleurs, tout au moins en Europe (excepté contre des foyers d'immigrés dans l'est de l'Allemagne). Va-t-il simplement entrer dans les stats des islamologues vigilants ou donner lieu à une campagne étatique pour ridiculiser le « nationalisme ethnique » corse ?
Les policiers ont empêché les manifestants d'entrer dans les barres du ghetto dit quartier de l'empereur. La presse nationale n'en rapporte que des bribes, hésitant pour l'instant entre stigmatisation et approbation muette ; voici le compte-rendu de Corse-Matin, clairement du côté des « sauveurs » :
« On monte". Plus de 600 personnes se sont rassemblées devant la préfecture d'Ajaccio pour soutenir les sapeurs pompiers. Il a suffi d'une voix, d'une phrase, d'une colère, pour déplacer une foule.
Vers 17 heures, une partie des personnes rassemblées, comme un seul homme, a remonté le cours Napoléon, traversé la ville et grimpé jusque dans ses hauteurs. Jusque dans le quartier de l'Empereur afin d'y trouver les responsables de l'agression des pompiers. Au départ, ils étaient près de deux cents, toutes générations confondues, hommes et femmes. Deux cents personnes qui sans invitation, sont rentrées dans ce quartier car "nous sommes chez nous ici", dixit les manifestants. Ils ont arpenté chaque recoin pour retrouver les agresseurs. "Où vous êtes ? Descendez maintenant. Ils étaient quatre les pompiers, c'était facile. Venez maintenant !", s'époumone la foule. Après de nombreux cris, les voix deviennent rauques. Qu'importe ils poursuivent, cherchent. "Ne cassez rien, ne touchez ni aux voitures, ni aux immeubles. Il y a des Corses qui habitent ici", alerte l'un d'eux. La masse bout mais s'exécute. Ce qui n'empêchera pas des dommages collatéraux : deux voitures, l'une avec deux femmes voilées à l'intérieur, l'autre avec une femme et un tout jeune enfant installé à l'arrière, un scooter, une cage d'escalier. "Nous ne sommes pas ici pour casser, mais pour leur rappeler qu'ils ne sont pas chez eux", insiste un homme d'une cinquante d'année. "Ils", ce sont les personnes d'origine maghrébine. "Arabi fora", est répété en boucle. Des habitants du quartier, au balcon, applaudissent, saluent les "sauveurs" »4 .
Le déroulé de l'épisode ajaccien, pose problème. Il souffre de manipulation. Des palettes sont déposées au milieu d'un stade puis incendiées. Les pompiers et les flics se ramènent puis sont caillassés. Normalement l'épisode se conclut en général par un sermon des autorités et une déploration de la presse, mais une expédition punitive se met aussitôt en branle. Fausse spontanéité. Qui a eu intérêt à ainsi ridiculiser l'Etat pastoral et d'exception native avec ses 90.000 policiers voués à la surveillance des églises menacées de bombes daechiennes ? Les nationalistes « ethniques » corses, c'est ce que la presse gouvernementale française insinue naturellement. Et si c'étaient les services secrets de ce même Etat français ? Le déroulé de l'événement est trop bien scénarisé, mais en l'absence de preuves ou de protagonistes trahissant les commanditaires, on ne se perdra pas en conjectures ici , mais on soulignera la conjoncture qui vient à point au beau milieu de la querelle sur la déchéance de nationalité :
  • la fraction nationaliste corse qui vient de gagner les élections a immédiatement apporté son soutien aux pompiers blessés (Vargogna à quelli ch´anu fattu què) et dans un second temps chargé le FN ;
  • Valls et Cazeneuve, qui n'avaient nullement fait appel à un barrage au « nationalisme ethnique corse » ont immédiatement condamnés des actes inadmissibles qui offensent « les croyants », « profanation inacceptable ».
La campagne commence, les titres de presse changeant toutes les heures dans la sélection google. Au moment où Le Figaro titre « l'incompréhension demeure », un internaute répond :
« QU'appelez vous incompréhension?
COMMENT APPELEZ VOUS,LE TRAQUENARD ORGANISE CONTRE LES POMPIERS ET LES POLICIERS ? ». Et sur les sites commentaires, on trouve : « au moins les corses savent se défendre ».
La maillonnaise monte. Oubliée presque la fausse guerre contre le terrorisme islamiste qui sert de rideau au partage du pétrole en cinq grandes compagnies pétrolières (dont la Total frenchie) au pire Orient et au lointain Afghanistan où flottent les drapeaux de ces rackets occidentaux. Oubliés les attentats cruels du glauque et trouble Daech, va-t-on vers une guerre entre la France et la Corse ?
Médiapart et Libération vont-ils réussir à prouver la collusion entre nationalistes « ethniques » corses et FN ? Et Manuel Valls empêcher la généralisation du dialecte corse ?
Entre manipulation et utilisation, je vous invite à réfléchir sur une affaire oubliée, menée de main de maître par un corse de gouvernement.



L'affaire Folembray de l'été 1994 

Il y a vingt ans, l’affaire de Folembray... Personne n'a fait à ce jour l'histoire des campagnes de propagande de l'Etat bourgeois, tâche qui pourrait être simplifiée en reprenant simplement la chronologie de l'actualité des trente dernière années. Certains espiègles font mine de s'étonner qu'à chaque attentat « islamiste » ou « daechien » les gouvernements successifs actuels prennent sans cesse la défense des « croyants musulmans » et s'inquiètent en premier lieu de respecter l'islam mou pour le protéger en quelque sorte de l'islam dur ; ce qui agace tout le monde. C'est oublié que la vindicte et la criminalisation de « l'immigré » étaient le credo il y a vingt ans des gouvernements de... cohabitation. En 2004 Le Monde diplo titrait avant que le concept ne devienne depuis une dizaine d'années un cliché et une évidence : « Quand l’islamisme devient spectacle » :
« Mauvais traitements, internements, expulsions : dans la lutte contre l’« islamisme », les autorités n’hésitent pas à jouer avec les limites de l’Etat de droit. Il y a dix ans, M. Charles Pasqua expulsait une vingtaine d’étrangers après les avoir embastillés pendant un mois dans une caserne désaffectée. Le ministre de l’intérieur les accusait d’être les « complices de terroristes » algériens, mais leur culpabilité n’a jamais été établie. Retour sur l’affaire de Folembray de l’été 1994.
« Si l’expulsion d’« islamistes » était un art, le feuilleton de Folembray d’août 1994, mis en scène par M. Charles Pasqua, figurerait certainement parmi les chefs-d’œuvre oubliés. Avant d’être envoyées au Burkina Faso, une vingtaine de personnes sous le coup d’une « expulsion en urgence absolue » passeront un mois derrière les grilles de la caserne de gendarmerie de cette petite ville de l’Aisne, sous le regard des caméras de télévision et des objectifs des photographes.
Tout commence le 3 août, avec l’assassinat de cinq Français à Alger, qui plonge la France dans la « seconde guerre d’Algérie ». Profitant des circonstances, M. Pasqua, ministre de l’intérieur depuis 1993, engage une politique à grand spectacle articulant lutte contre l’islamisme et gestion sécuritaire de l’immigration. Outre l’interdiction de quelques publications islamistes et l’expulsion d’un imam turc immédiatement arrêté par les autorités d’Ankara, il lance une opération de contrôle d’identité sans précédent dans les « quartiers sensibles » (27 000 vérifications en deux semaines) et réquisitionne la caserne désaffectée de Folembray, dans l’Aisne , où il transfère quelques « islamistes » algériens résidant en France en situation régulière.
A l’époque, le gouvernement de M. Edouard Balladur est divisé sur l’Algérie. A l’instar des Etats-Unis et de plusieurs pays européens qui se montrent plutôt accommodants avec le Front islamique du salut (FIS), privé de sa victoire électorale en 1992, M. Alain Juppé, ministre des affaires étrangères, souhaite une prise de distance avec un pouvoir algérien bien peu démocratique et l’instauration d’un dialogue dans lequel ceux que l’on commence à appeler les « islamistes modérés » pourraient avoir leur place. Pour M. Pasqua, au contraire, l’« islamisme modéré » est une « fumisterie » : il y a d’un côté les « modérés » et de l’autre les « islamistes », avec lesquels aucun dialogue n’est possible (Europe 1, 4 août)5.
Dans Le Quotidien d'Algérie, Zineb Azouz, remémore la chose en juin 2010, sous le titre : « Les déportés de Folembray ou le crime « perdu de vue » de Pasqua » : « Le 3 août 1994 quand cinq agents diplomatiques français furent assassinés à Alger, il ne pouvait y avoir meilleure aubaine pour Charles Pasqua, tout puissant ministre de l’Intérieur du gouvernement Balladur, pour tendre la main à ses amis de la mafia politique Algérienne et mener ce que certains ont appelé « la seconde guerre d’Algérie ». Alors que des voix s’élevaient partout en Europe et en France pour dénoncer les graves violations des droits de l’homme en Algérie et que le désaveu pesait lourdement sur le régime Algérien suite au Putsch de 1991 et à l’arrêt du processus électoral, Pasqua va mener un véritable SHOW SECURITAIRE dans lequel se confondaient délibérément gestion de l’immigration et lutte anti-islamiste.Face à une France dans l’expectative par rapport à l’islamisme Algérien et une opinion plus travaillée par les thèses racistes sur l’immigration, il fallait frapper fort et surtout vite. Ainsi, Pasqua lance une des plus vastes opérations de contrôle d’identité qu’ait connu la France, pas moins de 27000 vérifications en deux semaines ! Il réquisitionne dans la foulée une ancienne caserne désaffectée de Folembray dans l’Aisne[1] pour y transférer quelques Algériens « islamistes » résidant en France en situation régulière. Ces arrestations ou ces rafles surmédiatisées au moment où le gouvernement Balladur était pourtant divisé sur l’Algérie rappellent les bonnes vieilles méthodes du tristement célèbre SAC, service d’action civique, via lequel Pasqua a fait ses armes et sur lequel nous reviendrons. Du maçon à l’étudiant de Marseille, de l’agent de gestion à Lyon au chercheur au CNRS ou l’avocat de Paris, les « islamistes » arrêtés par M. Pasqua et qui se rencontraient pour la première fois à Folembray ressemblent étrangement à un échantillon représentatif de l’immigration.
Cet épisode allait se solder par l’expulsion de 20 personnes vers le Burkina (19 Algériens et 1 Marocain) sans procès et sans la moindre inculpation. 6 d’entre eux sont toujours assignés à résidence là-bas, dans ce que certains appellent l’arrière cour des prisons Françaises. Bientôt 16 ans que des familles déchirées attendent que l’Etat de droit s’exprime sur ces déportés de la France, 16 ans que des pères de famille qui n’en finissent pas de réclamer un procès, voir une inculpation subissent les affres du bannissement.Ils ont laissé derrière eux des familles démunies, délogées et pour la plupart disloquées ainsi que des enfants qu’ils n’ont bien sûr pas vu grandir, ils ont laissé des biens, une situation, une carrière et toute une vie.(...) Pourtant personne ne semble se rappeler de la précédente opération de Pasqua baptisée « Chrysanthème ».En effet plusieurs de ces « extrémistes » qui sont des militants connus sont déjà surveillés depuis des mois par la police et les médias eux-mêmes. Certains d’entre eux, revendiquant ouvertement leur appartenance au FIS sans pour autant cautionner les attaques antifrançaises, ils étaient même assignés à résidence depuis novembre 1993. Des conditions difficilement compatibles avec les actions clandestines dont parle le ministre de l’intérieur » 6.
Les prêcheurs d'islamisme conquérant – le « revivalisme islamique » - se rappellent aussi de cet épisode « corse » et s'en servent pour le développement de la théorie du nationalisme musulman, qui jamais ne pourra être un internationalisme : « De plus en plus de descendant-e-s de l’immigration coloniale, en effet, ne ressentent pas le même attachement que leurs parents vis-à-vis du pays d’origine. Les liens qui les lient à la langue et à la terre de leurs ancêtres deviennent souvent de plus en plus ténus. L’adoption de la langue française, la scolarisation à l'école républicaine et l’injonction à l’intégration font ainsi sentir leurs effets dépersonnalisant. Si le référent national semble pour eux moins prégnant, ils ne se reconnaissent pas non plus dans les perspectives assimilationnistes de l’ « antiracisme » et des organisations de gauche »7. Voici leur version de l'affaire Folembray :
« Par la suite, les attentats de 1995 dans le RER parisien et l’ « affaire Kelkal » servent de justification à l’adoption de mesures de profilage racial contre les musulman-e-s, et de lois plus restrictives sur l’immigration. Ils entraînent également une hostilité grandissante des élus locaux, de droite comme de gauche, envers les associations musulmanes (refus de salles, suppression de subventions, etc.). Cette politique islamophobe s'inscrivait dans une perspective plus vaste de désislamisation de l'immigration musulmane, énoncée par exemple en 1991 par Jean-Claude Barreau, conseiller de Charles Pasqua pour les questions d’immigration : « L’intégration passe par l’abandon de la religion musulmane[7] ». Des propos qui font écho à ceux prononcés outre-atlantique par Malcolm X des décennies plus tôt, lorsqu’il affirmait :« Etre Noir en Amérique est suffisant pour être considéré comme "non-américain", mais être Noir et musulman, c’est être "anti-américain." » . Malgré le climat délétère en France, l'emprisonnement, l'assignation à résidence ou l'expulsion de militants musulmans, et l’hostilité des pouvoirs publics envers tout ce qui est trop ostensiblement islamique, les musulman-e-s installé-e-s ici n’hésitent plus à s’organiser sur la base de leur appartenance religieuse »8. (vous avez noté l'orthographe normalisée à la façon des écrits gauchistes féministes bourgeois... si l'égalité hommes-femmes n'est pas prêt(e) d'exister au moins peut-elle figurer dans l'orthographe gauchiste et islamo-fasciste).















1On peut lire ainsi un internaute dans Corse-Matin de décembre 2013: « Mes deux grands mères portaient un mandile le foulard noir sur la tête et les femmes corses en deuil devaient s' habiller en noir sinon on les regardait de travers.C'étaient des coutumes ancestrales communautaires qui stigmatisaient les femmes.Pire:il n'y a pas si longtemps dans l'île dans certains coins les femmes ne mangeaient pas avec les hommes à table mais devaient se tenir debout prêtes à les servir ....sans compter la femme chargée d'un lourd fardeau porté sur la tête suivant l'homme chevauchant l'âne..Image qui a fait le tour du monde figée sur une carte postale.Bref ces pratiques communautaristes et d'origine religieuse ont cessé chez nous depuis qu'on on est passé à l'ère industrielle et que le village dépositaire de ces traditions a explosé.les musulmans n''ont pas encore franchi ce pas:le bled existe encore dans la réalité comme dans les têtes. Le communautarisme est très présent et vigilant et la religion veille à la perpétuation des rites et pratiques qui fondent et identifient une communauté au bled et aussi en dehors du bled.Tout cela s' estompait avec l'intégration progressive des musulmans français .....sauf qu'on a reconstitué le village en les parquant dans des cités....et que les mollahs ont compris que les religions qui perdent leurs rites obligatoires dépérissent (le catholicisme) et veillent donc au grain de couscous ».
2https://blogs.mediapart.fr/france-corse/blog/020715/racisme-et-nationalisme-en-corse
3Et aussi, pendant du très oecuménique et chauvin « je suis Charlie », apparaît le slogan « je suis corse ».
4https://www.corsematin.com/article/ajaccio/on-est-chez-nous-scandent-les-ajacciens-a-lempereur.1940661.html
5Lire : https://www.monde-diplomatique.fr/2004/08/DELTOMBE/11466. Sur les aspects juridiques, voir Benoît Larbiou, L’Etat de droit à l’épreuve de « Folembray », mémoire de DEA de sciences politiques et politiques publiques, université Montpellier-I, sous la direction de Jean-Louis Autin, septembre 1995.Lors du procès en 2000, le juge Roger Le Loire évoquera « une construction de preuves pure et simple » et précisera que « les autorités policières avaient pour seul impératif de faire déférer (...) le chef du FIS en France pour donner un caractère de réussite à l’opération coup de poing “Chrysanthème”  ».
6http://www.algeria-watch.org/fr/mrv/mrvrepr/deportes_folembray.htmLire :
7http://www.ism-france.org/analyses/Du-mouvement-beur-a-la-lutte-contre-l-islamophobie-la-haine-de-l-autonomie-2eme-partie--article-18628
8Ibidem. Autres morceaux choisis de ce revivalisme musulman, de type clairement fasciste (et qui de fait a triomphé avec l'arrivée au pouvoir de Hollande), Cazeneuve vient de sortir une perle complètement « revivaliste » : « la république défend ceux qui croient », ce qui est confondant de collusion avec l'arriération religieuse ! Voici donc comment les revivalistes font la leçon à la gauche antiraciste et aux féministes gauchistes, époustouflant : « Par son audience, ses valeurs, et ses références, ce mouvement de revivalisme islamique s'avère, le plus souvent, porteur d’une charge dangereuse pour la préservation du pré-carré « antiraciste » de la gauche. Il s'inscrit dans une histoire, une culture et une temporalité qui ne sont pas celles de l'univers désenchanté de la gauche matérialiste. L'histoire occidentalocentrée du mouvement ouvrier s’avère peu compatible avec l’imaginaire et les sources de réflexion d'une politique musulmane.

La gauche et l'extrême gauche se devaient alors de redessiner les contours de leur « espace vital », qui devait être à la fois « antiraciste », et hostile à ce mouvement de revivalisme islamique, et par conséquent islamophobe. Aux plaidoyers sur la nécessaire lutte contre le racisme de l'extrême droite, sont donc venus s’ajouter des politiques visant à réprimer de manière toujours plus forte toute expression d’appartenance à l'Islam.

Au nom notamment du féminisme, et du vieux crédo colonial « Ayons les femmes et le reste suivra[8] », la gauche met en place un discours et des pratiques visant à intimider les femmes musulmanes, afin qu'elles ne revêtissent pas le hijab. A partir de 1989 et l’affaire dite du foulard à Creil, une certaine partie de la gauche, qui fait ici cause commune avec la droite, redouble de zèle pour faire exclure les femmes portant le hijab de l'école publique, et de la société en général. Ces pratiques ne parvinrent toutefois pas à enrayer le mouvement de revivalisme islamique ».

vendredi 25 décembre 2015

Déchéance de la nationalité et déchéance de l'internationalisme

UNE BAGARRE CREUSE ENTRE BOURGEOIS

Nationaux, binationaux, plurinationaux... les anneaux inextricables de l'idéologie de guerre moderne

Fièrement patriote dans la guerre anti-terroriste ?

Faut-il retirer la nationalité française aux personnes qui partent faire le djihad à l'étranger ? Pour l'instant, la loi autorise cette mesure uniquement quand elle cible des auteurs d'actes terroristes binationaux qui ont obtenu la nationalité française depuis moins de dix ans. Mais le débat se durcit depuis les attentats de Paris... dans le verre d'eau politicien hexagonal où tout est confus et où personne n'y pige que pouic ! Pourtant la vie politique bourgeoise semble bien n'être plus que répétitions de mêmes événements dramatiques, de mêmes arguties, de mêmes crimes, d'une même répétition... répudiation générale ?

Au début de cette année, dans les colonnes du Figaro, un sénateur belge, Alain Destexhe1, expliquait comment le gouvernement de son pays envisageait d'appliquer la déchéance de nationalité aux terroristes condamnés, le 10 février soit peu de temps après le meurtre des dessinateurs de Charlie Hebdo. Etait décrite la même scène de scandale qui se déroule en ce moment en France à la veille de la fête païenne de Noël : une gauche bourgeoise s'époumonant contre une stigmatisation honteuse au regard du « droit international » qui interdit de créer des apatrides2. Les binationaux peuvent être appelés à servir dans les deux armées, tout comme à voter les crédits militaires dans leurs deux pays même si ceux-ci sont en guerre... La gauche bourgeoise contestataire n'a pas entièrement tort pour une fois, mais pas pour les raisons qu'elle avance, et sans avouer la séduction indirecte qu'elle manifeste envers les « électeurs musulmans ».

La question de la déchéance de la nationalité est une très vieille question qui n'est en rien dépendante des droits de l'homme ou d'une dignité civique bafouée comme le proclame la gauche vertueuse électoraliste et antiraciste3. Si vous examinez le traitement chronologique de ladite déchéance, pas seulement pour les binationaux4,sur votre wikipédia ou dans la liste de vos favoris des mystifications historiques, vous verrez qu'elle est toujours corrélée au moment de guerres, aux nécessités idéologiques de désignation d'un « ennemi intérieur », à peu près sur le même plan que la suppression des droits civils pour les condamnés de droit commun, et surtout aux nécessités de recrutement militaire massif5. C'est pas grand chose pour un aventurier ou un espion, et ça fait pas mal comme le peloton d'exécution.

Peu nous chaut la querelle en ses débuts, campagne idéologique qui devrait perdurer jusqu'en février prochain. On ne va pas vers une presse des années 1930 exigeant chaque jour la déchéance des juifs ! La campagne inaudible de l'extrême gauche pour la vigilance de l'antiracisme en 2015 confirme qu'elle n'a rien à voir avec la classe ouvrière, peut-être avec les assocs caritatives, mais surtout rend ses comptes aux petits bobos parisiens. L'indignation des Mélenchon et des retraités à la Cohn-Bendit nous fait sourire. Moins l'orchestration de « double faute » de Hollande6. Visiblement « habité » par le manoeuvriérisme à la Mitterrand, Hollande tient à faire savoir qu'il est au centre du jeu symbolique7; cela lui réussit très bien comme l'a confirmé le résultat des élections, sauf que, comme toujours, à force de diaboliser le FN, le plus grave passe : rien n'est véritablement organisé contre l'islamisme rampant, en particulier sur les lieux de travail, et les crétins nationalistes corses se voient déjà tirer leur épingle du jeu suite à l'oubli présidentiel. Néanmoins, malgré des ratés, un chef doit toujours déstabiliser par période, leçon de Machiavel.
Le maintien de la déchéance de nationalité – qui existe pourtant déjà dans la législation - qui ne pourra concerner qu'une dizaine d'imbéciles attrapés avec leur cagoule, jette le trouble dans toutes les factions politiques de droite à gauche. Sel de la manœuvre, la « laxiste » Taubira devrait démissionner, victime du « couac gouvernemental ». Peau de balle ! Mme Taubira a toute sa place au gouvernement de la gauche caviar, comme hier M. Chevènement chez Mitterrand. Ou hier encore les transfuges Kouchner et Buisson chez Sarkozy. Les gouvernements modernes se doivent d'être dotés de « sensibilités » diverses, comme d'un quota racial pour donner l'impression de représenter « tout le peuple » républicain et vacciné journellement contre le racisme et le fascisme. De même, Mme Duflot, en tant que représentante de la rive gauche et de l'écologie évolutionniste, a tout à fait le droit de s'indigner de la « trahison » du président sans frac et sans gibus : « Les criminels, on les pourchasse, on les juge, on les condamne"(...) "je préfére que quelqu'un qui a attaqué notre pays soit jugé en France, en prison en France et surveillé plutôt que renvoyé dans un autre pays et qu'on ne sache pas quand est-ce qu'il peut intervenir ou revenir". 
Vous l'aurez remarqué elle ne défend ni l'assassin mercenaire de l'impérialisme ennemi, ni un principe républicain violé jadis par l'extrême droite, mais une répression « contrôlée » au pays. Toute la tempête dans un dé à coudre de la gauche diversifiée et pluriculturelle ne porte donc que sur le degré de nationalité à préserver. Ces galipettes procédurales abstraites entre bourgeois au pouvoir des médias esquivent le fond du problème : la cause du terrorisme et ses imbrications avec con-vertis islamiques dans un panel de concurrents masqués au niveau international, à une époque où traîtres et espions ne sont plus fusillés mais servent à leur tour d'otages ou de monnaies d'échange entre Etats terroristes ! Les « belligérants » islamiques, ceux qui n'ont pas eu le temps de s'enfuir sans crever après avoir opéré au nouveau concept sociologique en vogue de « tuerie de masse », pourront toujours attendre en prison démocratique d'être un jour libérés, à la faveur de négociations inter-étatiques dont vous avez des chances de ne jamais entendre parler.
Sur le fond, la querelle est d'importance tout de même pour les bourgeois en guerre. Le sens de la bataille verbale (à l'arrière) est : la nationalité ça se mérite ! C'est d'ailleurs un prolongement du projet de débat échoué de Sarkozy et sa troupe sur l'identité nationale. Tous semblent s'être mis d'accord sur une exhumation du terme « patriotisme », quand de sévères professeurs politiques autorisés veulent nous « expliquer » qu'il n'a jamais copulé avec le terme nationalisme. Désormais un peu partout, non seulement en France, la classe ouvrière est constituée majoritairement d'immigrés. En aussi peu de temps cela constitue un changement par rapport à jadis, mais ce n'est pas le seul changement. L'immigration massive, est désormais vouée à ne pas reproduire la classe ouvrière classique mais à entrer, avec sa religion, dans le cadre de la « communauté nationale », c'est à dire à se considérer comme... autonome par sa religion, libre de décider si elle souhaite des mosquées ou faire porter des rideaux à ses femmes. La menace de déchéance de la nationalité, comme également je l'avais signalé pour la punition de la catégorie des hommes seuls qui vont au bordel, vise donc spécifiquement cette partie de la population prolétaire ; je suis complètement d'accord avec cet internaute anonyme qui écrit : « L'impact de cette mesure contribuerait à fragiliser encore des populations issues de l'immigration, puisqu’elles constitueraient évidemment sa principale cible. Près du tiers des descendants d’immigrés déclarent une double nationalité ». Dans le même sens, j'insiste sur le fait que l'islamophobie ne concerne pas les français croyants ou non, mais les prolétaires d'origine maghrébine qui en ont peur, qui sont soumis journellement à la pression policière de leurs maîtres à penser leur vie quotidienne et aux petits bras à longue barbe qui essaiment et prétendent régenter les mœurs de leur quartier à défaut de trouver une place honorable dans la société de classes hiérarchisées. En gros, sous prétexte de lutte contre une poignée d'assassins terroristes sans foi ni loi, on met la pression sur une grande partie de la classe ouvrière à connotation musulmane, pour faire mine de satisfaire celle, de souche, qui se sent aussi lésée que celle qui est stigmatisée si machiavéliquement par les médias Gorgones. L'ouvrier musulman est ainsi pris en otage entre imams et policiers institutionnels de l'ordre bourgeois.
On notera d'ailleurs immédiatement ci-après l'intrusion saoudienne (ce modèle de tolérance et de libération de la femme) qui arrive à peu près aux mêmes conclusions que moi :
« Parlant de cette mesure comme du résultat « des attaques de la droite contre les idéaux français », le site saoudien Arab News dénonce un « cadeau idéologique au Front national », et craint que l’extension de la déchéance de nationalité « n’isole les musulmans » de France. Car, « première cible de la lutte contre le terrorisme », les musulmans risquent de vivre dans la crainte de perdre leur nationalité, poursuit l’éditorial du site saoudien. Et de conclure : « Un tel changement de la Constitution ne fera que renforcer le statut de citoyens de seconde zone dont beaucoup de musulmans français ont souffert. »


Comment combattre une idéologie « sans patrie ni frontières » ?
On pensait en avoir fini avec la patriotisme depuis le carnage de 14-18, ou du moins depuis la boucherie « inter-nationaliste » et « anti-fasciste » de 39-45, ou encore, pour les puceaux, depuis le juvénile anti-patriotisme de 1968. Mais non, il nous est resservi, toutes classes, toutes races et toutes religions confondues, le patriotisme, ressorti de la naphtaline, des vieux livres d'école sentant bon l'aisselle des hussards noirs de la République. Est-ce qu'on n'avait pas trop rêvé, pas trop exagéré, pas trop oublié nos aïeux morts pour la France, Dantzig ou Alger ? Dans les moments de doute, un marxiste chevronné, devenu fébrile, se jette alors aussitôt sur ses classiques, couverts de poussière, pour se rassurer avec les « chers maîtres ».
Il trouve alors les classiques plus nuancés qu'il ne le pensait, pas anti-patriotiques simplistes à la Proudhon, Lafargue ou Gustave Hervé. Le Manifeste communiste :
« En outre, on accuse les communistes de vouloir abolir la patrie, la nationalité. Les ouvriers n'ont pas de patrie. On ne peut leur ravir ce qu'ils n'ont pas. Comme le prolétariat de chaque pays doit, en premier lieu, conquérir le pouvoir politique, s'ériger en classe nationalement dirigeante, devenir lui-même la nation, il est encore par là national, quoique nullement au sens bourgeois du mot ». Manifeste communiste de 1848 ».
Etrange, se dit-il, ce prolétariat « encore national... quoique nullement au sens bourgeois du mot ». Et cet héritier qui n'éclaircit pas mieux :
«La notion de nation, écrit Kautsky, est également difficile à délimiter. La difficulté n'est pas diminuée par le fait que deux structures sociales sont désignées par le même mot et la même structure par deux mots différents. En Europe occidentale, avec sa vieille culture capitaliste, la population de chaque Etat se sent solidement liée à lui. On y désigne comme nation la population d'un Etat. Dans ce sens, on parle par exemple d'une nation belge. Plus on se dirige vers l'Est de l'Europe, plus nombreuses deviennent les parties de la population d'un Etat qui ne veulent pas lui appartenir et qui constituent dans celui-ci des communautés nationales. On les nomme aussi bien «nations» que «nationalités». Il serait bien plus approprié d'appliquer à ces communautés cette dernière désignation» (La Conception matérialiste de l'Histoire).
Plus tard, un essayiste de génie, Rosdolsky éclaircit sa lanterne : « Pour revenir au passage cité au début de cet article, en caractérisant la lutte du prolétariat contre la bourgeoisie comme une lutte «en premier lieu nationale» Marx et Engels ont manifestement en vue une lutte menée en premier lieu dans le cadre d´un Etat. Cela découle clairement de la motivation de cette phrase selon laquelle «le prolétariat de chaque pays doit en finir, avant tout, avec sa propre bourgeoisie». Mais, de ce point de vue, la phrase «s'ériger en classe nationale dirigeante», «devenir lui-même la nation», acquiert également une signification tout à fait définie. En fait, elle ne dit rien d'autre que le prolétariat doit se dresser tout d'abord dans les frontières d'Etat existantes, s'ériger en classe dirigeante à l'intérieur des Etats existants. C'est pourquoi il sera «encore national», provisoirement, «quoique nullement au sens de la bourgeoisie» qui aperçoit son objectif dans les séparations politiques entre les peuples et dans l'exploitation des nations étrangères par sa propre nation. En opposition à cela, la classe ouvrière victorieuse agira dès le début en vue d'éliminer les séparations nationales et les oppositions entre les peuples et créera par sa domination les prémisses pour que disparaissent, «avec l'opposition des classes au sein de la nation», en même temps aussi «les attitudes hostiles des nations les unes envers les autres». De ce point de vue, et seulement de ce point de vue, peut-il être question en général de «l'abolition» ou de «l'annihilation» de la nationalité - dans la mesure où il faut comprendre par cela non l'élimination de la formation linguistique-ethnique existante (ce qui serait tout-à-fait insensé !) mais au contraire des séparations politiques entre les peuples. Dans une société où, selon les termes du Manifeste, «l'autorité publique perd son caractère politique», où l'Etat en tant que tel «dépérira», il ne peut en tout cas plus y avoir de place pour des Etats nationaux distincts ! »8.

Notre marxiste fébrile reste tout de même fébrile ! S'il faut attendre une prise du pouvoir nationale du prolétariat pour mettre fin à « l'exploitation des nations étrangères », aux « séparations nationales », à « l'opposition des classes à l'intérieur de la nation », aux « attitudes hostiles des nations les unes envers les autres », l'eau coulera sous les ponts jusqu'à la pollution complète et rapide de la planète. L'auteur fait allusion à une forme de « déchéance de la nationalité », mais seulement après le renversement de l'Etat bourgeois, ce qui semble évident à notre marxiste fébrile ; il reste dubitatif sur la non élimination de la « formation linguistique-ethnique existante » ; de quoi veut-il parler ? Et à notre époque, pourra-t-on renverser l'Etat bourgeois ailleurs que dans une seule nation, voire simultanément, en restant divisés par les nouvelles guerres de religion impérialiste ?
Sera-t-on obligé de conserver toutes ces religions bellicistes au nom d'une démocratie prolétarienne meilleure que la bourgeoise ?
Laissons pour l'instant de côté ces questions folles-désirantes de notre marxiste fébrile et revenons à notre prosaïque monde altermondialiste et antiraciste oecuménique pour ausculter ceux qui ont le mérite de tenter quelque chose, et pour qui, même si je les critique, j'ai un grand respect.
Je recense en général les prises de position des groupes maximalistes, même lorsqu'il y en a peu lors des événements graves. Il n'y a plus grand monde dans cet univers. J'ai reçu ou découvert avec retard, et je m'en excuse, la prise de position de Voix des travailleurs, feuille de boîte clone de celles de LO par un site Matière et Révolution, animé par Robert Paris, sur les massacres à Paris. Ce cercle, qui n'est pas un véritable groupe, pourrait être qualifié de groupe trotskien évolué. Sa prise de position s'intitule sous forme de tract à quatre pages : « Quel est ce monde ? Est-ce le nôtre ? Ou le nôtre est-il encore à construire ? ». L'auteur, et ses cosignataires, eussent pu faire bref, mais non. Le déroulé de l'argumentation ne se prononce pas immédiatement par rapport au carnage terroriste, mais s'étale, dans le plus pur style hollandesque, en nous livrant un catalogue de constats des turpitudes du capitalisme sur diverses couches de la population mondiale avec la méthode qui me sort par les yeux désormais : l'anaphore. Celle-ci permet l'accumulation d'un certain nombre de données visant à solliciter la compassion ou l'indignation du public. Cette méthode n'est plus bonne que pour les enterrements où en effet Hollande a excellé. Mais nous, comme les victimes, et les exploités du monde entier, ne voulons plus de paroles de réconfort face à cette « guerre mondiale qui commence » comme le note justement le tract. Voulant s'élever, par le catalogue et l'anaphore, au niveau des problèmes du monde entier, l'argumentation faiblit dès qu'elle aborde les 132 massacrés de novembre à Paris. Peut-on trouver une excuse aux mercenaires terroristes assassins en justifiant leur action d'abord comme une conséquence de l'intervention de l'impérialisme français en Libye puis en Syrie? (« on n'est pas étonné que cette guerre nous revienne en boomerang en pleine gueule ! »)et de critiquer l'incompétence des services anti-terroristes... Ces remarques ne sont pas entièrement fausses, mais inopérantes pour comprendre l'expansion du terrorisme, pas seulement à cause du capitalisme en guerre. Plus loin dans le tract il est noté que dans aucun des pays (de la Tunisie à la Syrie : « le terrorisme n'est apparu avant les destructions massives causées par les armées occidentales ». C'est bizarre de n'évoquer que les armées occidentales (et la Russie ? Et les diverses puissances régionales?). Et c'est faux. La pratique terroriste a été constante partout depuis le début du XX ème siècle, et pour faire court, peut-on oublier le « terrorisme des Etats faibles » à la fin des années 1970 avec le triomphe des ayatollahs iraniens en 1979. Avant de devenir une des stratégies des grandes puissances décadentes, ce « terrorisme des pauvres » a été développé par ces Etats, vassaux ou non des deux principales puissances du temps de la guerre froide9. Tous ces Etats avaient d'ailleurs été découpés artificiellement, et patriotiquement, de façon aberrante ; il suffit de voir la carte de l'Afrique. Ce qui ne signifie pas que les grandes puissances n'étaient pas derrière. Et la plupart de ces Etats furent régi au nom de la théorie stalinienne de la « libération nationale ». L'idéologie stalinienne, fruit du « socialisme dégénéré dans un seul pays » allait comme un gant à l'idéologie patriotico-nationale de Cuba à Ouagadoudou.
Or, dans tous ces pays, faussement libérés des grands frères impérialistes, a fini par apparaître une nouvelle idéologie, qui était (bien que l'on ne l'ai pas vue sous le béret de Guévara) déjà une religion patriotique à vocation cosmopolite, déjà clairement avancée par les aïeux de Tariq Ramadan. Même si l'islam a été sponsorisé d'une façon ou d'une autre par la principale grande puissance, il marche, il avance avec ce soi-disant « islam radical » justification du terrorisme. Boomerang des forfaits impérialistes de la bourgeoisie française, je veux bien, mais que les mercenaires assassins s'attaquent à des hommes armés de l'armée française, sinon leur cause est de la merde. Dans un raisonnement néo-tiers-mondiste sur les injustices en général, on oublie de que la particulier – le massacre de civils innocents – est le lot quotidien de la plupart des populations des pays directement mêlés aux guerres de rapine capitaliste. Et qu'il ne s'agit pas de critiquer seulement sa bourgeoisie, qui joue à se confondre et à compatir avec les victimes, mais d'expliquer pourquoi des victimes, armées de pied en cap, sont COMPLICES ET EXECUTANTS des basses œuvres. L'islamisme et son utilisation médiatique n'est pas un fascisme relooké, il est pire, il annonce la nouvelle guerre mondiale à terme. Certes le salafisme (ou la secte daech qui s'en inspire) est à l'islamisme ce que le nazisme est au fascisme. L'islamisme se répand beaucoup plus rapidement que ne s'était répandu le stalinisme ; ce dernier fonctionnait bien dans un cadre national, quand l'islamisme « sans patrie ni frontières » est en adaptation permanente (depuis Al Qaïda) au besoin mondial d'un capitalisme à la recherche effrénée de reconstitution d'un bloc antagoniste capable de justifier une nouvelle guerre vraiment mondialisée. L'islamisme avec sa charia et ses défroques du Moyen âge est bien plus mondialiste que le nazisme, qui vénérait le bastion allemand et n'avait pas la prétention globale, tout comme le fascisme italien portait haut la prétention à conserver le drapeau patriotique mais en restant dans la botte et avec quelques dépendances coloniales. Aujourd'hui le capitalisme débarrassé de l'intermède stalinien, a besoin d'un adversaire à sa mesure, même si c'est son miroir. Le capitalisme n'étant qu'une accumulation de patriotismes en compétition a besoin de la guerre comme d'une drogue, quitte à frôler le suicide.
Le tract se base sur des clichés ringards. Ce n'est pas « l'état de guerre », plus ou moins mis en scène -qui fait fuir massivement les populations qui peut «  mieux détourner de la crise économique, et pas vraiment les plus pauvres - sociale et politique »10, c'est l'invention de toute une série de concepts visant à donner des leçons de citoyenneté antiraciste aux millions d'abstentionnistes, avec ce fleuron idéologique : la dite islamophobie (inventée non pas T.Ramadan mais par le colonialisme français)11.
Les attentats des mercenaires terroristes ne sont pas encore la guerre. Ils aident à la préparer. Le tract contient des vérités : « c'est bien de la lutte des classes que l'impérialisme veut nous détourner en combattant un ennemi qu'il s'est lui-même fabriqué sur mesure : le terrorisme intégriste se revendiquant de l'islam ». Quoique la bourgeoisie n'ait pas trop d'inquiétudes à l'heure actuelle sur le niveau de la lutte des classes... Surtout pas des fariboles de « Voix des travailleurs » qui imagine que l'Egypte et la Tunisie ont connu rien de moins qu'un « début de soulèvement révolutionnaire » ; et franchement ce n'est pas la magie du bal terrorisme/anti-terrorisme qui a coulé la soi-disante « vague des révolutions du Maghreb », mais l'absence de perspectives politiques de classe dans une grand encadrement « islaméricain ».

La classe ouvrière n'est pas encore dangereuse en Europe au point qu'elle puisse être confondue avec les tueurs islamiques, mais on nous chante que : « l'état d'urgence a servi à Cazeneuve pour perquisitionner contre les travailleurs les plus combatifs d'Air France »12. C'est pas contre des travailleurs combatifs que la police à perquisitionné mais elle a participé à la même mise en scène que sous Sarkozy en 2006, avec l'épisode « les mosquées de Roissy » et la mésaventure du pauvre « bagagiste de Roissy » Abderrezak Besseghir ; la presse avait répercuté, avec pratiquement les mêmes chiffres que récemment et sans preuve tangible, que 72 travailleurs s'étaient vu retirer leur badge d'accès en raison de leurs liens avec « des mouvances fondamentalistes à visée potentiellement terroriste ». Même s'il peut toujours y avoir un ou deux con-vertis, le but est d'effrayer la population et indirectement de tout mettre sur le dos des islamistes de l'ombre. Il peut y avoir aussi des ratés dans les campagnes de manipulation de l'Etat bourgeois. L'affaire Merah est une des plus cruelles. Comme les conseillers de Sarkozy, les Raffy et Mucchielli, accusateurs publics irresponsables, jamais la presse n'a fait amende honorable d'avoir fait courir le bruit que le meurtre des jeunes militaires d'origine maghrébine et des enfants de l'école juive, était le fait du FN ; ces crimes étaient : «  la conséquence d'une campagne violente et haineuse à l'égard des minorités religieuses » ; malgré le nombre des victimes il n'y eût pas de gigantesques manifs comme lors des tueries à Paris.
Difficile pour la classe ouvrière, ou ceux qui veulent être ses hérauts, de combattre tant de confusion, de démêler le vrai du faux, de ce qui a réellement échappé à la surveillance policière et de ce qui est brodé autour.
Enfin, il ne faut pas tomber dans la propaganda régnante sur les motivations des apprentis tueurs des recettes de cuisine du coran, où l'abus de vidéos de daech montrant des enfants tués « rendent fous les islamistes et qui les amènent à vouloir punir les populations des pays occidentaux ». Je reproduis cet extrait inséré dans mon article : qui est daech ?
Le recrutement terroriste n'est ni une radicalisation (radicalisation de quoi ? Politique ? Certainement pas. Sociale ? Encore moins. Romantisme révolutionnaire religieux ? Des clous !) Très prosaïque le recrutement aux causes, nullement psychologiques, si bien décrites par un internaute anonyme :
Que cette nébuleuse terroriste n'ait aucun problème à recruter, pas grand mystère là dedans. Du fric, des voyages, de l'aventure, de l'adrénaline à profusion, une image de héros aux yeux des jeunes femmes converties, un sentiment d'appartenance, le paradis garanti où l'attendront des houris de service, à opposer le plus souvent à une vie monotone, sans but, sans flouze, sans prestige, d'un vide sidéral. Ajouté à cela, comme le montre cette analyse, un champ d'action paralysé par l'inertie, englué dans la procédure, où ne règnent qu'un minimum d'entraves, Ni les attentats ni le recrutement ne sont en voie de se tarir.
Pas sûr que le cri « révolution sociale » suffise à réveiller les morts ou à rassurer les vivants .
Sans doute faudra-t-il nous pencher plus sérieusement sur l'échec de l'utilisation du « joujou patriotique », du patriotisme comme collaboration de classe, sans oublier le cosmopolitisme islamiste comme collusion de classes. Avant de pouvoir pronostiquer une révolution sociale à l'horizon, et empêcher la déchéance de l'internationalisme prolétarien.

Déchéance des doubles nationalitaires Cohn-Bendit et  Valls. Laissons les bourgeois enterrer leurs projets moribonds avec leurs phrases creuses sur la préservation sacrée d'une nationalité à double ou simple vitesse. Autrefois cette élite puante débordait de chauvinisme simpliste, maintenant, c'est le contenu multinationaliste qui déborde de phrases du magasin des antiquités.

 


1Il est ex-président de Médecins Sans Frontières et auteur d'une « Lettre aux progressistes qui flirtent avec l'islam réac ».
2Sauf pour les révolutionnaires marxistes d'une Planète sans visa et réfugiés politiques laissés aux mains de leurs geôliers nationaux d'origine ! Lire l'article instructif sur les litiges posés par la gestion des « binationaux » : http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2015/02/10/31003-decheance-de-la-nationalite-la-belgique-va-plus-loin-que-la-france
3Hollande enfonce une porte ouverte : sur l'OBS un spécialiste répond : « Patrick Weil : L’article 23-7 du code civil prévoit depuis le 12 novembre 1938 la possibilité de déchoir de la nationalité un Français né français qui possède une autre nationalité.
Cette disposition fut adoptée par l’un des fameux décrets-lois d’Edouard Daladier, dans une période où l’on approchait de la guerre – Hitler était au pouvoir, l’Espagne était en guerre civile –, en contrepartie de l’acceptation très libérale de la double nationalité et en réaction à la loi de 1927 qui prévoyait par exemple la naturalisation après trois ans de séjour seulement. Cette disposition a été maintenue après la Libération dans l’ordonnance de 1945 signée du général de Gaulle, et elle est donc intégrée à notre législation depuis 75 ans. Elle a été appliquée à quelques centaines de personnes, des collaborateurs après la guerre mais aussi des communistes pendant la guerre froide ».
4Les remarques incidentes des internautes valent souvent plus que le contenu des articles bourgeois. Celui-ci s'interroge : « Même s'il est vrai que jusqu'à présent la plupart des terroristes était des binationaux que fait-on de ceux qui ont uniquement la nationalité française? ». Et celui-là se moque franchement : « Est ce que ça peut s’appliquer à un fils d’immigré Hongrois qui massacre la langue française ? ».

5La naturalisation des juifs d'Algérie n'était pas une mesure humanitaire, mais présentait l'avantage en conférant la qualité de citoyen français (à la veille de 1940, décret Crémieux) : l'obligation du service militaire.
6Le Monde, premier prosélyte de la propagande islaméricaine (le mot n'est pas de moi), définit les deux rails de la pensée unique va-t-en-guerre : la citoyenneté sans classe et le tigre électoral de papier : « Car la décision présidentielle constitue une double et lourde faute. D’une part, elle porte directement atteinte au principe d’égalité des citoyens, fondement de la République inscrit à l’article 2 de la Constitution. Elle revient, en effet, à instituer deux catégories de Français, ceux qui le seraient sans conteste et ceux qui ne le seraient pas complètement au motif que leurs parents ou grands-parents ne l’étaient pas. Comme la République, la citoyenneté est indivisible. D’autre part, en reprenant à son compte une mesure réclamée depuis longtemps par le Front national, le chef de l’Etat prend la responsabilité, majeure, d’en banaliser la détestable logique xénophobe » (op cit)
7Symbolique que confirme le même Monde qui note ainsi le gouvernement selon les humeurs de ses commanditaires : « cf le monde : L’efficacité de cette mesure dans la lutte contre le terrorisme ? Le premier ministre lui-même a reconnu que ce « n’est pas l’enjeu premier ». Qui peut, en effet, imaginer qu’une telle déchéance ait quelque pouvoir dissuasif que ce soit sur un terroriste décidé à passer à l’acte ? Manuel Valls a, en revanche, souligné « le caractère hautement symbolique » de cette disposition. Et l’on peut admettre que les symboles comptent dans un pays sourdement traumatisé par les attentats du 13 novembre et la menace majeure qu’ils continuent à faire peser. C’est la responsabilité du chef de l’Etat de tout faire pour éviter que le pays ne « disjoncte » devant l’agression dont il est la cible ». Tout symboliser donc pour empêcher le « pays » de « disjoncter » !
9Au début des années 1990, certes c'est à cause de son soutien à l'oligarchie militaire algérienne que la France devient la cible privilégiées des tueurs du GIA, causant une dizaine de morts jusqu'à l'attentat de Port-Royal en 1996 ; mais c'est le FIS qui, malgré l'échec en Algérie, a commencé à tisser l'islamisation des banlieues ; pour la première fois les assassins terroristes n'étaient plus des professionnels mais des individus recrutés localement dans les milieux associatifs et religieux. Plusieurs affaires ont cependant révélé que les services secrets français cornaquaient certains attentats : l'affaire Thévenot, l'histoire de la taupe Ali Touchent, l'affaire Folembray où une vingtaine de types pas du tout islamistes ont été déchus de la nationalité française et déportés en Afrique (lire p. 90 et suiv. De « Islamophobie la contre-enquête »).
10Avant 14, les antimilitaristes « antipatriotes » utilisaient ce genre d'argument : « les bourgeois n'avaient d'autre but que de faire diversion à la permanente guerre économique menée par les capitalistes et d'égarer les ouvriers ». L'argument n'a pas eu d'écho... ou s'est trop bien vérifié ! Les bourgeois n'avaient-ils pas substitué au dogme vieilli une religion de haine, de mort, tout autant que l'avait été l'autre : la « religion patriotique ». lire ici : http://mots.revues.org/2093?lang=en

11Lire l'indispensable et confondant « Islamophobie, la contre-enquête », de Isabelle Kersimon et Jean-Christophe Moreau, (ed PLEINJOUR).
12Que la planète gauchiste restreinte vante les arracheurs de chemises patronales comme nec ultra de la combativité me laisse de marbre. Que par contre islamistes et syndicalistes officiels laissent introduire le folklore religieux en entreprise depuis trente ans me pose problème. Même si on dénonça la déclaration de Mauroy de 1983, comme ayant pour but de diviser - « grèves menées par des groupes religieux ayant peu à voir avec les réalités sociales françaises » - il avait vu les prolégomènes d'un syndicalisme islamiste, qui a réussi là où le FN a échoué. Faut-il oublier que les grèves de 1979 en Iran ont permis... l'installation des « gardiens de la révolution » féroces tueurs.