PAGES PROLETARIENNES

jeudi 24 décembre 2009


PARIS ROUGE




Par Eric Hazan



« Ici règne actuellement le plus grand calme. Tout est silencieux comme dans une nuit d’hiver enveloppée de neige. Rien qu’un petit bruit mystérieux et monotone, comme des gouttes qui tombent. Ce sont les rentes des capitaux, tombant dans les coffres-forts des capitalistes, et les faisant presque déborder. On entend distinctement la crue continuelle des richesses des riches. De temps en temps, il se mêle à ce sourd clapotement quelque sanglot poussé à voix basse, le sanglot de l’indigence. Parfois aussi résonne un léger cliquetis, comme d’un couteau que l’on aiguise ». HEINE ( 17 septembre 1842)



« Le procureur : Blanqui quelle est votre profession ?


Blanqui : Prolétaire !


Le procureur : Ce n’est pas une profession…


Blanqui : C’est la profession de la majorité de notre peuple qui est privé de droits politiques »


(Janvier 1832)



Je ne connais pas Eric Hazan. Je conchie sa maison d’édition qui ne publie que des âneries d’intellectuels gauchistes et les niaiseries de Coupat, mais j’ai bien aimé le livre de Hazan publié en poche aux éditions du Seuil. Extraits du chapitre « Paris rouge », chapitre fabuleux pour notre histoire du prolétariat universel, fabuleux de concordance avec le même type de mystifications bourgeoises pour diviser la classe ouvrière, avant de traiter ses révoltés et insurgés de « vulgaire racaille ».



« La prédilection de l’émeute des années 1830 pour les quartiers centraux de la rive droite a d’autres raisons que stratégiques. Parmi la population de ces vieilles rues, on trouve des hommes, des femmes, des enfants prêts à se joindre à une insurrection. Ce sont des quartiers d’immigrés, où la proportion de ceux qui vivent en garni est la plus haute de Paris et celle de la population féminine la plus basse. Ils viennent des régions agricoles du Bassin parisien, du Nord, de Lorraine, du Massif central. Ils sont portefaix, manœuvres, porteurs d’eau comme Bourgeat, l’auvergnat généreux, l’ami du professeur Desplein dans ‘La Messe de l’athée’ ; ils sont maçons, souvent originaires de la Creuse comme Martin Nadaud, vivant entassés par dix par chambre rue de la Mortellerie – rue des gâcheurs de Mortier – dans une saleté telle qu’ils ont, dit-on, apporté le choléra à Paris. On dit aussi qu’ils sentent mauvais, qu’ils sont paresseux et voleurs, qu’ils ne parlent même pas français, qu’ils prennent le travail des vrais parisiens en ces temps de crise et de chômage. « Le dimanche, écrit La Bédollière, les porteurs d’eau auvergnats vont à la musette, à la danse auvergnate, jamais au bal français ; car les auvergnats n’adoptent ni les mœurs, ni la langue, ni les plaisirs parisiens. Ils restent isolés comme les hébreux de Babylone » (cf. Les industriels 1842). ‘Le Journal des Débats’ du 10 juillet 1832 regrette « le vacarme effroyable que fit, il y a plusieurs mois, l’opposition à propos d’un mot, celui de « barbares » appliqué par nous à une classe d’hommes que son défaut d’instruction et sa vie précaire tiennent en effet en état d’hostilité dangereux pour la société ». Des mesures s’imposent pour arrêter cette invasion. A la Chambre dans les jours suivants la révolution de 1830, le baron Dupin « demande qu’on emploie de préférence (aux travaux de terrassement) les pères de famille et les ouvriers domiciliés à Paris… Le gouvernement devrait chercher le moyen de faire refluer volontairement dans les départements la classe surabondante des ouvriers qui se trouvent à Paris (…) Ces sauvages qui n’ont rien à perdre ne sont pas les seuls mauvais sujets de ces quartiers. Dans la population sédentaire, chez les artisans, drapiers, merciers, orfèvres, batteurs d’or, faïenciers, chez les typographes, « il existe une très grande quantité d’hommes qui se situent entre le maître et l’ouvrier, c'est-à-dire qu’ils tiennent du maître et de l’ouvrier, car ils travaillent pour des maîtres et sont traités par ces mêmes hommes d’ouvriers, et eux à leur tour sont traités de maîtres par les ouvriers qu’ils occupent »[1]. Dans cette population préindustrielle, maîtres et ouvriers se retrouvent souvent sur les barricades, et ils sont rejoints par les commis marchands, prompts à saisir les occasions de dépaver. On les a déjà rencontré en novembre 1827, préparant de mauvaises actions pendant la nuit, « un parapluie à la main, déployé et surmonté d’une chandelle allumée ». A ce ramassis de gens peu recommandables viennent se mêler des enfants errants. Ce n’est pas un hasard si Gavroche est devenu un nom commun… (…) Canler, ancien préfet de police, raconte dans ses mémoires que juste après l’insurrection de juin 1832 (celle, faut-il le rappeler, où meurt Gavroche) « un gamin d’une douzaine d’années, vêtu d’une veste couleur auvergnate, s’était, bon gré, mal gré, faufilé au premier rang. Tout le monde connaît cette race de gamins de Paris, qui, dans nos rassemblements, ont toujours poussé le cri séditieux, dans nos émeutes ont porté le premier pavé de la barricade, et presque toujours ont tiré le premier coup de feu »’(cité par Louis Chevalier). (…) quand les hommes veulent l’envoyer porter une lettre pour l’éloigner de la barricade, sa réplique – « Serviteur, dit l’enfant, je n’ai pas le temps » - est du pur Gavroche. Comme le seront les « pétroleuses » de la Commune, ces gamins sont exécrés par les tenants de l’ordre. Le critique de « La Revue des Deux Mondes » commente un tableau d’Adolphe Leleux intitulé « Le mot de passe », un groupe où figure en position centrale un gosse portant un long fusil : « (le tableau) a certainement des qualités solides, de la vie, du mouvement et de l’harmonie ; mais pour Dieu ! que signifie le choix d’un sujet pareil ? … Le gamin de Paris est un type qui ne devrait tenter aucun artiste. Il est généralement laid, petit, malingre… Dans notre boue immonde, la pauvreté est repoussante, et les haillons sont affreux. Puisque M. Leleux aime les guenilles, je lui conseille de s’en tenir à celles d’Espagne et d‘Orient ».


Hazan ajoute en note une citation intégrale du bourgeois réactionnaire haineux, l’ancien flic Tocqueville qui déplore que la révolution industrielle ait attiré « un peuple de cultivateurs sans ouvrage » car : « … l’ardeur des jouissances matérielles qui, sous l’aiguillon du gouvernement (républicain) excitait de plus en plus cette multitude elle-même, le malaise démocratique de l’envie qui la travaillait sourdement ; les théories économiques et politiques qui commençaient à s’y faire jour et qui tendaient à faire croire que les misères humaines étaient l’œuvre des lois et non de la Providence, et qu’on pouvait supprimer la pauvreté en changeant la société d’assiette ».








[1] Rapport d’Achille Leroux, cité par Rancière.

mardi 22 décembre 2009



POLITESSE DU DESESPOIR


ET CYNISME CAPITALISTE



L’EXPLOITATION MASSIVE ET ODIEUSE DE MILLIONS DE PROLETAIRES MASQUEE SOUS LE MASSACRE SPECIFIQUE DES JUIFS



On les a retrouvés les cinq sagouins et la bannière en fer de cinq mètres « Arbeit macht frei » à l’entrée du camp mémorial d’Auschwitz. Ce ne sont point des néo-nazis a tenu à rassurer la police polonaise auprès des criminels de guerre de l’Etat israëlien, lesquels se sont empressés de faire savoir qu’ils allaient envoyer un plombier ressouder les morceaux brisés de l’étrange sentence nazie.


Un saltimbanque de télévision très « beauf » avait déclaré il y a quelques années que le camp d’Auschwitz était un « parc d’attractions ». Certes si la statue de Mickey avait été dérobée à Eurodisneyland, l’émotion n’eût pas été si intense. Quelles que soient les déterminations des cinq sagouins appréhendés, ce genre d’action n’est aucunement subversive. Je peste moi-même chaque fois qu’un blockaus des plages du Pas de Calais est détruit. Il faut absolument conserver les traces de la boucherie mondiale. Il ne faut pas perdre la mémoire. La conservation d’Auschwitz comme musée des horreurs nazies n’obéit pas cependant à la véritable mémoire de ce qu’a été la grande guerre impérialiste, mais reste un « grand alibi » pour les puissances victorieuses qui se dédouanent en portant au pinacle le massacre des seuls juifs.



Arbeit macht frei ?



La nouvelle focalisation sur cette sentence à l’occasion des frasques de quelques individus, dont on ne sait pas par quoi ou par qui ils ont été manipulés, aurait dû servir à initier une réflexion sur cette sentence, son origine, la raison pour laquelle les hiérarques nazis l’ont fait placer par les déportés eux-mêmes à l’entrée de plusieurs camps de concentration. En général les historiens les plus férus se sont contentés de l’évoquer sans plus. Personne pour analyser une telle ignominie ne s’est manifesté non plus dans les commentaires sur les articles de presse, hormis les habituels clichés ou protestations « antisionistes ». Nous allons donc nous livrer ici à une analyse plus approfondie. « Arbeit macht frei » politesse du désespoir comme on le dit pour l’humour ?


Il semble bien qu’au tout début des années 1930, le trust chimique allemand IG Farben avait fait placer cette inscription à l’entrée de certaines de ses usines. Comme le slogan bourgeois de la république française « liberté, égalité, fraternité » placé au fronton de toutes les mairies, mais aussi souvent, on l’oublie, au fronton des écoles et de certaines vieilles usines, la sentence « le travail rend libre », est bien typique de la mystification bourgeoise. Pourquoi ne pas avoir placé « la prison rend libre », ou « le travail ça gaze », à l’entrée des camps hitlériens ? Parce que cela revient au même. Le travail tue à petit feu en temps de paix. Le travail participe au massacre en temps de guerre. Du XIXe au XXIe siècle, l’hypocrisie de l’exploitation capitaliste ne déroge pas à la même morale du travail sacré, du travail harassant dans les mines au travail forcé dans les camps de guerre, et au travail « kleenex » de nos jours.


Petit retour en arrière. J’ai dit tout le bien que je pensais de l’ouvrage du jeune historien britannique Tristam Hunt[1], et son coup de chapeau à Engels permet de resituer les enjeux de nos deux siècles contemporains :


« « (Engels) n’aurait pas accepté le monde tel qu’il va. Pour peu que nous parvenions à décaper le vernis écaillé du XXe siècle marxiste-léniniste, cette « dérive dictatoriale » qui n’a pas fini d’empoisonner le puits de la justice sociale, pour retrouver l’authentique Engels du XIXe siècle européen, c’est une voix très différente, d’une actualité saisissante, qui se donne à entendre. Depuis son poste d’observation dans l’industrie cotonnière de Manchester, Engels put contempler le capitalisme triomphant à l’œuvre ; comme peu d’autres socialistes, il en connaissait le vrai visage. Et, alors que notre utopie libérale post-1989, faite de libre échange et de démocratie à l’occidentale, vacille sous les coups du dogmatisme religieux et du fondamentalisme de marché – de la confortable collusion du pouvoir politique et du capital économique aux délocalisations d’entreprises en quête d’une main d’œuvre peu qualifiée et bon marché ; de la reconfiguration de la vie privée autour des tentations du marché au repli inexorable de la tradition devant la modernité ; de la porosité congénitale entre colonialisme et capitalisme à l’emprise du complexe militaro-industriel ; e jusqu’aux formes urbaines dictées par les exigences du capital -, l’analyse d’Engels résonne par-delà les siècles. Mais ce qui le propulse un peu plus sur le devant de la scène, c’est la récente débâcle du secteur bancaire et des marchés financiers mondiaux (…) dans ces régions du monde (Brésil, Russie, Inde et Chine) toutes les horreurs de l’industrialisation menée tambour battant – le capitalisme sauvage qui bouleverse les relations sociales, détruit les coutumes et les usages ancestraux, transforme des villages en villes et des ateliers en usines – déferlent avec la même barbarie qu’en Europe au XIXe siècle. (…) La terrible ironie de l’histoire veut que ce type d’exploitation sordide bénéficie du soutien actif du parti communiste chinois. Cela n’a jamais été la conception de la société d’Engels… cet étonnant victorien».



AUSCHWITZ REVISITE



La légende veut que les déportés qui ont réalisé « Arbeit macht frei » réalisé en fer forgé, aient inversé le B de Arbeit par dérision. C’est probable. Seule la dérision peut permettre de survivre comme on a témoigné le grand Primo Levi. Personne n’a rappelé que comme à l’entrée des usines au XIXe siècle il fallait mettre chapeau bas devant le contremaître ou le patron sous l’injonction sordide en fer forgé. Un déporté le rappelle sur le web. Selon Serge Smulevic, « Jamais au grand jamais un déporté [à Auschwitz] n'aurait osé franchir le portail de sortie (ou d'entrée) d'un camp avec un bonnet pareil sur la tête. Il se serait pris 25 coups de nerf de boeuf avec facilité. »


Auschwitz-Birkenau ou plus simplement Auschwitz (allemand : Konzentrationslager Auschwitz : Camp de Concentration d'Auschwitz) est le plus grand camp de concentration et d'extermination du Troisième Reich. Il se situe dans la ville d'Oświęcim (Auschwitz en allemand), à 70 kilomètres à l'ouest de Cracovie, territoire alors en Allemagne (en Regierungsbezirkes Kattowitz en Provinz Oberschlesien) après annexion par le Reich (en voïvodie de Petite-Pologne au XXIe siècle). Sur le web on trouve la vérité de l’histoire qui confond les mystifications sur le seul but présumé de la bourgeoisie allemande derrière Hitler, le massacre des juifs. Les juifs ont été massacrés surtout en tant que prolétaires, voilà ce que jamais on ne voit affirmé. On trouve des résumés succincts certes comme le suivant :


« Ce camp de concentration, dirigé par les SS, est créé en mai 1940 et libéré par l'Armée rouge le 27 janvier 1945. En cinq années, plus de 1,1 million d'hommes, de femmes et d'enfants, meurent à Auschwitz, dont 900 000 immédiatement à leur sortie des trains qui les y amenaient. 90 % de ces personnes étaient juives. Ces victimes de la solution finale sont tuées dans les chambres à gaz ou parfois avec des armes à feu, mais meurent aussi de maladies, de malnutrition, de mauvais traitements ou d'expériences médicales. En raison de sa taille, Auschwitz est considéré comme le symbole des meurtres en masse commis par les nazis, et plus particulièrement celui du génocide des Juifs dans lequel près de six millions d'entre eux sont assassinés (…)Monument historique et culturel majeur qui participe au « devoir de mémoire », Auschwitz est depuis 1979 inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO». Il ne faut pas se contenter de ce résumé écrémé, et je ne rentrerai pas dans les détails des trois camps d’Auschwitz.


UN CAMP DE TRAVAIL AU DEBUT :


« En 1941, IG Farben décide la construction d’une usine de production de « Buna » (caoutchouc synthétique) et d’essence synthétique non loin d’Oswiecim (à 8 km d’Auschwitz I). La population polonaise des villages environnants, particulièrement Monowitz est déplacée, et pour la construction de l’usine, les SS du Stammlager d’Auschwitz « louent » les détenus à l’entreprise et assurent la surveillance du chantier. Des milliers de détenus (10 000 en 1944, de tous les pays et majoritairement juifs) « logent » directement à Buna dans un camp bâti spécialement pour eux, Auschwitz III « Monowitz ». Plus de 50% des détenus meurent des suites du travail harassant, des conditions de vie et des mauvais traitements subits. Les malades et blessés au travail sont envoyés à Birkenau dans les chambres à gaz. En novembre 1943, Buna devient indépendante et prend le nom de KZ Auschwitz III, et reçoit des détenus d’autres camps pour être employés dans les diverses entreprises du secteur. Du KZ Monowitz dépendent environ 40 camps extérieurs, groupant en tout 25 000 détenus. L'évolution de la population concentrationnaire suit celle du camp : à part les quelques milliers de techniciens, les « travailleurs libres » allemands employés à la Buna, ou les « travailleurs volontaires » étrangers, et même les prisonniers de guerre anglais, dont le sort fut nettement différent, les conditions de vie et de travail sont effrayantes, comme dans tous les camps de concentration du Reich. Les premiers Häftlinge sont des Polonais considérés comme dangereux pour la sécurité du Reich, suivis de prisonniers de guerre soviétiques, puis de détenus politiques de nationalités diverses condamnés au camp de concentration. Les Polonais constituent le groupe le plus nombreux devant les Ukrainiens et les Tchèques, jusqu'à l'été 1942 où convergent sur Birkenau les convois de Juifs de toutes nationalités : Monowitz alimente alors ses usines de la main d’œuvre juive sélectionnée sur le sinistre « Judenrampe »…


Un ancien détenu relate les conditions de travail dans les usines à Monowitz : « Le trajet du camp au lieu de travail était de 4 à 6km. De plus, il fallait rester debout durant une à deux heures pendant les appels du matin et du soir. Il est clair qu’on ne pouvait supporter ce régime pendant plus de trois à quatre mois ; au bout de cette période, les hommes tombaient d’inanition et d’épuisement. (...) Chaque jour on ramenait du chantier des morts ou des agonisants qui s’éteignaient peu de temps après ». La rentabilité économique est au demeurant médiocre, si on en juge du moins par le bilan de l'usine Buna qui ne put produire le moindre mètre cube de caoutchouc synthétique avant d'être bombardée en août 1944. Les 18 et 26 décembre 1944, les alliés bombardent à nouveau Monowitz. Les 19 et 20 janvier, 58.000 prisonniers venant principalement de Monowitz et des kommandos environnants sont évacués à pied vers les camps du Reich. Des milliers vont mourir en chemin. Les malades et faibles restent au camp. C’est là qu’ils sont libérés le 27 janvier par l’armée Rouge.


LA GUERRE TRANSFORME LES DETENUS EN TRAVAILLEURS FORCES



On découvre les directives très patronales suivantes :



« l. La guerre a apporté des changements structuraux visibles dans les camps de concentration, et a radicalement modifié leurs tâches, en ce qui concerne l'utilisation des détenus. La détention pour les seuls motifs de sécurité, éducatifs ou préventifs, ne se trouve plus au premier plan. Le centre de gravité s'est déplacé vers le côté économique. La mobilisation de toute main-d'œuvre des détenus pour des tâches militaires (augmentation de la production de guerre), et pour la reconstruction ultérieure en temps de paix, passe de plus en plus au premier plan.


2. De cette constatation découlent les mesures nécessaires pour faire abandonner aux camps de concentration leur ancienne forme unilatéralement politique, et pour leur donner une organisation conforme à leurs tâches économiques.


3. C'est pourquoi j'ai réuni les 23 et 24 avril 1942 tous les inspecteurs et commandants des camps de concentration, et leur ai personnellement fait connaître la nouvelle évolution. Les points essentiels, dont l'application s'impose en premier lieu, afin que l'exécution des travaux pour l'industrie d'armement ne souffre pas de retard, ont été résumés par moi dans le règlement ci-joint ... »


« 4. Le commandant du camp est seul responsable de la main-d'œuvre. Cette exploitation doit être épuisante dans le vrai sens du mot (muss im wahren Sinn desWortes erschöpfend sein), afin que le travail puisse atteindre le plus grand rendement.


5. La durée du travail est illimitée. Cette durée dépend de la structure et de la nature du travail; elle est fixée par le commandant seul.


6. Toutes les circonstances qui peuvent limiter la durée du travail (repas, appels, etc.) sont donc à réduire à un strict minimum. Les longues marches et les pauses pour les repas de midi sont interdites... »



LES SS ONT ADOPTE LA MENTALITE DES PATRONS PRIMAIRES



« Loin d'être protégés parce qu'ils travaillaient pour Buna, les détenus mouraient à la tâche. Même pendant la phase de construction, les contremaîtres d'IG-Farben adoptèrent le « rythme de travail » S.S. — par exemple transporter le ciment au pas de course. Un jour de 1944, un groupe important de nouveaux détenus fut accueilli par un discours où on leur dit qu'ils venaient d'arriver au camp de concentration de l'IG-Farbenindustrie. Ils n'étaient pas là pour vivre, mais pour « périr dans le béton ». Ce discours de bienvenue faisait référence, selon un survivant, à une pratique d'IG-Farben, qui consistait à jeter les cadavres des détenus dans des tranchées creusées pour les câbles. Comme ceux des anciens enfants d'Israël, ces cadavres étaient ensuite recouverts par le ciment qu'on déversait sur eux. Une anecdote montre à quel point même les directeurs d'IG-Farben avaient assimilé la mentalité de la SS. Un jour, deux détenus de Buna, le docteur Raymond van den Straaten et le docteur Fritz Löhner-Beda, accomplissaient leur tâche, lorsque vint à passer un groupe de dignitaires d'IG-Farben en visite à l'usine. Un des directeurs désigna d'un geste le docteur Löhner-Beda et dit à son compagnon SS : « Ce cochon de Juif pourrait travailler un peu plus vite (Diese Judensau konnte auch rascher arbeiten). » Un autre directeur entendit cette remarque : « S'ils sont incapables de travailler, expédiez-les à la chambre à gaz (Wenn die nicht mehr arbeiten konnen, sollen sie in der Gaskammer verrecken) ! » L'inspection finie, le docteur Löhner-Beda fut extrait de l'équipe de travail, battu et bourré de coups de pied jusqu'au moment où, mourant, il fut abandonné à un de ses camarades pour périr à IG-Auschwitz. Environ 35000 détenus passèrent par Buna ; 25000 au moins moururent ».(Raul Hilberg, La destruction des Juifs d'Europe, Fayard, 1988, citant des dépositions de déportés).



L’USINE SOUTERRAINE DE DORA



« Le camp est d'abord une usine souterraine qui devait permettre aux nazis de préserver leurs fabrications d'armes secrètes. Plus précisément, l'organisation de Dora est décidée après que les avions de la R.A.F. aient détruit la base de Peenemünde où se construisaient les V1. Les nazis choisissent la colline de Kohnstein, située entre les petites villes d'Ellrich et de Nordhausen, parce des galeries y étaient déjà creusées. La main d'oeuvre utilisée sera concentrationnaire. Les premiers déportés y arrivent le 25 août 1943. L'usine se présente comme un grand tunnel qui serpente sous la colline ».



« Les cent premiers déportés débarquèrent à Dora le 23 août 1943, lendemain de la réunion entre Hitler, Himmler et Speer. A partir de cette date, sans arrêt, les convois venus de Buchenwald déversèrent leur cargaison humaine, avant que d'autres camps — en fonction des replis des troupes allemandes — n'y ajoutent les leurs. Il n'y avait pas d'installation dans le premier tunnel déjà creusé, sinon, alentour, quelques tentes et une guérite de bois pour la garde SS. Les galériens des fusées travaillaient sans cesse au péril de leur vie (sans compter le sadisme des SS et des Kapos). Ce tunnel, au début, ils le perçaient, l'agrandissaient, l'aménageaient, presque sans outils, avec leurs mains. Les transports de pierre et de machines étaient faits dans des conditions épouvantables. Le poids des machines était tel que ces hommes, à bout de force, d'énergie, ces squelettes ambulants, mouraient souvent écrasés sous leurs charges. La poussière ammoniacale brûlait les poumons. La nourriture ne suffisait pas à permettre la vie organique la plus végétative. Les déportés trimaient dix-huit heures par jour (douze heures de travail, six heures de formalités et de contrôles). Ils dormaient dans le tunnel. On creusa des alvéoles : 1024 prisonniers affalés dans ces alvéoles étages sur quatre hauteurs et sur une longueur de cent vingt mètres. Les déportés ne voyaient le jour qu'une fois par semaine à l'occasion de l'appel du dimanche. Les alvéoles étaient continuellement occupés, l'équipe de jour chassant l'équipe de nuit et vice versa. Des ampoules électriques, très faibles, éclairaient des images de cauchemar. Il n'y avait pas d'eau potable. On se jetait où l'on pouvait trouver de l'eau, et où, par exemple, goutte à goutte, se rassemblaient les condensations. On lapait liquide et boue dès qu'un SS tournait le dos, car il était interdit de boire l'eau non potable Dans le tunnel, froid et humidité étaient intenses. L'eau qui suintait des parois provoquait une moiteur écœurante et permanente. Transis, nous avions l'impression que nos corps décharnés moisissaient vivants. Des prisonniers devinrent fous, d'autres eurent les nerfs saccagés quand l'installation progressa : le vacarme inouï qui régnait fut une des causes de ces dérèglements — bruit des machines, bruit des marteaux-piqueurs, de la cloche de la locomotive, explosions continuelles, le tout résonnant et répercuté en des échos sans fin par le monde clos du tunnel. Pas de chauffage, pas de ventilation, pas le moindre bac pour se laver: la mort pesait sur nous par le froid, des sensations d'asphyxie, une pourriture qui nous imprégnait. Quant aux chiottes, ils étaient faits de fûts coupés par le haut sur lesquels une planche était installée. Ils étaient placés à chaque sortie des rangées d'alvéoles où nous couchions. Souvent, quand des SS apercevaient un déporté assis sur la planche, ils le fixaient, ricanaient, s'approchaient et, brusquement, le précipitaient dans le fût. Alors, c'était des déchaînements de joie. La farce était trop drôle. Irrésistible ! Jamais ces messieurs n'avaient tant ri. D'autant que tous les déportés souffraient de dysenterie... Alors, recouvert de merde, partout, du crâne aux pieds, sans mot dire, le pauvre type partait, plus désespéré que jamais ; il partait rejoindre son alvéole, sa file de bagnards ; il allait empester ses copains, se vautrer dans la poussière pour se nettoyer, car il n'avait aucun moyen de se laver. La nation la plus propre du monde, cette Allemagne exemplaire pour les soins corporels, l'hygiène, n'avait rien prévu pour ses régiments d'esclaves. Pourtant, dit-on encore, le bétail est soigné, là-bas, dans des fermes qui sont considérées modèles, exemplaires, pour les culs-terreux du monde entier!... Mais il est vrai qu'un déporté était moins qu'une vache, un cochon, une poule, le ver que mange cette poule...


C'est à Dora que les déportés commencèrent à comprendre le silence des anciens de Buchenwald, les regards de compassion adressés à ceux qui partaient. Ils savaient, les anciens, qu'on ne revenait que mort de Dora. Et l'on revenait mort pour être engouffré dans un four crématoire. Car au début il n'y avait pas de Krematorium à Dora. Par camions, on transportait les cadavres — certains n'étaient pas encore complètement des cadavres — à Buchenwald. Il y avait des Kommandos pour cette tâche durant laquelle on empilait, entassait des choses qui avaient été des hommes, sous les ordres de SS qui manipulaient le Gummi (câble électrique recouvert de caoutchouc), afin que le travail soit vite fait. (Dans n'importe quel domaine, le travail doit être vite fait. C'est une règle dans les pays qui ont décidé d'employer une main-d'œuvre d'esclaves. Que les déportés meurent de mauvais traitements et d'épuisement dans les premiers mois de leur détention : nulle importance. D'autres sont là pour les remplacer.) Les déportés de notre convoi comprenaient maintenant ce que l'officier SS avait voulu dire quand il nous avait déclaré, un matin, sur la place d'appel : « Personne ne s'évade d'ici, sauf ceux qui partent par la cheminée... » Les SS frappaient les détenus. Il fallait tout sacrifier au rendement. Le sort du IIIe Reich en dépendait. Une arme secrète, d'une efficacité sans précédent dans l'histoire de l'humanité, allait permettre de pulvériser l'ennemi, d'abolir sa résistance et de faire renaître le temps des victoires éclairs. Des victoires définitives... Ils obéissaient, les SS. Ils faisaient du zèle, se surpassaient dans la barbarie, dans l'art de persécuter. Le nombre de victimes ? Quelle importance! Il fallait voir comment, le matin, la cohorte de ceux que nous appelions bêtement « les musulmans » se présentait, à la sortie du tunnel, pour demander à passer une visite médicale. Dans une odeur épouvantable, une putréfaction qui indiquait le processus de désagrégation, ces spectres espéraient un secours qui ne viendrait pas. Ils crevaient là, de misère physiologique, n'ayant même plus la force d'implorer miséricorde, tandis que les camions du four crématoire de Buchenwald s'apprêtaient à venir les charger. Les cadavres s'empilaient sans relâche, les nombreux arrivants remplaçant ceux qui mouraient avant d'y laisser leur vie à leur tour. Ce n'est qu'en mars 1944 que les baraquements furent terminés. A Dora, le travail était toujours au-delà du concevable, mais les réprouvés pouvaient au moins déserter le tunnel durant les six heures de repos qui leur étaient accordées. Par contre, à l'autre bout du tunnel, à Ellrich, où les travaux étaient moins avancés parce que commencés plus tard, les déportés se trouvaient dans les mêmes conditions que leurs camarades des premiers mois à Dora


Vinrent, en janvier 1945, de nouveaux officiers et soldats SS qui avaient été évacués du camp d'Auschwitz. Les assassins n'interrompirent pas leurs besognes. Des juifs survivants arrivèrent aussi d'Auschwitz, mais dès septembre 1944. Après quelques jours de travail au tunnel, l'un d'entre eux me dit cette phrase que j'entends encore distinctement à mes oreilles : « Comparé à Dora, Auschwitz, c'était un chouette camp ! ». [ Mon camarade se référait — évidemment — aux conditions de travail. Il n'oubliait pas qu'Auschwitz était, lui, un camp d'extermination où périrent des millions de juifs.] C'est que les conditions de vie étaient redevenues ce qu'elles étaient au début. Devant l'avance des troupes russes, la montée vers l'Allemagne des Alliés, le quartier général du Führer voulait hâter encore plus travaux et recherches afin que l'arme absolue change au tout dernier moment le sort de la guerre ! Deux tunnels longs de 1 800 mètres, larges de 12,50 mètres, hauts de 8,50 mètres; quarante-six tunnels parallèles longs de 190 mètres, dont certains étaient creusés plus profond afin d'installer la fabrication des V2, mais qui, dans l'ensemble, avaient 30 mètres de hauteur et étaient employés à tester et assembler les immenses V2 pesant plus de 13 tonnes et longs de 14 mètres ; installation de voies ferrées qui relieraient les deux tunnels tandis que les chemins de fer rejoignaient, à l'extérieur, les voies ferrées des communications normales ; stockages des bombes volantes VI et des rockets V2 dans la plupart des tunnels parallèles, à l'exception de la section Nord utilisée par la société Junkers pour la fabrication des moteurs d'avion ; construction à partir d'août 1944 de trois autres tunnels au nord-est et à l'ouest de Kohnstein et dans 1e Himmeisberg, près de Woffleben, parce que les Allemands exigeaient encore plus d'espace pour fabriquer de l'oxygène liquide, de l'essence synthétique, un nouveau rocket inconnu baptisé «Typhoon» et désigné sous le nom de A3 et A9 (chacun de ces tunnels avait cinq voies parallèles huit ou dix tunnels transversaux complétaient 1a construction) ; et que sais-je encore, moi, petit taupe enfouie dans les entrailles de la terre : voilà ce que des hommes, affamés, martyrisés, dans un état de misère physique et morale incommensurable, bâtirent - 80% - entre le 23 août 1943 et le 11 avril 1945, jour béni où les troupes américaines les libérèrent Entre-temps ils réussirent à saboter des engins de mort nazis, à faire que des V1 et des V2 restent au sol ou explosent en vol, bien avant d'atteindre leur cible Il y eut soixante mille déportés à Dora. Trente mille n'en revinrent pas. »



Le travail ne rend pas libre. Il tue. Ce n’est pas de détruire les calicots honteux du passé que nous avons besoin mais de détruire le capitalisme. C’est le capitalisme qui a été responsable des millions de morts de cette ignoble boucherie impérialiste. Cela il ne faut pas l’oublier, par respect pour les morts, par respect pour l’avenir de l’humanité.



PS: le triangle rouge que vous voyez depuis quelques temps sur ce blog était porté par les prisonniers communistes dans les camps.









[1] « Engels un gentleman révolutionnaire », ed Flammarion 2009, en me contentant de reproduire l’excellente critique d’Emmanuel Jousse le 29 novembre sur ce blog ; certains sites l’ont reproduit comme si j’en avais été l’auteur. Pas grave, je partage, après avoir fini ma lecture les laudations et critiques de Jousse. Hunt écarte toute apologétique, trop répandue sur Marx et Engels dans les milieux maximalistes, comme tout procès en sorcellerie à la façon des anticommunistes intellectuels de gouvernement. Il contient nombre d’écarts de langage certes, et de jugements de valeur (Engels traité de premier adepte de la gauche caviar ou de « voyou industriel ») ; tout cela n’est pas très important car dû à la plume d’un jeune auteur inexpérimenté qui sait si bien mettre en valeur des choses bien plus profondes et nous restituer de façon vivante le grand homme que fût l’ange Engels. Les petits détails personnels détroussés de la vie privée des Marx et Engels nous les rendent plus humains et n’entachent en rien leur apport inestimable à la lutte universelle du prolétariat.

mercredi 16 décembre 2009

Une polémique édifiante dans les locaux du Nouvel Obs

« MISSION IMPOSSIBLE »

L’IMPUISSANCE DES POLITIQUES BOURGEOIS ET LE RETOUR DU DANGER PROLETARIEN

Jean-Paul Besset (Europe Ecologie)[1] face à Pierre Moscovici (PS)[2]

«Vive la sociale» ou «sauvons la planète» ?

Taxe carbone contre pouvoir d'achat, croissance contre décroissance, progressisme contre environnementalisme... Entre écologistes et socialistes, l'échange est vif

Le Nouvel Observateur. - Vous avez politiquement grandi l'un et l'autre dans la religion du progrès servie par une croissance éternelle et une nature inépuisable. Et pourtant, à gauche, René Dumont, Edgar Morin, André Gorz ou... Serge Moscovici tiraient très tôt la sonnette d'alarme sur l'inévitable crise de ce modèle trahi par la finitude des ressources. On y est. Pourquoi un tel retard à l'allumage ?

Jean-Paul Besset. - Ce constat-là vaut tout autant pour la gauche que pour la droite. Ces deux grands courants idéologiques sont issus, pour aller vite, de la même matrice : la révolution industrielle. La grande ligne de clivage, c'était la répartition des fruits de cette croissance. Et c'est l'honneur de la social-démocratie d'avoir su utiliser cette richesse pour développer la justice sociale et forger les bases de l'Etat-providence. Mais quand cette manne de la croissance conçue comme une vis sans fin vient à disparaître sous l'impact de la crise écologique, la social-démocratie, qui fut la grande aventure de ces deux derniers siècles, arrive à bout de souffle.

Pierre Moscovici. - Vous semblez considérer que le clivage gauche-droite n'est plus pertinent. Et moi, je continue de penser qu'il l'est, peut-être plus que jamais face à un président liquidateur comme Nicolas Sarkozy ! La question écologique est certes essentielle, mais je ne crois pas du tout que la question sociale soit éteinte. Je note d'ailleurs que les pères de l'écologie qui étaient évoqués, vous avez cité à juste titre le mien, se situent tous dans le champ culturel de la gauche. Je reconnais bien volontiers que le manque d'appétence des socialistes pour l'approche écologique s'explique par leur passé ouvriériste, productiviste ou étatiste. L'avenir, aujourd'hui, je suis d'accord, c'est la social-écologie. Mais pas le dépassement de la gauche et de la droite.

J.-P Besset. - Ne faites pas comme si l'écologie politique ignorait la question sociale, dont vous seriez propriétaire ! Moi aussi, j'ai la question sociale rivée au coeur, mais elle est désormais indissociable de la question écologique. Les inondations, les sécheresses, les cyclones, les mers qui se dépeuplent, les forêts qui reculent et les déserts qui avancent, ça concerne quand même 60% de la population mondiale. La vraie question sociale contemporaine, massive, intolérable, elle est là !

N. O. - Et sur la croissance, verte ou grise, forte ou faible, vous pouvez trouver un langage commun ?

P. Moscovici.Ce dont je suis sûr, c'est que nous avons toujours besoin de croissance. Prenons l'exemple de la France : il y a 3,7 millions de chômeurs, des déficits publics de 140 milliards d'euros, une dette publique équivalente à 82% du PIB. Je ne sais pas comment nous pouvons résorber ces gouffres financiers, investir dans des programmes écologiques lourds et réduire le chômage sans un taux de croissance significatif. Tout le défi est là : il faut à la fois réguler les dégâts considérables dus au réchauffement climatique tout en assurant notre excellence industrielle.

J.-P. Besset. - Je vous dis ça gentiment mais vous rabâchez ! Opposer la bonne croissance et la mauvaise croissance, c'est de l'imposture, et ça évite de poser les questions de fond ! Nous sommes dans un univers fini. On ne pourra assurer la durabilité économique - process industriels économes en énergie, développement des transports collectifs ou isolation thermique, extension du bio, etc. - que si parallèlement on engage des politiques de décroissance. Il faut oser le mot ! Reconnaître l'évidence. Prenons un exemple : l'automobile. Son rôle dans l'économie et l'imaginaire est très puissant. Mais laisser croire qu'on va remplacer chaque voiture polluante par un joli petit véhicule électrique, c'est mentir aux gens.


P. Moscovici. - Vous m'accusez de ne pas innover, mais j'ai l'impression que vous régressez ! J'ai le sentiment d'entendre parler les écologistes fondamentalistes des années 1970. Sur l'automobile, il se trouve que je suis député et président d'une communauté d'agglomération, celle du Pays de Montbéliard, où se trouve la plus grosse usine de France : PSA à Sochaux. J'essaie de faire ce que vous préconisez : généraliser les écoquartiers, les alternatives à la voiture, privilégier les liaisons douces. Et je pense, moi aussi, qu'on ne produira pas demain plus de voitures. Mais ce qu'on fabrique là-bas, ce sont les véhicules des mobilités de demain. Je ne crois donc pas du tout que, pour penser ce nouveau modèle de développement, il faille épouser les thèses de la décroissance ou refuser l'idée que l'industrie soit un substrat essentiel de l'économie et du progrès social ! J'observe d'ailleurs que l'objet de Copenhague n'est pas la croissance ou la décroissance, mais la réduction des gaz à effet de serre. C'est de ça dont il s'agit. Ne jetez pas le bébé avec l'eau du bain !

J.-P. Besset. - Mais enfin, limiter les gaz à effet de serre, c'est-à-dire l'usage des hydrocarbures, du gaz et du charbon, c'est décroître ! Le grand banquet de la nature à partager entre les riches et les pauvres, cet horizon d'illimitation sur lequel on a construit la vision du bonheur, c'est fini. Sur la question de l'étalement urbain, de la production chimique, des flux tendus de marchandises, des consommations énergétiques, vous savez qu'on doit décroître. Quand vous citez vos actions d'élu régional, je dis bravo ! Mais alors, allez au bout : faites-en l'axe d'une stratégie nationale. La transformation écologique de la société, c'est convoquer l'innovation technologique pour aller vers le mieux plutôt que vers le toujours plus. Vers l'être plutôt que vers l'avoir. C'est une question de civilisation.

N. 0. - Evoquons la taxe carbone : les écologistes ont un discours bien rodé mais abstrait sur la préservation à long terme des intérêts des ménages les plus exposés aux crises énergétiques. Quant au PS, il donne l'impression d'être très divisé sur le sujet...

P. Moscovici. - Non, je dirais presque que, pour une fois, le PS est unanime sur le fond : il se prononce pour un prélèvement plus important que celui proposé par le gouvernement, au moins équivalent au montant proposé par la commission Rocard. Avec l'idée que cette contribution doit faire l'objet d'une redistribution en fonction des revenus ou des distances parcourues entre domicile et travail. Telle qu'elle a été votée par la majorité actuelle, nous jugeons la contribution climat-énergie écologiquement insuffisante et socialement injuste.

J.-P. Besset. - Cette idée de contribution climat-énergie est née dans la mouvance écolo, et je vous fais remarquer au passage que c'est une mesure pour faire décroître la consommation d'énergie. Comme l'a été le protocole de Kyoto et comme va l'être, je l'espère, la conférence de Copenhague. Mais vous voyez, Pierre Moscovici, au fond, vous pensez qu'il n'y a que la représentation politique qui ne changera pas, qu'il y aura toujours la même gauche et la même droite. Nous, à Europe Ecologie, nous disons que tous ceux qui pensent que l'écologie prime sur l'économie sont les bienvenus.

P. Moscovici. - En vous écoutant, j'entends une forme de prophétisme marquée par le refus du progrès. Eh bien, je vous dis que ce n'était pas là une inspiration féconde pour le socialisme d'hier et que ce ne l'est pas davantage pour celui de demain. Moi, j'assume que le socialisme démocratique soit un réformisme. C'est d'ailleurs le même sens du compromis qui permettra de trouver, je l'espère, une solution collective à Copenhague sur le climat. Pour autant, je n'ai pas renoncé à l'idée que le progrès soit une idée noble. Je ne considère pas ringards les ouvriers qui dans ma circonscription ne se préoccupent pas seulement de ce qui arrivera en 2100, mais d'abord de leur pouvoir d'achat et de leur emploi ! Il est exact que nous allons arriver au pic de la production pétrolière et que nous devons donc limiter la consommation des énergies fossiles. Mais ça ne veut pas dire que l'avenir soit voué à la récession et au chômage de masse. Pourquoi, au nom de l'écologie, ignorer les règles de l'économie ? Dernière remarque : je ne pense pas que vous représentiez la position de tous les éco- los français. Socialistes et Verts dirigent ensemble des exécutifs dans les communes ou les régions.

J.-P. Besset. - Deux réponses. D'abord, les taux de croissance plus ou moins consolidés ces dernières années n'ont pas empêché la progression du chômage et de la précarité. Le PIB est un indicateur qui nous a mis dans le mur. Nous proposons de créer, nous, de nouveaux emplois en reconvertissant l'économie. Ensuite, sur le plan politique, oui, Europe Ecologie a pour ambition de sortir du jeu traditionnel. L'écologie n'est plus une force d'appoint mais une proposition centrale. Ce qui compte, ce n'est pas de construire des majorités par rapport aux oripeaux du passé, mais en fonction d'un projet. Pour les régionales par exemple, l'enjeu, c'est comment faire 26 écorégions.

P. Moscovici. - Entre nous il y a moins de différences que vous ne le dites. Je ne suis pas pour un productivisme échevelé et, je le répète, la question écologique est centrale. Mais attention, les écologistes ne se situent pas dans le ciel des idées. Et s'ils le croyaient, ce serait une extraordinaire régression ! Nous pouvons et nous devons donc nous rejoindre. C'était possible hier, ça doit l'être demain.

ET L’AVIS DU CONSULTé DE SERVICE

Le complice des va-t-en guerre, Cohn- Bendit qui est le consultant chouchou des médias est « consulté » sur ce débat troublant , et confirme que les politiciens écolos sont bien méprisables et complètement dépassé par la dangereuse accélération de l’histoire qui repose brutalement la confrontation, non mythique, des classes.

« Ces réactions, et même la relative agressivité d'un homme a priori intelligent comme Pierre Moscovici, sont éloquentes. Je suis frappé par l'incapacité du vieux logiciel social-démocrate à comprendre qu'au coeur de la question sociale se trouvent aussi les inégalités écologiques : il y a ceux qui peuvent choisir ou non de prendre leur voiture, d'habiter plutôt ici que là, de manger sainement ou non, d'échapper aux cancers professionnels... Arc-boutés sur la figure mythique du travailleur, les socialistes n'arrivent pas à penser en dehors du productivisme, et n'ont jamais été capables de faire émerger dans leurs rangs de réelles figures écologistes. En fait, le PS a toujours méprisé les écolos et espéré pouvoir nous confiner à la défense des petits oiseaux ».



[1] Jean-Paul Besset :Député européen, proche de Nicolas Hulot, et auteur de «Comment ne plus être progressiste... sans devenir réactionnaire», Fayard.

[2] Pierre Moscovici Député du Doubs, chargé au PS d'un nouveau modèle de développement, et auteur de «Mission impossible ? Comment la gauche peut battre Sarkozy en 2012», Le Cherche Midi.

mardi 15 décembre 2009

CONSIDERATIONS DEPLORABLES SUR LA NATURE DU CAPITALISME ET CONFONDANTES EN FAVEUR DE L’UNIVERSALISME ABSTRAIT

La presse européenne de ce 15 décembre semble trouver complètement anormal que l’Europe perde un million d’emplois. Réponse d’un prolétaire sur le site 20 minutes, qui se fiche comme moi des difficultés de la bourgeoisie française et de sa désindustrialisation : « complètement anormal pourquoi?? : nous sommes des milliers de personnes à entrer en retraite depuis deux ans au moins ( papy boom ) ; dans ces conditions le chômage devrait baisser si le patronat jouait le jeu mais les employés et ouvriers entrent comme variables d'ajustement dans la gestion des bénéfices des entreprises redistribués aux actionnaires , pour ces entreprises elles dégraissent le mamouth sans avoir à faire appel aux licenciement massifs. Un ouvrier part en retraite on ne le remplace pas d'une part , d'autre part ces entreprises font appel de plus en plus aux emplois kleenex ( intérimaire ). On prend et on jette sans autre forme de procès, avantages : plus de primes diverses , plus de calculs de congés payés voilà la réalité .De plus la gestion de la crise en France est déficiente on y répond par des saupoudrages de mesurettes , alors qu'il faudrait une relance devenue impossible au regard du taux d'endettement du pays. Résultat : chômage et misère. Je ne pense pas que cela tienne encore longtemps. » (cf. Dragon, 5 heures du mat)

A quoi ressemble la structure du capitalisme français ? S’interroge en même temps le journal bourgeois Le Monde :

« Dans une étude sur la gouvernance des entreprises (MiddleNext, juin 2009), Pierre-Yves Gomez, professeur à l'EM-Lyon et chroniqueur au "Monde économie", indique : « Sur les 2,6 millions d'entreprises françaises, 72 % sont possédées par un seul actionnaire et seules 4 % des sociétés de capitaux ont un capital dilué, au sens où le premier actionnaire ne représente pas plus de 10 % du capital. Huit cents entreprises sont cotées. La part moyenne de leur (capital) flottant est de l'ordre de 20 %. Quelque 85 % des entreprises de taille intermédiaire (250 à 5000 salariés) sont de type patrimonial. Enfin, il existe 27 600 PME non-cotées dont la taille dépasse cinquante salariés ».

Résumé : une ultra-minorité règne sans partage et assoit sa dictature sur toujours plus de privations des masses et une répression sans vergogne.

QUI SEME LE VENT RECOLTE LA TEMPETE

Forcené l’agresseur de Berlusconi, Tartaglia ? Déséquilibré le « pauvre type »? « Suivi pour troubles psychiatriques » ce pauvre prolétaire qui a exprimé sa haine d’un symbole typique du mépris bourgeois? Tout agresseur d’un membre du personnel politique bourgeois est immédiatement criminalisé sans que personne ne connaisse le pourquoi du comment. Il n’y a aucun motif de se réjouir du visage en sang d’un homme, fusse-t-il un ignoble bourgeois libidineux et mafioso. Cependant, hors de tout jugement moral ou humain (type secouriste) la violence primaire est inévitable face à la gouvernance gangstériste des mafias au pouvoir ; on ne devrait pas se contenter sur ce plan de croire à une « spécificité » italienne. Même l’agression du chirurgien d’Hallyday, probablement par des « beaufs » cagoulés, est significative du fait que la médecine bourgeoise n’est plus sacrée. L’Etat bourgeois, partout, génère à la fois l’incompétence et la prévarication, et une violence mille fois plus choquante : en Afghanistan, en Palestine, au Timor Oriental, en Tchétchénie, en Afrique…

La violence « individuelle » - rançon de décennies de culture de l’individualisme - va occuper de plus en plus le terrain « médiatique » sans que le pouvoir, de plus en plus pourri, ne puisse (un) exhiber des mains blanches et (deux) poser au protecteur des citoyens .

UN. Le personnel politique continue, dans tous les pays à se discréditer à la vitesse grand V, signe de fin de règne. Avec le présumé président de la république française, le ridicule de la fonction gouvernementale est apparu indéniable grâce à ses divers valets, cette bande de transfuges arrivistes prêts à tuer père et mère pour un poste ministériel, dont la pouffiasse N°1, la casserole Dati vient d’illustrer que tous ces gens-là sont payés à rien foutre.

Un job va réduire légèrement le chômage : la protection rapprochée du personnel politique ridicule. Ils s’attendent d’ailleurs tous à ce qu’on leur « foute sur la gueule » s’ils passent dans le quartier… Ils sont bien peu nombreux pour serrer les rangs face à leur faconde et arrogance de bourgeois bien pourris. Berlusconi a reçu une pincée de messages de soutien par les complices internationaux de ses crimes. Le faux premier ministre russe Poutine et le faux président français Sarkozy ont été les premiers à l'appeler, avant les messages de réconfort du papillon Benoît XVI, du premier valet britannique Gordon Brown, de la dentellière allemande Merkel et de la secrétaire d'Obama Hillarante Clinton.

Bémol. La violence individuelle, son culte et son exaltation est, comme je l’ai souvent rappelé, et ce depuis 1789, typique de la petite bourgeoisie grugée et primaire; par exemple un journaliste farceur du Monde.fr serait l'auteur d'un montage vidéo montrant Amine Benalia-Brouch, ce morveux militant UMP rendu célèbre par les propos du négrier Hortefeux, un fusil Kalachnikov pointé sur la tempe. Le journaliste, auditionné mi-novembre, aurait reconnu être l'auteur du « détournement » diffusé sur YouTube – propre à enthousiasmer un rigolo d’entarteur comme Godin - rapportait lundi Le Parisien. Cette tendance à exsuder la violence au niveau « sociétal », comme disent les sociologues toujours en retard d’un métro, est la réponse bobo à leur rétrogradation statutaire dans la hiérarchie bourgeoise. Si l’on trouve des prolétaires parfois, parmi les « malfaiteurs » sociaux violents, leur détermination part d’un autre esprit de vengeance, comme réponse aux suicides à France-télécom et ailleurs. Or, je l’ai déjà expliqué dans ces colonnes, il ne faut pas s’attendre à des meurtres en entreprise de chefs honnis, cela ne correspond ni à l’éducation ni à la conscience politique dans la classe ouvrière. La réponse du « point de vue de classe » du prolétariat ne peut pas se situer à ce niveau mais dans cette formidable expression collective que sont les grèves dirigées par les travailleurs eux-mêmes et des manifestations qui auront un sens et des buts, avec inévitablement des débats politiques d’envergure dans les lieux occupés (comme en 68). La bourgeoisie s’attend à cette réponse plus grave, politiquement inquiétante pour son avenir, comme j’ai été pour l’instant le seul à le signaler concernant le congrès de la CGT. Si cette officine gouvernementale a prévu d’en finir avec la « fédération » par entreprises de son cordon policier pour passer à une « fédération territoriale », je suis tenté de dire que cette « mue bureaucratique » a pour fonction d’anticiper l’apparition d’organismes de classe révolutionnaire, type Conseils ouvriers, qui se ficheront totalement du cadre de l’entreprise ; et dont il faudra tenter d’éradiquer la potentialité subversive comme organisations réelles du prolétariat face au système capitalo-écolo, dans une bataille à couteaux tirés face à un maillage syndical comparable à celui de la « gauche socialiste » qui permit de vider de son sang la révolution allemande de 1918. Bataille plus ardue dans des conditions de simultanéité internationale.

DEUX. L’argument de l’Etat bourgeois qui consiste à dénoncer la violence en général en oubliant qu’il en est le principal géniteur, s’accouple avec les accusations génériques de terrorisme à tout va, d’une assurance de son rôle de protection des citoyens. Cette dernière assurance est en train de voler littéralement en éclats. Les campagnes antiterroristes n’abusent plus grand monde. C’est la deuxième fois, depuis l’ascension fulgurante de Sarkozy, qu’un enfant de 12 ans est tué dans la rue pour des querelles de petites frappes. La fois précédente, Sarko, simple premier flic de l’Intérieur avait promis une réponse au kärcher. J’avais trouvé sa réponse plutôt virile et correcte sémantiquement (le gamin précédent lavait la voiture du père avec une éponge) du point de vue médiatique par le ministre ; et je pense toujours que la réponse face aux meurtriers d’enfants ou des terroristes du lumpen reste la mitraille, mais pas par la police bourgeoise qui est chargée de protéger exclusivement les puissants. Ce deuxième meurtre, celui du petit Amar à Lyon, criblé de balles, vient révéler que Sarkozy, malgré son bla-bla « viril », ne fait rien pour les quartiers ouvriers (face aux excroissances et dérives du lumpen, en attendant de les recruter plus tard comme corps francs) et ne fera jamais rien que jouer au malin et exhiber, comme Berlusconi : l’étalement de sa richesse et les envies de sa bite, et couvrir d’or ses complices en tics Guaino et Dati. La petite mémé continue à se faire brutaliser et arracher le sac à main, des passants à se faire écraser par les cowboys policiers et policières, des retraités maghrébins à se faire tabasser et tuer au commissariat. L’antiracisme du maoïste intégré Kouchner peut voisiner sans émotion avec la chasse au faciès. L’intégration républicaine autorise la kabyle fonctionnaire d’ANPE comme l’algérien en uniforme de CRS à taper sur le chômeur et sur le manifestant, indépendamment de sa race. Contrairement aux analyses superficielles des sociologues influencés par l’idéologie US (à la Dominique Schnapper) les liens ethniques sont totalement secondaires dans la « fonction sociale » de chacun. Le maghrébin devenu flic restera flic en premier lieu. Parmi la classe ouvrière, c’est pareil, face à la répression et au chômage, face aux assassinats de rue, ce n’est pas l’islamisation des mœurs qui se répand mais la détermination de classe. La détermination des « gens des quartiers », des prolétaires, lorsqu’ils protestent n’est pas centrée sur ces questions secondaires et artificielles que sont les minarets, les quotas, le voile ou le string. Cette détermination, pour l’instant pacifique, est une détermination de prolétaires indistincts. C’est pourquoi la manifestation à Lyon pour le petit Amar m’a beaucoup touché par sa dignité et parce qu’un manifestant, couvrant la voix des habituels « médiateurs démocratiques » a crié : « c’est la révolution qu’il faut ».

Universalisme abstrait contre communautarisme d’Etat :

Depuis des années les intellectuels gouvernementaux, et à leur suite tous les prédicateurs écolos, les imams consensuels, les rabbins obligés d’Israël, les féministes bourgeoises, les communisateurs antiracistes confortent la principale idéologie bourgeoise occidentale selon laquelle la lutte de classes n’était plus devenue qu’un « universalisme abstrait ». Ces engeances ont rejoint la frange gauchiste et social-démocrate de l'intelligentsia de gauche qui pense qu'on ne peut plus changer le monde et qu'il faut l'accepter comme il est à condition de produire plus d’éoliennes et de chanter ensemble à Copenhague. Aujourd'hui ils veulent tous dialoguer avec tout le monde. On balaye toutes les difficultés et on cache la poussière sous le tapis pour avoir la paix. On ne veut plus aborder les questions de fond de la lutte des classes. On accepte tout dans un mouvement de fraternité communautaire… abstraite, mais, en réalité, c'est pour mieux contrôler le prolétariat.

Notre époque est celle du dérapage contrôlé. Ce sont les prolétaires qui payent, et les sans-diplômes que l'on envoie au casse-pipe se battre ou marner pour les marionnettes du Capital. La démocratie, l’antiracisme sont des leurres avec lesquels on égare les consciences. Vieille tactique politicienne, on nous demande d'abandonner l'idée que l'histoire va dans le sens de l'émancipation du prolétariat. Les manifestations diverses du prolétariat n’intéressent pas les moyens de contrôle médiatique de l’Etat bourgeois, ou elles ne sont présentées que comme grèves d’égoïstes, manifestations pour plus de police, protestations « citoyennes », phénomènes dérisoires d’éternels vaincus de l’histoire.

Hélas, trois fois hélas ! La crise systémique se renforce. Ce ne sont plus des entreprises seulement qui sont en faillite mais des Etats entiers. La crise systémique fait et fera voler en éclats de plus en plus les leurres gouvernementaux. La violence n’est que la crête de la vague. C’est d’organisation qu’ont besoin les prolétaires, c’est de lieux où décider de leur vie, de l’universalisme concret de l’humanité. C’est une réflexion renouvelée pour la possibilité de changer le monde qui est à l’ordre du jour de la période qui vient. Vivement 2010.

Bien creusé vieille taupe !