PAGES PROLETARIENNES

lundi 31 décembre 2007

DANS QUEL ETAT

EST LA REVOLUTION ?

« Peut-on construire le socialisme dans un seul pays ?

- Oui, mais il vaut mieux aller vivre ailleurs ! »

« Après la mort de Staline, son entourage ouvre son testament et trouve trois enveloppes. Sur la première il est écrit : « Enterrez-moi dans le mausolée de Lénine ». Ses héritiers l’enterrent.

Sur la deuxième enveloppe, il est marqué : « Ouvrir quand ça ira mal ». Ils l’ouvrent et trouvent indiqué : « Mettez-moi tout sur le dos ». Ils lui mettent tout sur le dos.

Sur la troisième il est indiqué : « Ouvrir quand ça ira très mal ». Ils l’ouvrent au moment de l’insurrection hongroise et lisent : « faites comme moi ».

BLAGUES RUSSES des années 1950 (extraites de « Prolétaires de tous les pays, excusez-moi ! » d’Amandine Regamey, ed Buchet-Chastel 2007)

La révolution, ou tout au moins le projet révolutionnaire de renversement de la société bourgeoise pour transformer de façon communiste la société moderne, est en mauvais état. C’est le moins qu’on puisse dire. Pourtant on va en parler beaucoup de révolution dans l’année qui vient, avec les commémorations éditoriales quasi-conjointes de 1917 et 1968. Le calendrier fait bien les choses au fond. Comme je l’explique d’entrée dans mon livre à paraître, du même titre que cet article, 1968 fut hanté par 1917, et je suis très explicite sur le pourquoi pour ceux qui auront la chance de me lire.

Les festivités éditoriales ont commencé au cours de ce dernier trimestre 2007 avec une série d’ouvrages haineux contre les bolcheviks, accompagnés par la série d’articles hystériques d’un certain Jan Krauze, déshabillé ici, et rétribué par Le Monde en faillite (et tant mieux). Sur 68, on réédite à tour de bras des fadaises ou du pipole à la July avec photos vieillies. Bon augure pour la bourgeoisie sarkozienne ces clichés d’un monde de jadis où la classe ouvrière peut être montrée en noir et blanc comme une sorte d’archives de vieux films d’avant-guerre qu’on consulte avec nostalgie. Et puis, 40 années écoulées c’est beaucoup plus qu’entre 1945 et 1968… bien que mai 68 nous reste plus proche que ne l’était la deuxième guerre mondiale à la fin des sixties. Bien que les syndicats clientélistes aient fait passer les grévistes des transports pour des pépères-la-retraites et non des combattants isolés, la lutte sociale reste du domaine du réel actuel plus que le délirant holocauste planétaire, c’est déjà çà (*).

La vieille taupe révolutionnaire creuse toujours son trou sans en avoir l’air puisque comme on va le voir, la bourgeoisie éclairée se soucie des flammèches d’espoir qui perdurent malgré l’assourdissante domination des médias en faveur du monde tel qu’il est. Que disent donc les élites, ou qui se croient telles, de la révolution et du marxisme ?

AMOINDRIR LE SOUCI DE CHANGER LE MONDE

L’hebdomadaire marginal, mais fort bien diffusé, « Marianne » se fait en général l’écho d’une critique radicale en apparence du système médiatique. Ce magazine, aux titres provocateurs, au contenu insignifiant et superficiel, convient fort bien ) cette masse d’employés de bureau qui peut le parcourir dans le métro avec le sentiment de s’encanailler en complicité avec le dangereux révolutionnaire JF Kahn et ainsi compenser la servitude au boulot en croyant se moquer de PPDA, de Libé et du figaro. Cet organe de presse est aussi négationniste que l’ensemble des médias bourgeois de toute alternative à la société libérale. Après avoir hystériquement dénoncé la baudruche Sarkozy, cet organe, arrosé aussi par la publicité conformiste, se pique d’offrir des idées dérangeantes au bon peuple. Son dernier numéro de l’an 2007 agite l’hydre d’un cataclysme financier, qui certes vient, mais pour ridiculiser toute idée de révolution.

« 1640-2008 » Comment naissent les révolutions ? » est un formidable patchwork de tout et n’importe quoi. Préposé à l’introduction, après un laïus populiste contre les riches, un Guy Sitbon partait pourtant d’un constat indiscutable :

« … Il est à peu près aussi idiot d’annoncer une révolution que de pronostiquer l’impossibilité de toute nouvelle révolution. A première vue, tout irait dans le sens des prophètes de la « fin de l’histoire ». Il n’y a plus personne pour avancer le projet d’une autre société que la nôtre. Aménager les règles qui nous régissent, ajouter plus de justice, atténuer les souffrances, oui. Mais déconstruire notre société pour en reconstruire une autre de toutes pièces, personne, même parmi les gauchistes les plus enragés, ne nous dessine les plans d’un système de remplacement (…) Si une révolution devait un jour éclater dans notre monde capitaliste, elle ne ressemblerait, à coup sûr, à rien de ce que nos ancêtres ont connu. Il n’y aura ni prise de la Bastille ni chute du palais d’hiver. Autre chose, n’en doutons pas : la bombe explosera. »

Comme tous les articles de Marianne il suffit de lire le titre et la dernière phrase pour avoir le contenu et le contenant, c'est-à-dire à peu près rien. Les révolutions du 18e au 21e siècle sont toutes furtivement examinées par le petit bout de la lorgnette sans plan d’ensemble ni progressivité.

1871 : « S’ouvre une course à la révolution où chaque faction s’efforce de déborder les autre ». Crétin !

1968 : « Des révolutionnaires frustrés » !? Raoul Vaneigem est sponsorisé « barde de mai » ! Plus poncif que les poncifs éculés : « Faute de convergence étudiants-salariés, le mouvement ne déboucha pas sur le grand soir. Le pouvoir paraissait pourtant à portée de la main » !

Ci-contre grenade lacrymogène
authentique de la rue Gay-Lussac
(collection privée)

La révolution américaine côtoie la révolution islamique, Mussolini le Portugal de 1975… Mais celle qui reste trainée dans la boue, à l’unisson du sinistre Jan Krauze, c’est celle d’Octobre 1917. Ah ce que la bourgeoisie la hait par tous ses pores. Le petit préposé médiatique et rachitique, Nicolas Werth en perd même toute mesure dans les chiffres : « l’usine d’armement Poutilov, en rupture d’approvisionnement, met à la rue des millions d’ouvriers » ! Fichtre, c’est beaucoup improviser avec la réalité, alors que Poutilov ne comprenait que quelques milliers d’ouvriers et que la classe ouvrière russe ne comportait que trois millions d’individus ! On apprend que les ouvriers ne se battaient que pour leurs vulgaires salaires et qu’ils ne « faisaient guère allusion au socialisme »…. En service commandé comme Krauze, Werth fait semblant d’ignorer que c’est la GUERRE stupide et sanglante qui a été le meilleur propagandiste du communisme, et non pas l’habituelle et charlatanesque accusation de manipulation bolchevique. Ce salopard nous ressort l’histoire du train blindé d’un Lénine traître envoyé par l’état-major allemand pour poignarder la sainte Russie, ce qui est encore un GROSSIER MENSONGE, Lénine n’ayant pas pour l’heure plus d’importance que tous les autres militants des divers partis logés dans ce train. La crise d’avril est décrite comme la fin de l’espoir du passage pacifique au socialisme, or cet espoir pacifique n’existe que chez les intellectuels bourgeois demeurés. Connard d’historien à la manque ! Magazine de merde.

UN MARX DE SALON OU LE MARXISME COMME BOITE A OUTILS

Le magazine patronal « Chalenges » rend hommages aux principaux marxistes encore vivants : Pierre Rosanvallon, éminence des cercles bourgeois du PS et du Nouvel Obs, Alain Minc cet « éternel marxiste » des conseils d’administration bourgeois, Jacques Attali cet auguste représentant des révoltés dans les cabinets successifs de Mitterrand, Pascal Lamy le bien connu révolutionnaire dirigeant de l’OMC, et Henri Weber un défroqué du guévarisme LCR.

Le magazine patronal peut conchier Pinay et Keynes et convenir que lorsqu’on tape « Marx » sur le moteur de recherche Google, le web compte près de 8 millions de références, loin devant Keynes (2,1 millions)… « Challenges » rassure tout de suite ses lecteurs super-bobos et super-ébahis : « Certes le Marx polémiste violent, le Marx utopiste prédisant la venue d’un monde parfait après la dictature du prolétariat s’est effondré dans l’échec économique des régimes communistes ». Le trotkien tonitruant du boul’Mich, avec son costard trois pièces de sénateur PS, Henri Weber vient aussi à la rescousse bourgeoise libérale et faussement anti-étatique : « Chez nous, plus personne n’est pour la socialisation des moyens de production ou la conduite de l’économie par le plan ». Pourtant le camarade Rosanvallon suggérait dès 1992 au PS : « … de redevenir marxiste pour décrypter avec précision les nouveaux modes de production et d’organisation ». Le camarade Pascal Lamy avoue lui le vide idéologique du capitalisme contemporain (qui s’autodétruit comme dit Artus) : « Si l’on veut analyser le capitalisme de marché mondialisé d’aujourd’hui ? L’essentiel de la boite à outils intellectuelle réside dans ce que Marx et un certain nombre de ses inspirateurs ont écrit » !

Mieux encore le camarade Attali, très intelligemment convient que si le prolétariat n’a pas pris le pouvoir (et on s’en serait aperçu) l’analyse par classe sociale reste la norme pour les observateurs ! Enfin bien que Sali par le « communisme », le camarade Minc conclut que « Marx est indépassable » ! Si, camarades, et par la prochaine révolution justement!

Souhaitons donc ici que l’an 2008 soit une bonne année marxiste, non pas au sens invertébré des camarades ici listés complaisamment, mais contre eux et leurs prébendiers !

(*) La perte de crédibilité des syndicats n’est plus à démontrer, par contre le misérable soutien du gouvernement à ses serviteurs – un décret instituant que payer une cotisation à un syndicat aura comme bonus une réduction d’impôts – achève et de les ridiculiser et le les figer dans une position, même plus réformiste, mais clientéliste. La corporation comme stade suprême du salariat encadré est le stade ultime de la bourgeoisie française, et confirme qu’elle est bien la plus bête du monde. Et lire, ci-contre, colonne de droite, la lettre du PCI sur les liaisons dangereuses CGT-LCR…

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