PAGES PROLETARIENNES

mercredi 26 mai 2010

POURQUOI VOUS ALLEZ FAIRE GREVE POUR RIEN DEMAIN ?


De l'augmentation? Vous n'y pensez pas,
vous qui n'avez plus que dix ans à
attendre pour la médaille du travail
à ruban tricolore!



Curieux titre de Libération aujourd’hui sur la question de la retraite : « Les ouvriers paieront l’addition » !? Que vient faire cette notion d’ouvriers maintenant qu’il est convenu pour tout journaliste ou sociologue que l’ouvrier n’existe plus ou qu’en tout cas les « manuels » ne sont plus que quantité négligeable parmi les prolétaires ? En général tous les prolétaires « exécutants » paient l’addition en termes de profits pour les patrons privés et d’Etat, et en conséquences dommageables pour leur santé physique et mentale. S’agit-il alors d’en appeler à soutenir la grève inter-professionnelle programmée pour demain ? Cette pauvre journée d'action ultime, montée de bric et de broc par les syndicats CGT, CFDT, CFTC, FSU, Unsa et Solidaires, comme dernière agitation pour la galerie avant l'annonce de la réforme, prévue autour du 20 juin.
Le ministre Woerth aurait « lâché le morceau » : la retraite à 60 ans c’est fini. Le pauvre naze syndical Bernard Thibault ne fait pas le fier non plus : « c’est évident que nous jouons une grosse partie jeudi » (demain ndlr) ; il sait qu’il peut rassurer Sarkozy sur le peu de danger de lendemain de cette journée pépère, dans leur machiavélique division du travail, les syndicats, main dans la main avec le gouvernement, peuvent se reposer sur la disparité des régimes de retraite ; par exemple les régimes spéciaux SNCF ne seront attaqués que plus tard…
De quoi est-il question avec une telle journée de grève inter-professionnelle ? De rien.
La retraite est présentée comme une affaire « française » selon le barométrie nationale, 57% des Français restent attachés à la retraite à 60 ans, contre 41% qui estiment qu'il est "logique" que l'âge de départ à la retraite soit repoussé au-delà de 60 ans. Il n’est nullement question de mettre dans la balance les douteux sauvetages des banques et l’enfoncement du capitalisme dans la crise. Même les gauchistes et les syndicats, en hurlant « on ne va pas payer la crise du capitalisme » lancent un slogan imbécile, aussi vague et inopérant que la lutte pour le « maintien de la retraite à 60 ans ». Et le torchon réac « 20 minutes » de demander aux gens s’ils vont manifester demain ? (s’ils sont assez cons pour aller manifester demain derrière ceux qui bernent l’ensemble des prolétaires avec le vent de leurs discours creux)
Qui est vraiment concerné? Tout le monde est sensé être visé par l’allongement de l’âge légal du départ à la retraite. Surtout ceux qui ont commencé à travailler tôt, entre 16 et 20 ans. Ils seraient environ 100.000 chaque année (soit environ 15% des départs en retraite). Plus on avance dans les années, plus l’âge de début de travail est devenu tardif (22,5 ans aujourd’hui). Les prolétaires femmes vont connaître un allongement de la durée de cotisation, mais cela repose sur un ajustement, il faut faire la différence entre la bourgeoise qui n’a jamais travaillé et s’est fait jeter à la rue à 50 ans et les mères de famille ouvrière qui sont restées faire l’élevage à la maison. L’essentiel des cadres, quel que soit l’âge de leur départ, même tardif, touchent de bonnes retraites. Les fonctionnaires ne sont pas vraiment concernés par la réformette actuelle parce qu’en général, ils partent déjà plus tard que l’âge légal en retraite ou bénéficient de régimes spéciaux avant 60 ans. La réforme est évidemment injuste pour les prolétaires qui ont commencé plus tôt mais nuance que tous les «actifs ayant commencé leur carrière plus tôt que les autres» leur donne aussi le droit de «partir à la retraite plus tôt que les autres» (vers 57 ans par exemple si l’on a commencé à travailler à 16 ans). Le problème n’est pas tant aigu pour une majorité de travailleurs déjà vieillis mais pour toutes ces générations qui arrivent par vagues successives et connaissent des périodes sans emploi de plus ou moins longue durée, qui font que pour toucher une digne retraite on devrait leur exiger de bosser jusqu’à 80 ans. La gestion des professions «pénibles» est un foutage de gueule remarquable ; arrivent en tête encore les fonctionnaires avec professions dites à risques ou liées à des conditions de pénibilité particulières (policiers, douaniers, surveillants pénitentiaires, personnels soignants des hôpitaux,…) le départ à la retraite leur reste ouvert à 50 ou 55 ans. Mais pas les chauffeurs routiers ni les employés du BTP ! La pénibilité laissée aux lobbies et aux grosses boites publiques. On met en avant la pénibilité. Tout le monde est d’accord: la pénibilité, voilà un critère juste et évident! A ceci près que la reconnaissance de la pénibilité ne dépendra de rien d’objectif mais de la capacité des lobbies à faire admettre qu’un métier est pénible: les agents de conduite, les pilotes d’avion, les mineurs (qui n’existent plus). Quant au dépeceur à la chaîne de poulets chez Doux et au carreleur, ils peuvent toujours essayer de faire valoir la pénibilité de leur métier –parce qu’il n’y aura pas de lobby puissant pour les défendre !
L’appel à la grève de demain est un double foutage de gueule, d’abord parce qu’elle ne sera, comme toujours, qu’une parade carnavalesque syndicale, ensuite parce que les professions les plus pénibles n’y seront même pas représentées. Ce sont les « grévistes professionnels » de la petite bourgeoisie syndicale qui mèneront la danse, alors que leur catégorie professionnelle n’est pas concernée pour l’instant par l’attaque du gouvernement ! Les usagers prolétaires seront « touchés » par cette grève inutile selon les désidératas des maffias syndicales:SNCF et RATP ; ce qui fait, heureusement que la grève restera minoritaire, à la fois parce que les travailleurs de ces deux entreprises ne sont pas concernés, et parce qu’ainsi, classiquement grand chef bonze Thibault et ses sbires locaux pourront déplorer « le faible suivi » et que « ce sont toujours les mêmes (cadres) syndicaux qui se sacrifient » (entendez la classe ouvrière est vendue A Marseille, le trafic métro et tramway sera normal, n revanche pour les bus, le trafic devrait être assuré à raison de 60 à 100% selon les lignes. A France Télécom: les bonzes ont appelé à la grève en exigeant du moulin à sornettes étatiques «des politiques publiques en faveur d'une relance économique intégrant la satisfaction des besoins sociaux». Les enseignants: eux aussi sont appelés à la grève. Selon le Snuipp, premier syndicat des instituteurs, près de 40% des enseignants de premier degré seront en grève jeudi. Les enseignants, assez suivistes et électeurs bobos, se feront un plaisir d’emmerder les parents d’élèves, pour aller retrouver leurs copains de fac dans les manifs. Les postiers, qui ne sont pas idiots, devraient s’abstenir assez massivement de se laisser rouler dans la farine d’une réforme Loch Ness. Des sévices douceâtres devraient avoir lieu dans les services publics (entendez : la piétaille hiérarchique syndicale offrira un coup à boire aux copains).
L’ETAT BOURGEOIS NAVIGUE A VUE
Pour la suite de cet article, je repique en partie quelques considérations pertinentes du philosophe Yves Michaud. On nous donne des projections à 2030 ou 2050 de déficits apocalyptiques. C’est aussi intelligent que d’avoir fait des projections de 1910 à 1950 sans savoir qu’il y aurait entre temps deux guerres mondiales, une crise du capitalisme et une épidémie de grippe espagnole… Les projections «toutes choses égales d’ailleurs» à 20 ou 40 ans n’ont aucun sens car précisément rien n’est «égal par ailleurs». Et toutes les causalités économiques ne sont pas mises sur la table : qu’est-ce qui est plus grave ? Le problème des retraites ? L’endettement faramineux des Etats bourgeois ? Les sommes astronomiques dissoutes dans les bulles spéculatives ? etc. Et, pourquoi la bourgeoisie intrinsèque ne fait-elle jamais état de ses solutions, parfaitement envisagées, telle une nouvelle guerre mondiale ? Quand ce qui fait chuter les bourses n’est pas seulement la chute du taux de profit mais la menace de guerre de la Corée du Nord, qui se répandrait ensuite comme traînée de poudre au Moyen Orient avec l’Iran face à Israël, etc. Avec la focalisation sur le système des retraites, on nous focalise sur la situation du pays, d’un pays, comme si la situation pouvait être soluble dans le pays concerné ; vous remarquerez qu’à ce moment-là plus personne ne parle d’Europe ou d’aide européenne comme pour la Grèce. Pourquoi ne fait-on pas appel à des « fonds spéciaux » de retraite européenne « par répartition ». Sauf qu’il n’existe déjà pas en France de répartition réelle : « Tout le monde proclame son attachement au principe sacré de répartition: même les riches sont pour. Sauf qu’une répartition réelle supposerait un régime unique de retraite et en fait une fiscalisation complète du système (à condition qu’il n’y ait pas de fraudeurs de principe, pas de fraudeurs tolérés, pas de bouclier fiscal, pas de profession favorisée…). En réalité, nous avons en France un système de répartition à tiroirs avec des régimes très différents: les régimes privés (dont ceux des cadres qui sont en partie des régimes par capitalisation de points), le régime public qui n’est pas réellement provisionné, les régimes parapublics spéciaux dont on nous dit qu’ils ont été supprimés alors que ce n’est pas vrai –qu’on demande aux sénateurs ou aux députés qui bénéficient toujours de retraites en or, ou aux professions dont on a acheté assez chèrement quelques petites concessions. Qui plus est, on peut cumuler les retraites en fonction des évolutions professionnelles d’une carrière ou des cotisations rachetées dans l’un ou l’autre régime. Drôle de répartition qui fait que certains touchent trois retraites comme le président Chirac quand il était à l’Elysée. Et je ne parle pas des retraites chapeaux! ».
Les 60 ans fatidiques sont-ils justifiés? « Le jour de la retraite dans l’équité n’est pas pour demain, car tout le monde a intérêt à défendre ces petits arrangements qui ont graduellement façonné le système », constate enfin Yves Michaud. Mais le philosophe marque des limites intellectuelles de syndicaliste. Et si c’était la retraite qui était désormais injustifiable dans un monde où s’effondre la loi de la valeur et où il y aura de moins en moins de travail pour tous ? Est-ce qu’on appellera encore ce truc « la retraite » dans une société communiste débarrassée du capitalisme, de ses spoliations, de son exploitation, exigeant la participation de tous selon ses capacités et ses moyens ? Derrière le soi-disant effondrement des régimes de retraite agité de manière comminatoire depuis des décennies par les responsables capitalistes, n’est-ce pas plutôt l’effondrement du système bourgeois lui-même qui se profile ?
Bonne grève. Bonne manif. Et vendredi vous faites quoi ?

PS : extrait de l’article de Libé « Les ouvriers paieront l’addition », ils l’ont toujours payé ; Rocard a dit un jour que les ouvriers payent la retraite des cadres :« Selon la Drees (Direction de la recherche), pour la génération née en 1950, l’âge moyen de validation du premier trimestre est proche de 17 ans pour les ouvriers hommes et de près de 20 ans pour les cadres. Si cet écart a tendance à se réduire au fil des générations (1,5 an pour ceux nés en 1970), il est hélas dû aux difficultés croissantes que connaissent les ouvriers pour s’insérer dans le monde du travail (sic !). Par ailleurs, à l’âge de 30 ans (pour la génération 70), les ouvriers hommes valident encore 10 trimestres de plus que les cadres masculins (soit 2,5 ans d’avance). Reculer l’âge de départ revient donc à pénaliser les ouvriers et employés, qui représentent près de 55% de la population active (respectivement 25% et 30%). Cet écart persistant, qui pourrait à nouveau s’aggraver en cas de baisse du chômage, se cumule avec une autre inégalité : l’espérance de vie. A l’âge de 55 ans, les cadres et professions intellectuelles supérieures (hommes) peuvent espérer vivre encore 29,2 ans, contre 25,5 ans pour les ouvriers et 26 ans pour les employés. Une différence de près de quatre ans en faveur des cadres, qui bénéficient en plus d’une meilleure santé une fois à la retraite ».



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2 commentaires:

  1. Connaissez vous la loi Giscard Pompidou et le Traité de Maastrich ?

    Alors que les bourses chutent, que l'Euro est à l agonie, que les plans d'austérités se multiplie à travers l'europe, il serait sage de connaître les vrais raisons de l'augmentation de la dette !

    Le bon sens commun voudrait que la dette soit du à trop de sociale, trop de santé, trop de services publiques, trop de fonctionnaires, trop de retraites. Nos responsables politique se font l'écho d'un tel message et mettent en œuvre des plans sensés répondre aux problèmes de la dette !

    Mais tout ceci est une arnaque : L'arnaque de la dette !

    Jusqu'au 3 janvier 1973, la Banque de France avait le droit d'émettre du crédit à très bas taux d'intérêt afin de financer les besoins de l'état et d'investir dans les projets d'avenir !

    Mais sous prétexte d'inflation, le gouvernent Giscard Pompidou a cru bon empêcher la Banque de France de faire son travail en transférant de fait le pouvoir aux banques privés. Et oui depuis cette époque la France s'endette auprès des marchés financiers avec des taux d'intérêts élevés et c'est obligatoire pour tous les pays membres depuis Maastrich et les traités suivants!

    En claire, ce sont les taux d'intérêts imposés sur la dette qui créer l'augmentation folle des dette publique !

    L'alternative

    Un retour au crédit publique productive, redonner le pouvoir au nation de battre monnaie afin de l'investir non dans les bulles spéculatives ou dans les jeux des casinos financiers mais bien dans l'économie physique au service de la population et du travail humain.

    Nous devons dire Non au chantage de l'empire de la finance de la City de Londre et de Wall Street à New York

    Si tu veux rejoindre la bataille pour changer le système économique rejoins moi sur mon groupe : http://www.facebook.com/group.php?gid=104166076293247&ref=ts

    David CABAS
    david.cabas.over-blog.fr

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  2. "Et si c’était la retraite qui était désormais injustifiable dans un monde où s’effondre la loi de la valeur et où il y aura de moins en moins de travail pour tous ?"

    Au contraire la loi de la valeur me semble s'appliquer plus que jamais (tant que le capitalisme ne sera pas renversé) et c'est bien à cause de ses effets qu'il y a de moins en moins de travail pour tous. Ce n'est pas la loi de la valeur qui s'effondre mais justement la valeur elle même. Non ?

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