PAGES PROLETARIENNES

vendredi 2 octobre 2009


UN SCOOP : BOURGEOIS ET PROLETAIRES ONT DISPARU !


CE QUE LA BOURGEOISIE ENSEIGNE DANS SES ECOLES SUPERIEURES (rions un peu)


( ou le paradigme marxiste expliqué aux enfants des bourgeois fascistes)


« Le contenu sociologique du paradigme marxiste paraît encore plus daté et obsolescent que son contenu économique, bien qu’il conserve dans ce domaine une capacité d’explication et d’animation (sic). Son contenu sociologique initial se résume à l’interface entre deux classes sociales, bourgeoisie et prolétariat. Or cette dichotomie sociale n’est pas seulement datée. Sa disparition est intimement liée au contenu de l’évolution économique, en particulier, à celle de l’état de la technique ; et, du point de vue social, deux phénomènes conjoints ont eu lieu depuis un siècle. La société à deux classes du paradigme marxiste a disparu et a été remplacée par une configuration différente, une société divisée en trois sous-ensembles.


Le prolétariat disparaît au fur et à mesure que son niveau de vie s’accroit (sic) et que la part du travail musculaire dans la production diminue. La démocratisation de l’enseignement (resic) conduit à une plus grande mobilité sociale et à une moindre dépendance des individus à l’égard de la machine et de la hiérarchie (ces pauvres profs n’ont jamais mis le nez hors de l’école ?). Aujourd’hui, aux Etats-Unis, 18% de la population active participent à la production matérielle et 3% à l’agriculture. Le cinquième de la production américaine est issu d’un travail encore non musculaire. Simultanément la bourgeoisie disparaît, entamée par la pression fiscale, la collectivisation (ou la démocratisation) de la propriété et l’abandon de son autoreproduction. Sa reproduction sociale devient plus difficile parce qu’elle forme un modèle inaccessible et inimitable par le reste de la population. Bourgeois et prolétaires ont disparu ensemble emportés par un progrès technique qui a produit une nouvelle forme de société à trois classes : les « intouchables », les exclus et une grande classe moyenne.


Les « intouchables » sont l’ensemble des individus indifférents à toute mesure politique, d’autant plus que leurs activités et les capitaux sont délocalisables. Ces individus sont inattaquables par le pouvoir des Etats-nations. Dans les sociétés développées ils correspondent au 5% de la population qui détiennent près de 50% du capital accumulé. Les intouchables sont des rentiers (ceux qui ne travaillent plus), des entrepreneurs individuels et des dirigeants de grandes entreprises. Dans la société postindustrielle de l’information, la capacité des intouchables à assurer la pérennité de leur statut est confortée, la nécessaire destruction d’information s’étant substituée à la nécessaire destruction du capital, comme en témoignent certains événements qui ont défrayé la chronique tant en Europe qu’aux Etats-Unis.


Les « exclus » sont tous les individus qui, pour plusieurs raisons, ne s’intègrent pas totalement à la société dans laquelle ils vivent. Ils constituent désormais près de 20% de la population des sociétés développées et perçoivent environ 5% des revenus.


La « classe moyenne » se situe entre ces deux extrêmes. Cette part majoritaire de la population, bien que composée d’individus divers et fortement hiérarchisés, forme pourtant un ensemble assez homogène. Ses membres ont à peu près le même mode de vie, avec des niveaux de revenus qui s’écartent peu de la médiane. La communauté de niveau et de style de vie n’est pas la raison fondamentale de leur attachement à cette coalescence. Il s’agit bien davantage de l’impossibilité dans laquelle ils se trouvent d’accéder au statut des intouchables, et de leur refus ou crainte de tomber dans l’exclusion. La classe moyenne s’est d’abord constituée à partir des employés qui refusaient de devenir les nouveaux prolétaires de la nouvelle société. Bien que se reconnaissant, ils ne se font pas de cadeaux et sont au contraire animés par une féroce concurrence entre eux pour éviter la chute dans l’exclusion.


Une telle société n’a rien à voir avec la société marxiste duale et révolutionnaire, si tendue qu’elle avait besoin d’idéologie à usage social. Les nouvelles sociétés développées connaissent essentiellement deux types de tensions (on croirait du Raoul Victor pur craché !). La première tient à l’exclusion, dont l’existence est une des conditions du confort social de la classe moyenne (services à bon marché, travail noir, par exemple). La seconde naît de la crainte de la classe moyenne d’être exclue. Assurer l’intégrité de la classe moyenne, c’est empêcher qu’elle menace de se déliter vers l’exclusion.


La société marxiste est définitivement dépassée. La classe moyenne n’a pas besoin d’idéologie. Elle s’est accommodée à l’idée de sa mort. Elle veut surtout qu’on ne lui dise pas comment vivre ; elle ne crée pas d’idéologie, sinon celle d’un individualisme qui n’a aucun intérêt à s’avouer. Cette attitude est indissociable du motif souvent invoqué pour légitimer l’intégrisme religieux. La classe la plus importante dans nos sociétés est unifiée par son mode de vie et ses nouveaux besoins, l’évasion, le dépaysement, les jeux, le farniente, et la pitié rousseauiste, devenue avec les médias, chagrin récréatif ».


« Les quatre piliers de la science économique » par Alain Cotta et Coralie Calvet (Fayard 2005) deux profs d’économie à Paris-Dauphine.


Juste une remarque : Ce qui est remarquable avec les nouvelles modes idéologiques bourgeoises c’est qu’elles ne peuvent aucunement oblitérer « les classes » ; elles les caricaturent, changent leur nom, gonflent celle-ci, criminalise celle-là (comme vous l’avait lu de vos yeux lu, la classe ouvrière n’est plus qu’une portion minime d’exclus, quand la bourgeoisie (minoritaire toujours) reste « intouchable ». Une autre partie de la classe prolétaire, dont certains ont tendance à se suicider en ce moment, est régulièrement ridiculisée par les clercs des « intouchables » et cajolée en même temps. Mais ce n’est toujours pas vrai que la petite bourgeoisie serait une classe « homogène ». Elle est constituée il est (toujours) vrai d’une masse de crétins individualistes et arrivistes, mais elle s’effrite avec la crise systémique. Les salariés des couches moyennes ne tombent « dans l’exclusion » que s’ils le veulent bien – le petit bourgeois a horreur de retomber dans le prolétariat disait Hitler – ils peuvent s’élever au contraire à la conscience de l’immense majorité des exploités musculaires et matières grises réunis. Tomber de la hiérarchie sociale ou se ramasser un gadin face à de précaires illusions bourgeoises, cela peut fort bien réveiller, ou au moins contribuer à une saine réflexion marxiste. N’est-ce pas messieurs-dames ?


paradigme masculin : Représentation du monde, une manière de voir les choses, un modèle cohérent de vision du monde qui repose sur une base définie.


La coalescence est un phénomène par lequel deux substances identiques, mais dispersées, ont tendance à se réunir.


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