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jeudi 18 septembre 2014

DEPUIS QUAND LE CAPITAL ALLEMAND FOUT LA MERDE EN EUROPE ?

 


Il y a une spécificité du Capital allemand qui date de sa constitution www.ihest.fr/IMG/pdf/9-allemagne2012.pdf, qu'on dit spécialisé dans l'exportation de produits manufacturés de haute technologie, mais à l'examen ce constat est bien insuffisant pour comprendre en quoi en est réduit le capitalisme décadent, au militarisme à outrance, un militarisme qui n'est pas assumé directement par le commanditaire mais génère des armées de mercenaires partout dans le monde.

Malgré ses deux défaites en 1918 et en 1945, la bourgeoisie allemande a réussi le tour de force de conserver son capital industriel et diplomatique. Non soumise à des exigences financières de réparations faramineuses comme au lendemain de 14-18, elle n'est pas l'objet d'une mise à genoux économique comme lors de l'Armistice de 1918, de la part des vainqueurs américains. Pour une raison qui coule de source de la part des vainqueurs américains, anglais mais moindre chez le cynique Staline : il n'est plus possible de tenir sous la férule de la terreur militaire les prolétariats des pays développés. L'occupation de l'impérialisme dominant ne peut plus s'exercer par le seul « parapluie » militaire primaire comme ce fût le cas sous le règne européen des nazis. L'occupation requiert une plus grande subtilité, laquelle se base sur le relèvement économique des pays dévastés par la guerre mondiale. Du plan Marshall aux accords de Bretton woods, l'impérialisme américain a besoin de pays vassaux en bonne santé économique à condition qu'ils restent ouverts à la pénétration économique de ses propres produits, des machines à l'industrie du cinéma.
Cette forme de colonisation qui pèse sur toute la reconstruction – et qui est masquée sous la création de l'entité européenne – ne s'est pas modifiée jusqu'à nos jours, l'Europe restant le principal marché capitaliste du monde.

L'effet pervers de la scission de l'Allemagne pendant 50 ans :

Nul doute comme on sait (en lisant ce blog) que le débarquement de 1944 n'avait pas pour but de libérer la France ou la Belgique (L'Allemagne avait déjà perdu la guerre au Moyen Orient), mais d'atteindre au plus vite le cœur de l'Allemagne pour conserver le bastion capitaliste le plus inexpugnable. Staline a pris de vitesse l'armada américaine qui a fait contre mauvaise fortune bon cœur. La bourgeoisie allemande maintenue, débarrassée de l'armada nazie, allait bénéficier d'un cadeau en or pour le redéploiement de son industrie ; comme Rosa Luxemburg et Lénine l'avaient démontré, le poids des dépenses militaires grève toujours terriblement les budgets d'Etats capitalistes. Et, ce qu'ils n'avaient pas pu voir à leur époque, le pétrole est devenu le sang noir du capitalisme pour lequel il ensanglante la planète.

Les deux Allemagne ont ainsi favorablement aidé et consolidé chacun des deux blocs durant la période dite de guerre froide : la RFA comme principal mirador et tremplin militaire face au bloc russe, et ce que l'on sait moins, la RFA comme principale colonne vertébrale industrielle du bloc stalinien. Parallèlement la division en deux de l'Allemagne permit déjà d'affaiblir considérablement l'unité du prolétariat, le divisant cruellement entre deux idéologies anti-communistes, entre deux niveaux de vie : triomphe du consumérisme et de la promotion sociale à l'Ouest (RFA), misère relative et bourrage de crâne anti-occidental à l'Est (RDA).
A l'Est, la RDA n'était pas simplement le satellite stalinien juste capable de fournir de misérables Traban aux prolétaires, ni le principal lieu des puissants services secrets de l'Est (la Stasi) mais la plaque tournante industrielle qui contrôlait les autres « démocraties populaires », Pologne, Tchécoslovaquie, Hongrie, etc. Le régime de Staline contrôlait donc son bloc plus à partir de la RDA que du Kremlin.
La réunion des deux Allemagne, présentée comme inévitable besoin des peuples « en révolte contre le totalitarisme » ne fût que l'aboutissement des menées américaines en particulier en Afghanistan, épuisant les ressources du bloc russe et lui faisant rendre gorge sans qu'il puisse entreprendre une guerre mondiale1. La réunification n'était en plus nullement due au prolétariat à nouveau placé au rang de grand absent de la scène historique.

L'éclatement des deux blocs, pour faire court, nous a conduit au chaos que nous connaissons aujourd'hui où les clivages n'apparaissent plus entre Etats-Nations mais fractionnent même de l'intérieur les Etats au profit de bagarres de clans industriels, financiers ou pétroliers. Pour les plus informés le massacre des twins à New York en 2001 n'est que le résultat de confrontations entre fractions de la bourgeoisie américaine. Le capitalisme moderne ne peut plus être expliqué avec les notions simplistes de conflits de blocs ni de nations dominantes. Le capital décadent, comme tout vieillard atteint d'Alzheimer ou de Parkinson, singe même ses allures de jeunesse. La « main invisible » du marché semble s'être ressourcée dans la « main invisible » du militarisme et de la finance, au point que les plus éminents spécialistes en perdent même parfois leur latin, laissant aux journalistes les interprétations les plus fantaisistes voire les plus simplistes.

L'Allemagne actuelle symbolise assez bien le comportement d' « enfant terrible » de chaque capital national.Avec un solide acquis. La réunification des deux Allemagne a longtemps été l'objet de commentaires superficiels sur un soit disant « ratage », une persistance des inégalités entre wessies et ossies, une population à l'Est défavorisée, considérée comme province adipeuse2.
En réalité, comme les meilleurs observateurs, et les plus craintifs face à une résurgence de la grande Allemagne prédatrice, l'avaient présumé, cette réunification a été le garant de son renforcement et non les quelques années de libéralisme effréné du chancelier Schroder. Réunifiant l'expérience des managers de l'Ouest et des flics apparatchiks de l'Est, la bourgeoisie allemande n'a pas cessé de jouer un rôle déterminant dans la diplomatie internationale, combattant en sous-main le protecteur US ou s'alliant avec lui selon les intérêts du moment. Il n'y eu pas besoin d'une armée allemande, même « humanitaire » pour faire éclater la Yougoslavie3. La force traditionnelle de l'économie allemande en Europe centrale fît éclore suffisamment de clans nationalistes régionaux pour que les politiciens de l'ancien régime stalinien constituent eux-mêmes leurs groupes de mercenaires au nom de la liberté occidentale, d'une histoire héréditaire romantique ou de critères religieux (les industries d'armement des principaux pays vendeurs d'armes y firent de juteux bénéfices).
A plan du nivellement, de la négation et de l'atomisation du prolétariat, le capitalisme allemand fût exemplaire pour les grandes puissances, même si la bourgeoisie américaine avait déjà mis en pratique la stratégie d'immigration à flux continue qui maintient l'arriération économique et industrielle des pays secondaires ou ex-colonies, et empêche toute unification du prolétariat4.

Au temps du bloc de l'Est, la RDA forma aux techniques industrielles une masse très importante des travailleurs de l'Est, en Pologne, en Hongrie, etc.Cette manne est donc reversée à l'Allemagne actuelle, qui a intégré deux millions de travailleurs turcs. L'ouverture des frontières européennes profita donc pleinement à l'Allemagne réunifiée. Là est le résultat de son « insolence économique », en plus de l'absence de charges militaires supportées par d'autres, France, Angleterre, Italie, Belgique, Hollande, Espagne. Le triomphe économique de l'Allemagne opaque se résume aux 500 euros par mois avec lesquels elle rétribue ses salariés multi-ethniques !

La bourgeoisie allemande est aussi divisée entre fractions politiques liées à des groupes pétroliers et gaziers, comme l'américaine, mais aussi désormais les sunnites des pays sous-développés.
Pour récupérer l'Arabie Saoudite le combat de l'ombre fait rage. Il n'y a plus la simple opposition contre les chiites (l'Iran) mais entre sunnites : Qatar et Turquie face à l'Arabie Saoudite. Le terrorisme individuel et les bandes armées inorganisées servent d'écran de fumée à la réalité des conflits d'intérêt. L'immense massacre en Syrie résume toutes les contradictions et rivalités. Les menées américaines ne peuvent même plus s'allier au boucher Assad ni compter rallier les dits « insurgés » maqués par telle ou telle fraction sunnite ou chiite. Ce n'est plus même une libanisation ou une balkanisation mais une chaotisation (kaotic est d'ailleurs le nom d'un site qui poste librement les pires meurtres des bandes armées), si je puis me permettre ce néologisme.

Que cherche la bourgeoisie allemande ? Elle cherche à reconstituer L'Empire allemand comme au temps de la Duplice où l’Empire allemand et l'Autriche-Hongrie, les "Empires centraux", constituèrent une alliance dominant l'Europe mais avec une prétention plus étendue de régenter l'Europe du Danemark à la Grèce.

La Chine, affamée aussi du sang noir pétrolier, place également ses pions, en particulier en Afrique mais doit compter avec le fournisseur russe. La Russie tangue entre ses intérêts de proximité avec la bourgeoisie allemande et avec les groupes pétroliers et financiers américains (la convivialité avec le trust Exxon dont j'ai parlé dans l'article précédent). Les oligarques russes sont tous d'anciens apparatchiks staliniens qui ont profité de l'éclatement des blocs pour se remplir les poches. La guerre en Ukraine est directement téléguidée par la bourgeoisie allemande. Effroyable constat face aux mille menteurs de la classe politique bourgeoisie de droite et au MEDEF en France qui la présentent comme un admirable exemple de « réussite économique », alors que l'Allemagne (sans potentiel militaire)fait partie des plus sordides manipulateurs impérialistes à faire rougir Hitler pour sa grossièreté et sa goujaterie meurtrière.

UNE DESORIENTATION PERMANENTE POUR LE PROLETARIAT

Dans ces conditions, terrorisé par tant de guerres, de crimes quotidiens rendus inexplicables par ce maëlstrom de conflits d'intérêts et de clivages de fractions bourgeoises qui ne sont plus délimités par des intérêts nationaux, le prolétariat est convié à prier pour plus de démocratie, plus de protections militaires, en gros pour choisir la politique de l'autruche à travers des espoirs de travail régional, des indépendances picrocholines et la croyance... en dieu. Car le capitalisme féodal décadent ressort toutes les croyances antiques, toutes les superstitions des lois du hasard, typiques du règne sans partage du féodalisme5.

Mais, même apeuré et fractionné, le prolétariat reste la classe dangereuse pour une raison qui éclate au grand jour en cette honteuse année commémorative des millions de victimes du capital : le souvenir de la boucherie de 1914. Ce n'est plus depuis 1945 que la guerre mondiale est impossible, mais depuis 1914. En 1940 les populations prolétaires ont fui en masse les possibles nouvelles tranchées, depuis la Hollande, la Belgique et le nord de la France. Je veux dire une guerre mondiale impliquant la mobilisation du prolétariat au service du nationalisme patriotique. La deuxième boucherie ne fût pas une guerre de positions, comme on pouvait la concevoir au XIXe siècle, mais une guerre où les idéologies mondialistes des camps en présence recoupaient des aires géographiques et non plus des nations, où la technique industrielle du meurtre de masse atteignit une dimension irrationnelle et inimaginable de destruction de l'espèce humaine. On n'assista pas à la constitution d'armées nationales de volontaires pour la défense de la patrie mais à des enrôlements ponctuels de troupes non basées sur la fameuse « levée en masse », mais à des recrutements d'office pour la vague « démocratie », pour la fumeuse idéologie de la « race ».
Ou d'un communisme de caserne très patriotique et inter-ethnique (les films de propagande staliniens exaltaient comme ceux des nazis l'appartenance régionale ou ethniques des combattants. La guerre d'Espagne avait été le prolégomène à cette fumisterie.Or le prolétariat n'est plus mobilisable en tant que tel, on seulement parce qu'il est nié ou considéré comme faribole ringarde mais parce qu'il reste marqué, même chez les plus ignorants, par le souvenir de la fameuse « der des der », parce que « mourir pour la patrie » a été enterré en Amérique du Sud et au Vietnam dans les années 1970. Et aussi parce que la vilenie des requins impérialistes a atteint des sommets de criminalité qui ne peut que favoriser tôt ou tard l'insurrection généralisée, plus vite et plus loin qu'en 1917.

Les opposants officiels à la « mondialisation capitaliste » et au « libéralisme sauvage » ne sont plus que les clowns écologistes, les anarchistes péquenots et les élections universellement phagocytées par une noria d'arrivistes bobos, où sont absents les prolétaires.La classe ouvrière reste encore veuve d'un véritable parti révolutionnaire mondial. Mais elle peut se remarier avec la perspective révolutionnaire communiste.

Partout la classe ouvrière est censée vivre du contentement d'une misère à géométrie variable jusqu'à la misère absolue et à la mort pour les nouveaux boat-people. Et ce qui accable cette classe martyrisée, sodomisée, assassinée, c'est son exclusion de la vie civique, du monde du savoir et de la culture. Démunie de tout ou goinfrée de besoins artificiels qui restreignent tout horizon intellectuel et social, la classe ouvrière se retrouve réduite en esclavage. A la fin du XIXe siècle, le Boston Post écrivait : « le travailleur est supposé demeurer patiemment à sa tâche, en raison de la ferme conviction qu'il ne pourra jamais dépasser son cercle ni changer les lois qui le gouvernent »6.

Les classes bourgeoises, en France comme en Allemagne et ailleurs, détiennent le pouvoir de la parole et du meurtre impuni. Pour combien de temps ?




1Nombre d'autres opérations clandestines de sabotage du système industriel à l'Est furent menées clandestinement par les agents secrets américains, notamment la destruction de la fine fleur de l'industrie en Roumanie avant la pantalonnade de la destitution du couple pervers Ceausescu. L'histoire future après ouverture de certaines archives devrait nous révéler d'éloquentes révélations encore tenues hor de portée de nous les vulgum pecus.
2Ces tendances à prétendre à une division de deux sortes de populations est typique de la « leçon du Mur de Berlin », en prétextant que des provinces ou une région sont un poids pour l'économie de la zone centrale de l'Etat, on maintient une division fictive entre les prolétariats des régions, politique d'ailleurs typiques des « avancées fédéralistes européennes » lesquelles, en niant les nations et en favorisant des pouvoirs autonomes locaux (Catalogne, Ecosse, Italie du Sud, Flamands et Wallons, etc.) sans oublier depuis l'éclatement de la Yougoslavie, l'émergence à l'infini de prétendus droits nationaux régionaux. La France fait exception, non pas que des arguties identitaires ne puissent être utilisés (cf. Bretagne, Jura, pays basque) mais du fait de sa centralisation parisienne cimentée depuis 1789 ; ce qui explique qu'elle ait été classiquement le pays des révolutions universalistes. Le capitalisme moderne s'inspire profondément du retour au féodalisme nécessaire à sa survie.
3La guerre du Kosovo a été parfaitement orchestrée par les services allemands... pour barrer la route à la Méditerranée aux Etats -Unis.
4Par exemple le contrôle de l'immigration est effectué sous la terreur des cartels de la drogue qui ventilent la demande américaine sans que les policiers US soient mis en cause. Idem pour le massacre de milliers d'immigrants fuyant les guerres en Méditerranée, les passeurs et accidents inévitables ne sont nullement contrecarrés par les polices frontalières des pays européens mais exhibés comme un malheur sans fin. Or, comme pour le financement des djihadistes, les puissances policières et militaires des pays dits riches pourraient très rapidement détruire les réseaux mafieux s'il s'agissait de protéger populations démunies et de favoriser le bien être des millions de prolétaires ou crève la faim.
5En se targuant sans fard du mépris typique de la noblesse d'Etat. Un petit con d'énarque récemment promu ministre d'Etat en France a pu qualifier d'illettrés des centaines d'ouvriers en voie d'être licenciés, et son chef de cabinet de chiottes d'Etat se moquer des « sans dents » en privé. Le chaos régnant laisse éclore ce qui était nié jusque là, ainsi Obama a pu dénoncer le fait que la bourgeoisie française paye les rançons des otages, contribuant sans vergogne à renforcer des bandes armées qui ne sont pas forcément ses ennemis dès lors... Mais en même temps la bourgeoisie US via sa girouette démontrant que le sacrifice de ses propres agents ou soldats importe peu pour son arrogance impérialiste, comme elle s'est fichée d'envoyer à la mort 300.000 pioupious américains en Normandie. Post festum impérialiste 60 ans plus tard, il faut considérer que deux puissances se sont enrichies de la guerre mondiale, qui les avait opposée, et de la reconstruction, les Etats-Unis et l'Allemagne !
6Citation extraite du livre de Christopher Lasch : « La révolte des élites et la trahison de la démocratie ».

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