PAGES PROLETARIENNES

vendredi 28 avril 2017

TOUTE LA NORIA DES LARBINS DE PLUMES ET DES SALTIMBANQUES AU SECOURS DU MACRON DE L'ELITE


COMMENT UN VIEUX CLICHE DE 1933 SERT AUX SERGENTS RECRUTEURS DE MACRON

« Sur toutes choses, ce qui fait le plus haïr comme j’ai dit, c’est de piller les biens et prendre par force les femmes de ses sujets : de quoi le prince doit s’abstenir. Car quand on n’ôte point aux hommes ni les biens ni l’honneur, ils vivent contents et on n’a plus qu’à combattre l’ambition de peu de gens, laquelle facilement, et de plusieurs manières, peut être refrénée ».

Machiavel

Emmanuel Macron a tout de l'évêque Pierre Cauchon qui, aux ordres déjà des anglo-saxons, fît brûler Jeanne d'Arc ; mais Marine Le Pen n'est pas Jeanne d'Arc, elle n'est ni pucelle ni une option sérieuse pour la bourgeoisie souverainiste comme mondialiste. Dans la curée qui agite un second tour fébrile où la grande majorité des « rédactions » montent au front des pétitions contre le « danger Le Pen »1, on relèvera quelques commandements à la jeunesse à voter bcbg, et on en détruira la cuistrerie ; mais surtout on démontera à nouveau cette fable historique colportée des millions de fois que c'est la désunion de la gauche qui aurait porté Hitler au pouvoir. « En marche » voudrait nous faire marcher !
Notons en préliminaires que si la bourgeoisie a réussi son coup – la présence épouvantail de Le Pen au second tour – elle l'a manigancé en toute modestie ; à preuve ses sondages qui n'osent envisager guère plus de 60% à l'encravaté de service ; les sondeurs (qui se vantent de ne plus se tromper depuis le premier tour réussi à merveille) savent que la mémoire de l'opinion n'est jamais totalement lobotomisée : si en 2002 « l'antifasciste » « bandit Chirac » avait obtenu un 82% brejnévien c'est parce que toute la gauche bourgeoise avait crié en faveur du « front républicain ». La quasi-totalité des candidats éliminés au premier tour, de la société civile et des médias de masse avait appelé à voter Jacques Chirac, explicitement ou non. Les lycéens de l'époque avaient manifesté en masse pour dire non au fascisme, et puis une fois l'agitation électorale terminée, tout était revenu comme avant et le loup fasciste dans sa niche. Et, comble de malheur il y eût en 2005 le viol des foules électorales françaises qui avaient dit non au Traité de Lisbonne2. Ces deux entourloupes électorales ont mieux décrédibilisé le système démocratique bourgeois que nos meilleurs libelles maximalistes.

Qu'à cela ne tienne, « pas une voix ne doit manquer » à ce « meilleur des mondes à défaut d'un autre », pire sans doute...


Macron est un pur produit de l'élite financière qui n'a ni couleur politique ni parti d'allégeance, sauf l'intérêt du capital et la surexploitation des ouvriers. Cette invention d'un candidat « au-dessus des partis » - qui oscille entre un sort à la Badinguet ou à la Boulanger – a correspondu à la prétention à renouveler les élites de hâbleurs professionnels avec cette farce de représentants de la société civile.

Dans ce cadre l'élimination systématique par sa diabolisation, du candidat de la droite, Droopy Fillon, ainsi que la division programmée des partis de gauche, eurent pour but d'éviter une crise du régime d'alternance aléatoire, et même de plus en plus aléatoire, ce qui ne signifie pas que le système n'ira pas dans le mur. Dans ce cadre, nous sommes nombreux, de tous bords, à avoir remarqué combien une Marine Le Pen a été tant choyée par les médias aux ordres3, jusqu'au seuil du deuxième tour où de chérie, un peu malodorante sous les aisselles, elle est devenue une furie hyper dangereuse. Franchement cela fait 2002 réchauffé ! Ce qui fait honneur aux lycéens parisiens qui ont défilé derrière la pancarte « Ni Macron, ni Le Pen » ; c'est moins brillant de la part des ouvriers de Whirlpool qui se sont crus malins de faire des selfies avec la mère Le Pen à Amiens4.

Une lettre ouverte à la jeunesse par un des nombreux affolés sergents recruteurs pour les obliger à ne pas s'abstenir et à voter pour le pire candidat de la mondialisation bourgeoise (lettre à la jeunesse insoumise par un géographe de Libé) va nous permettre de décrypter que le pouvoir bourgeois repose sur un maquillage permanent de l'histoire avec les ficelles les plus grossières, comme l'émission sur l'anniversaire de 1917 l'a lamentablement révélé5.


HITLER PRODUIT D'UNE GAUCHE DESUNIE ?

Je ne vais pas revenir sur l'historique de la théorie du front unique, théorie opportuniste qui a conduit les trotskistes à leur perte et qui a été si bien déshabillée comme position bourgeoise par les Bordiga, Damen, Vercesi et l'ensemble de la gauche communiste italienne. D'ailleurs, aux sources de l'inutilité d'un front unique entre bourgeois et prolétaires, on a l'exemple de la révolution russe, face au putsch Kornilov, où il n'est pas besoin pour les ouvriers de s'allier avec la bourgeoisie libérale (ou plutôt parce qu'elle est derrière et pas devant les ouvriers) pour défaire l'apprenti dictateur, eux-mêmes, en armes font fuir les bandes armées de la réaction. Il n'y a plus d'union possible au XX e siècle entre ouvriers et bourgeois alors que cela fût une étape inévitable dans la lutte contre le féodalisme. Lénine avait cru un temps à un front commun avec les mencheviques puis s'était rendu compte de son inutilité : malgré cet échec Trotski lui reprend l'idée à la pire des périodes de réaction des années 1930 et pire, sera donc l'un des générateurs de ce maquillage historique : la gauche en Allemagne n'a pas su s'allier pour empêcher les nazis d'accéder au pouvoir ! Un non-sens complet ! C'était quoi la gauche en Allemagne en 1932 ? Un parti socialiste qui avait fait massacrer les ouvriers en révolution dix ans avant et un parti stalinisé depuis pratiquement Kronstadt et encore plus avec la mort de Lénine ; les vilenies de la contre-révolution stalinienne s'étaient accumulées : proclamation du socialisme dans un seul pays, insurrections bâclées en Allemagne, coup de poignard dans le dos des communistes chinois, déportation massives des opposants au régime, premiers goulags, etc. Et c'est ce parti « communiste allemand » courroie de transmission de l'impérialisme russe qui n'aurait pas fait l'alliance nécessaire avec le parti socialiste qui avait envoyé les ouvriers à la guerre mondiale puis avait fait tirer dessus pendant les tentatives révolutionnaires de 1919 et 1923 ? Etrange « parti de gauche », si l'on veut suivre les ânes professeurs pour lycéens ignorants, qui s'allie selon les circonstances avec le parti nazi contre la social-démocratie... vertueusement démocratique (sauf quand il s'agit d'envoyer les corps francs contre les ouvriers berlinois, entre autres). On voit donc déjà comment la médiacratie utilise une période passée qui n'a rien à voir avec la nôtre : Mitterrand n'a pas été Noske ni Mélenchon Scheidemann, et le parti de Marchais n'est plus que l'ombre de la secte qu'il a été. C'est pourquoi en introduction je parlais de Jeanne d'Arc et de l'évêque Cauchon, il y a des comparaisons historiques vachement nulle. Orwell avait piqué cette citation à je ne sais plus qui : « qui maîtrise le passé, maîtrise le présent » ; c'est à peu près çà mais encore faut-il préciser : qui maquille le passé pose au dictateur du présent. Dans les coulisses rédactionnelles, les hommes du pouvoir les Plenel, Patrick Cohen, le pitre Hanoun s'activent férocement pour interdire l'abstention6. Les articulets angoissés se succèdent en une de Libération : « Lettre aux électeurs de gauche qui ne veulent pas voter Le Pen » (lettre qui n'engage pas la rédaction, sic), « Lettre aux lycéens insoumis », « Pas une voix ne doit manquer au candidat de la démocratie », etc.

Voyons l'actualisation du mensonge par un vague géographe :

« En Allemagne dans les années 30, la victoire de Hitler fut possible à cause de la faillite de la gauche. Le mouvement ouvrier pourtant le plus puissant d’Europe ne fut jamais réellement mobilisé. De cet aveuglement face au péril nazi, il en ressort un refus absolu à vouloir s’unir avec les sociaux-démocrates pour organiser la résistance. A l’époque le Parti communiste allemand ne voyait alors le SPD que comme «un frère jumeau» du parti nazi, sous prétexte que tous les deux ne «défendaient que les intérêts de la classe capitaliste». La gauche allemande n’avait pas analysé le péril réel que faisaient courir les nazis et lors du vote au parlement le 23 mars 1933 de la loi instituant les pleins pouvoirs à Hitler, les députés présents dans l’assemblée ne firent pratiquement aucune contestation. Nous ne devrions jamais banaliser le Front national, c’est pourtant ce qu’il se produit aujourd'hui ». Et il termine cette fabrique mensongère de la situation d'époque en Allemagne par cette étourderie méprisable :

« Chaque voix pour la défense de nos valeurs républicaines comptera car c’est uniquement sur ces bases que de profonds changements démocratiques pourront s’engager. C’est de notre avenir en commun qu'il est question et il se jouera grâce à vous ».

C'est exactement le discours des puissants. C'est quoi leurs valeurs républicaines ? S'en mettre plein les poches en persécutant le couple Fillon pour ne rien changer au système d'enrichissement personnel parlementaire. C'est uniquement sur « ces bases » – vous ne pourrez jamais rien changer au système hi hi... « Notre avenir en commun », lequel celui des planqués élus, des patrons voleurs, des flics et magistrats ripoux ? Et cet andouille de géographe qui veut « se jouer » de la jeunesse...électorale car ce mot ne signifie rien, il est aussi vague que le mot peuple. Il y a deux classes fondamentales qui font référence pour la partie consciente de la jeunesse : la bourgeoisie et le prolétariat. Vous pouvez vous acharner journaputes, Hanouna, Pulvar, Patrick Cohen, et autres saltimbanques, vous l'aurez dans le cul : on n'ira pas soutenir votre futur chef de service ! Faudra que votre girouette de la finance heureuse se contente de 51 ou 59 %.


RETOUR SUR UNE HISTOIRE BACLEE

La période du début des années 1930 est une période difficile, contradictoire. Les années 1920 ont été celles d'une vague révolutionnaire mondiale. Les PC sont devenus des partis de masse mais sans la consistance des premiers petits groupes de communistes. Dans notre langage à nous maximalistes on ne dit pas d'abord victoire du stalinisme, à la façon ambiguë des trotskistes, mais échec de la révolution en Allemagne en 1923, et cela est autrement plus important que la mort de Lénine ou le bannissement de Trotski. L'Allemagne restait le pays phare de la révolution mondiale ; en décidant d'arrêter la guerre mondiale, secrètement et avant la peur du bolchevisme, la bourgeoisie savait qu'elle diminuait d'autant la propagation révolutionnaire au pays de Marx. Ce n'est pas Brest Litovsk qui est le coup d'arrêt – la révolution ne peut pas non plus s'étendre par la guerre – c'est la reprise en main de l'ordre public en Allemagne par les ministres socialistes au prix du massacre des ouvriers et du soutien d'une grande partie de la population qui en avait marre des violences après celles monstrueuses de 14-18. Dans cette situation il n'y a ni parti de gauche ni parti de droite mais des groupements qui se réclament d'une classe sociale ou d'un système. Les socialistes qui ont trahis en 14 se réclament de l'Etat démocratique (qui fusille les ouvriers en armes). Les partis communistes sont divisés – ils existent comme parties du prolétariat pas comme une vague population hétérogène d'électeurs de gauche gouvernementeuse – mais le principal d'entre eux est devenu inféodé à Moscou. Pour ne pas parler des gens en général, mais des membres des partis sincèrement communistes et qui ont rompu avec le principal pro-Moscou, la dictature qui sévit en Russie n'est plus un exemple ; même si leurs homologues des autres partis – on ne dit pas « frères » encore – ne s'en rendront compte que bien plus tard. Et il y a le mouvement fasciste qui surfe sur la fausse défaite de 1918, dont les membres participent aux grèves contre les ministres « socialistes » de Weimar. Le principal parti communiste allemand n'est pas non plus entièrement stalinisé, problème des époques charnières où tout n'est ni blanc ni noir. Ce ne sont pas les équivalents de nos braves antifascistes de salon qui combattent les premiers les nazis. Ont lieu des combats de rue sans concession entre militants nazis et militants communistes. En 1931, 103 militants communistes sont tués et 79 militants nazis. Une partie des couches ouvrières et petites bourgeoises oscille entre les partis communistes et le parti nazi. Peu d'historiens prennent en compte que si le parti communiste pro-Moscou fait des appels du pied aux militants du NSDAP, c'est parce qu'il y a bien une « gauche nazie », anticapitaliste et dont les figures de proue seront immédiatement éliminées par Hitler une fois au pouvoir.

En plus la plupart des menteurs modernes sur les conditions de l'accession au pouvoir d'Hitler oublient une précision – ce ne fût pas la victoire électorale en soi d'une présumée droite7 face à une gauche virginale8 mais ils radotent ce simplisme de Jacques Droz :
« De cette évolution qui aboutissait à l’effondrement des deux grands partis de la gauche allemande, c’est incontestablement le Parti communiste qui porte la plus lourde responsabilité. En dénonçant la social-démocratie, et non le nazisme, comme l’ennemi à abattre, il avait certes contribué à assouvir les haines personnelles de Staline, mais il avait fait preuve d’une servilité et d’une cécité dont l’histoire doit lui demander compte ».

On ne peut refaire l'histoire, tous les fronts populaires unis ou en partie unis n'ont jamais empêché la catastrophe principale : la guerre mondiale. Imaginer l'union de Noske et de Thalheimer pour contrer Hitler c'est comme imaginer l'union de Pétain et l'Abbé Pierre pour empêcher l'accession de De Gaulle au pouvoir ! Ou l'Union de Léon Blum et Maurice Thorez pour empêcher la débâcle de 1940 !
Gilbert Badia, malgré ses accointances avec le PCF, fût un historien autrement plus honnête ; j'ai eu l'occasion de le consulter à deux reprises et sur le fond il faisait les mêmes analyses que notre gauche communiste maximaliste. Il n'y avait pas une division de la classe ouvrière par des partis de gauche concurrents, raisonnement pingre des sondeurs limités de nos jours, mais des partis qui représentaient des camps différents. Badia, que Jean Barrot n'a fait que recopier, disait que les masses allemandes ne pouvaient avoir oublié la répression sanglante des Spartakistes en janvier 1919, l'assassinat de Rosa et Liebknecht par les corps francs du gouvernement constitué de ministres sociaux-démocrates. Par ailleurs, en réprimant les Républiques de conseils, en faisant la promotion d'un nationalisme qui préservait la figure d'Hindenburg, des dirigeants sociaux-démocrates tels qu'Ebert ou Noske ont favorisé l'émergence du mouvement national-socialiste. Selon Gilbert Badia, comme pour la gauche italienne et les révolutionnaires allemands et hollandais, c'est « l'écrasement de la Révolution (qui) a rendu possible le développement ultérieur du national-socialisme ».

Les ignorants professeurs d'ignorance pour lycéens – qui eux ruent pour une fois super bien dans les brancards de ramassage scolastique électoral – orchestrateurs de cette lamentable campagne taillée sur mesure pour un préfabriqué de l'ubérisation du travail, comme depuis des décennies les divers militants gauchistes ou les divers fans de la gauche gouvernementale, radotent ensemble que le nazisme c'était « la réaction ». Du tout, répondait à leurs semblables maquilleurs de l'époque, Trotski encore flamboyant : « le nazisme n'est même pas la réaction, il vient parachever le boulot que d'autres ont fait ». C'est tout dire. Il y avait eu un avant, avant le nazisme, des politiques se réclamant, non en soi de la gauche, mais de la classe ouvrière, qui s'étaient au service des besoins criminels de l'Etat bourgeois. Les menteurs à chaque époque veulent faire oublier les traîtrises d'hier pour que leurs employeurs en perpétuent l'héritage.

Il n'y a absolument aucune comparaison possible entre la France de 2017 et l'Allemagne de 1932. Et l'installation de Hitler au pouvoir n'est absolument pas le résultat de l'arithmétique électorale. Plus que les autres pays, l'Allemagne (dans le camp mal loti des vaincus)souffre de cette crise économique mondiale que la guerre n'a pas réglée. Les chômeurs se comptent par millions et les brouettes sont pleines de billets sans valeur. L'industrie allemande licencie à tour de bras et diminue les salaires de ceux qui restent. C'est sur cette vague que le parti nazi se développe dénonçant le Traité de Versailles, mais pas seulement, il s'affirme anticapitaliste et anticommuniste. Hitler a un discours simple : "L'état de l'Allemagne est la conséquence du traité de Versailles, ce diktat imposé aux Allemands par les vainqueurs de la Première Guerre mondiale. Ni le communisme, ni le grand capital ne peuvent sauver. Les Allemands doivent se ressaisir, reprendre en main leur destin d'Allemand". Il faut exporter ou périr, donc recommencer la guerre. C'est ce que souhaite totalement la bourgeoisie allemande.

En juillet 1932, de violents affrontements opposent les communistes pro-Moscou et scissions et les nazis avec complicités de la police. L'incendie du Reichstag apprêté par les hommes de main nazi (qui ont fait porter le chapeau à Van der Lubbe mais curieusement excusé le serviteur de Staline, Dimitrov) n'est que l'allumette du tonneau. Les allemands en ont marre de ce désordre et votent massivement pour le parti nazi aux nouvelles élections législatives, mais pas majoritairement. Le 31 juillet 1932, le parti obtient 230 députés et Hitler devient le chef du premier parti politique du pays.

De 1932 à 1933 se déroule une succession d'élections législatives jusqu'à ce que, même minoritaire, et cela les faussaires d'une présumée absence d'union antifasciste de la gauche oublient de le mentionner (43% contre 12% aux staliniens) Hitler se voit nommer à la tête de l'Etat pas par les électeurs mais par l'appareil d'Etat allemand.


LE DICTATEUR est dicté (formule d'un camarade du PCint)


Une vraie comparaison celle-là cependant, comme de nos jours l'Etat bourgeois fait ce qu'il veut avec les stratégies électorales : il installe des dictateurs quand cela lui est nécessaire pour aller à la guerre, et il les désinstalle lorsqu'ils ne sont plus nécessaires. Là aussi nos menteurs professionnels en histoire actuelle effacent, quand, après avoir trituré toutes sortes d'arguments pour commander au vote obligatoire « antifasciste », un John Hufrangel nous assure, même fantasme hitlérien en tête » : « une fois au pouvoir il sera impossible d'en déloger Marine ». Ce qui est faux, si cela advenait avec le chaos promis il y a toutes sortes d'élections ou de référendums dans la boite à outils de l'Etat pour la faire dégager ; la France n'est pas la Turquie ni l'Iran. Enfin je le répète, la situation n'est pas du tout la même, pas de foules hystériques, pas de partis armés comme en Allemagne et en Espagne.

Mussolini a été viré par la bourgeoisie italienne dès qu'elle s'est aperçu qu'il entraînait le soulèvement des masses. Hitler a été l'objet de plusieurs attentats, certes raté, mais la bourgeoisie internationale y inclus le stalinisme a bien réussi à l'éliminer, et cela – même au prix de millions de morts – a été un bienfait depuis pour la pérennité de l'ensemble du capitalisme.

IL FAUDRAIT INTERDIRE L'ABSTENTION...


Longtemps, depuis des décennies, une des chansons des rabatteurs de la gauche et de ses gauchistes, fût « s'abstenir c'est favoriser le FN ». Bien que cela n'ait jamais été sérieusement démontré, il est sûr par contre que s'abstenir est la meilleure façon de conchier l'ordre bourgeoise des menteurs, des tricheurs et des voleurs. L'abstention ne veut pas dire qu'on ne se prononce pas, qu'on n'a pas envie de se prononcer, mais qu'il est impossible de s'exprimer dans un cadre puant, et que l'expression d'une volonté politique n'est que l'aboutissement d'une lutte, prioritairement de classe (du point de vue du prolétariat) quoique la classe ouvrière et nous on comprenne que la classe bourgeoise veuille garder ses prérogatives et conserver la soumission comme la noblesse avec ses serfs ; mais grand bien lui fasse si cela dure ! Il reste plus honorable de s'abstenir de participer au maintien de l'oppression en place que de s'abaisser à des votes « protestataires ». L'argument patriotard du « vous aidez le camp ennemi » est si usé que lorsqu'il nous est resservi plusieurs fois par jour sur la radio d'Etat ou BFMacron, car il se termine par l'insulte. Et nous fait pitié.

« Il est particulièrement pénible d’entendre insinuer que des gens de gauche pourraient tolérer une seule seconde l’idée de voir Marine Le Pen présidente. Il est vrai que des personnes se plaçant dans ce champ politique se complaisent dans une théorie du choc postulant qu’une élection de Le Pen«remettre les choses à plat», ou bien qu’au final, ça ne serait pas si grave car «elle n’aurait pas de majorité pour gouverner». Mais ce n’est même pas ces gens qu’un dessinateur de presse, Xavier Gorce, vise quand il estime que «qui ne vote pas Macron est un salaud. Point.» Dans son esprit comme dans celui d’Enthoven et d’autres, le simple fait de ne vouloir ni Macron ni Le Pen, «ni patrie ni patron», comme cela a été écrit dimanche soir sur la place de la République à Paris, le simple fait de se poser des questions en réalité, suffit à caractériser une complicité insupportable avec les idées d’extrême droite ». (citation d'un rabatteur qui appelle les électeurs de gauche à penser par eux-mêmes et non décompter la liste des soutiens élitaires au chouchou des médias, donc aussi à voter Macron ! Hin hin).
Toujours le même remake comme en 2002 et 2012?
permettrait de
Je termine par cette réflexion sagace d'Attali, pourtant malheureux avec son dérapage sur le « détail » de la fermeture d'usine d'Amiens : « les médias font inconsciemment comme s'ils voulaient que Marine gagne ».




NOTES:


1« Pas une voix ne doit manquer au démocrate européen Macron a dit Moscovici »... face au danger du FN.

2La relation de l'événement réel est difficile à retrouver sur wikipédia et google, il faut faire défiler moult éloges dudit traité avant de tomber sur une info, soulignée ponctuellement dans l'étroite presse révolutionnaire, et dont les héraults dénonciateurs ne sont pourtant pas nos référents (Le Pen et Mélenchon) : http://www.lefigaro.fr/politique/le-scan/citations/2015/05/29/25002-20150529ARTFIG00111-dix-ans-apres-le-non-au-traite-constitutionnel-hollande-et-sarkozy-renvoyes-dos-a-dos.php

3Certains médias en sont même gênés au point de questionner les lecteurs : « les médias ont-ils été trop sympas avec Marine Le Pen ? » Pose l'un d'entre eux.

4Images abondamment relayées par les médias pour « prouver » que les ouvriers « votent en majorité Le Pen » ; mais même si c'est vrai pour une partie d'entre eux, cela ne manifeste aucunement une adhésion fasciste mais leur désarroi et leur colère. D'où qu'il est le parti qui défend les intérêts historiques du prolétariat (je me fous du pouvoir d'achat) ? Certainement pas chez le « mouvement patriotique » de Mélenchon ni chez les vieux croûtons ringards du trotskysme.

5Il faut saluer l'excellent article du CCI critique de cette émission où Marc Ferro s'est révélé n'être au fond qu'un historien de gouvernement ; le rédacteur a bien souligné comme moi cette musique guillerette entre chaque séquence de l'événement en Russie, afin de ridiculiser Lénine comme un planqué en Suisse. Et lire ceci : front unique, front anti-prolétarien : http://fr.internationalism.org/book/export/html/1544  . Les références à la Seconde Guerre mondiale font toujours florès - pour simplifier la propagande et éviter qu'elle ramène aux réalités sociales - Macron va à Oradour (sic), Delanoë évoque lui aussi le parallèle miteux avec 1933, un édile du FN se fait virer illico du FN car risque de rediabolisation avec leur vieille contestation des chambres à gaz. L'histoire revisitée à des fins de réclame électorale, attention!

6Un rare humoriste est censuré parce qu'il comprend l'abstention. La plupart des autres hurlent de voter Macron, voire s'en prennent lâchement à ce « petit monsieur Mélenchon », contraint de se ranger du côté de l'abstention pour ne pas se ridiculiser comme les autres et garder quelque crédit à ses électeurs pas si insoumis qu'ils le disent.

7Bordiga a démontré que le fascisme n'est pas la droite mais la bourgeoisie unie dans la volonté d'aller à la guerre.

8En charge du pouvoir capitaliste au moment de la pire crise économique de l'histoire, non maîtrisée, plongeant les allemands dans une misère terrible propre à être exploitée par les pires démagogues.

mardi 25 avril 2017

ENTERREMENT DU POLICIER : LES HOMOSEXUELS INTEGRES DANS L'UNION PATRIOTIQUE

« Le national-socialisme ou le chaos bolchevique ? » demandait avec arrogance une affiche nazie, faisant croire par là que seule existait cette alternative et que, pour tous les hommes de bonne volonté, le choix était évident. « Erdäpfel oder Kartoffel ? » (Patates ou pommes de terre?) répondait une petite bande de papier qu'un groupe clandestin colla sur des centaines de ces grandes affiches, déclenchant ainsi une enquête massive de la part de la Gestapo ». (voir note plus bas)

J'avoue avoir versé quelques larmes au discours du « compagnon » du policier lâchement abattu à bout portant sur la « plus belle avenue du monde ». L'assassinat d'un homme ou d'une femme, quoique les crimes soient plus nombreux quotidiennement dans les pays lointains dont BFM rend compte in petto en déroulé sous les images officielles de la cour de Préfecture parisienne, me renvoie toujours à ma propre souffrance de la perte de mes êtres chers et de mes camarades. Certes le discours à la mode (« vous n'aurez pas ma haine ») - car la haine est la seule sentimentalité prêtée par la mouvance gauchiste au Fhaine, pourtant guère différente de la leur – était stupéfiant néanmoins. Croyant qu'il s'agissait du discours apitoyé et chagrin d'un collègue mon dentier de la mâchoire inférieure tressauta lorsqu'il fût question de « mon compagnon ». Mon cervelet fît un bond : quelle aubaine pour la société multigenre, multitout du « bloc progressiste » !

Ce n'était pas un simple flic hétéro comme vouzémoi mais un « pédé »1 tout ce qu'il y a de plus homo, plutôt moins con que le flic moyen, passionné de cinéma, de rock, qui avait été voir Sting au Bataclan, qui était militant de LBGT, soucieux d'aide aux migrants ; un vrai flic gauchiste et tout et tout. Renversant et séduisant comme l'incroyable avancée moderniste de notre société mondialiste, croyante toutes catégories et démocratie bénie par les siècles et les siècles d'obscurantisme.

Le discours de l'amant du flic mort n'a certainement pas été préparé sans conseiller tellement il correspondait aux nécessités électorales macronesques pour ne pas dire anti-haine, je veux dire anti Le Pen, cette représentante des salauds racistes et ennemis des homosexuels (quoiqu'il y en ait un d'assez perspicace aux côtés de la « raciste » en chef). Apologie de la police garante de la démocratie, truisme incontournable qui prouve que la démocratie n'est jamais si bien défendue que par les gaz lacrymogènes et les coups de matraques contre les grévistes. On concèdera, à l'encontre du gentil Poutou, que plus de flics ont été zigouillés depuis un an et demi que de bazanés par la Bac. Après l'attentat terroriste bienvenu du premier tour, les funérailles du « policier pédé » constituent indubitablement un point d'orgue macronien, si j'ose dire ; Macron ayant été soupçonné d'entretenir des liens « pédés » avec le joli PDG de radio-France2, amant du luxe et du lucre.
 
Le discours subséquent de Hollande aura confirmé ses capacités à avoir été le meilleur président des pompes funèbres des cinq républiques. Le ton et la compassion furent adéquatement rythmés à la félicitation de la fonction policière, protectrice du grand patronat comme des bateaux pavés des riches du Touquet. Le policier, dans la nuit de sa vie, n'est plus un raté scolaire mais un ami du peuple, qui le protège, qui se sacrifie pour le sentiment patriotique. Désormais un policier "pédé" a autant droit au respect de la nation qu'un hétéro, comme toute femme sous l'uniforme mourant pour l'impérialisme français au Mali ou en Syrie mérite la fanfare de la République. Magie de l'interdépendance des contraires. Miracle transcendant du transgenre et de la multi-sexualité si on les compare aux honteuses arriérations sunnites et wahhabites. Oubliés les juifs rassemblés sous Pétain dans cette même cour de Préfecture, oubliés les centaines de prolétaires algériens envoyés au casse-pipe en costard un certain mois d'octobre 1961, visages tuméfiés et parqués dans cette cour à gendarmes. Oubliée la chasse policière aux homos des fifties et des sixties jusque dans les chiottes de la Tour Eiffel. 
Oubliée la police qui tabasse et asperge aux gaz lacrymogènes les révoltés contre la loi patronale 49.3 composée par le fiston Hollande, Macron, et dont les cadres en civil de la bac ont enculé un Théo bazané.
 
Voici la démocratie transgenre qui protège la veuve et l'orphelin du terrorisme, qui exhibe le flic de base comme premier exposé dans la tranchée antiterroriste, comme exemple pour ceux qui devront par millions aller défendre démocratie hypocrite ou république pourrie, on ne sait dans quel ordre.
Toute la "classe politique" se congratula au terme de l'enterrement avec flonflons patriotiques du policier lâchement assassiné. Ils étaient tous là les édiles de la compassion. Ils se serraient la main et aurevoir. Les cornemuses des représentants des polices anglo-saxonnes couinaient pendant que Hollande, sur le seuil préfectoral, embrassait la hiérarchie policière. Le policier, cultivé et multilingue, mort dans sa boite couverte de l'oriflamme était heureux, on lui avait agrafé sur sa tombe l'insigne de la légion d'honneur. Grâce à sa bonne étoile.
 
 
 
 
NOTES:

1Je rappelle que pour l'homosexuel moyen, et le facho avéré, le terme pédé est une insulte qui est synonyme de pédophilie, ce que ne sont pas les homosexuels en général. Nonobstant le fait, et mon enfance peut en témoigner au catéchisme, je n'ai pas eu affaire à des curés pédophiles mais j'ai eu la confirmation que, comme les grecs l'avaient vécu, l'attirance entre garçonnets fait partie de notre étape d'évolution vers une sexualité hétéro, s ans compter leur fascination pour le sexe des adultes mâles, et que l'enfant a des perversions inouïes qui pourraient choquer certains adultes. Et conduire d'autres en prison.

2D'où l'efficacité de l'interdépendance des contraires dans le mode de domination idéologique pervers : « L'Invocation du contraste puissant a toujours constitué un instrument de prédilection pour la propagande des politiciens et des dictateurs. « Le national-socialisme ou le chaos bolchevique ? » demandait avec arrogance une affiche nazie, faisant croire par là que seule existait cette alternative et que, pour tous les hommes de bonne volonté, le choix était évident. « Erdäpfel oder Kartoffel ? » (Patates ou pommes de terre?) répondait une petite bande de papier qu'un groupe clandestin colla sur des centaines de ces grandes affiches, déclenchant ainsi une enquête massive de la part de la Gestapo ». (cf. « Changements, paradoxes et psychothérapie, de Watzlawick, ,Weakland, Fish , ed du Seuil 1975). Si l'on suit ces auteurs on pourrait aussi penser que la politique n'est régie depuis des siècles au fond que par la diabolisation de la femme, la mère Le Pen (avec son écharpe dans la cour de la préfecture)devenant ainsi la quintessence d'une mystification multi-séculaire, sans oublier que Cléopâtre a manipulé César et que Eva Braun a peut-être fait d'Hitler son jouet : « L'idéalisation romantique de la femme à l'époque des troubadours, entre le XI e et le XIII e siècle, ainsi que son pendant religieux dans le culte de la vierge marie à partir du XI e siècle, a connu un étrange et terrifiant compagnon de route : l'irruption et l'horrible développement de la chasse aux sorcières. Marie et la sorcière – voilà deux aspects de la féminité qui ne peuvent guère être plus antithétiques et éloignés l'un de l'autre ; ils ne sont pourtant « rien d'autre » qu'un couple des contraires. Plus tard, à l'âge des Lumières, la Vierge a été remplacée par la déesse Raison, qui, à son tour, fût détrônée par le romantisme et la « découverte » de l'inconscient par C.G. Carus » (p.39).

Personne n'y pense, sauf le magnifique Jules Lemaître en 1925,  la pensée de l'émancipation est sortie d'un cerveau malade, d'un névrosé persécuté, le genevois Rousseau : « S'il n'avait pas été persécuté, il ne les (ses pensées) pas écrites (…) Rousseau, par ses Confessions, a véritablement inauguré le genre et l'a, du premier coup, réalisé totalement. Personne ne se confessera plus comme s'est confessé Jean-Jacques » (…) « En littérature, ce que Rousseau a légué aux générations qui l'ont suivi, c'est le romantisme, c'est à dire (au fond et en somme, et quoique bien des poèmes ou livres de romantiques semblent échapper à cette définition) l'individualisme) l'individualisme encore, l'individualisme littéraire, l'étalage du « moi » - et la rêverie inutile et solitaire, et le désir , et l'orgueil, et l'esprit de révolte ; tout cela exprimé, soit de façon direct, soit par des masques transparents auxquels le poète prête son âme (…) Au point où Rousseau l'a porté (surtout dans les Confessions et les Rêveries) cet individualisme littéraire était chose insolite, non connue auparavant, et où l'on pouvait voir un emploi indécent et anormal de la littérature. Car évidemment elle n'a pas été faite pour ça. A l'origine, le poète chante ou récite aux hommes assemblés des histoires, ou des chansons ou des éloges de héros ou des préceptes de morale. Il est clair qu'on ne lui demande pas de confidences intimes. Telles est la littérature primitive et « naturelle », la seule qu'aurait dû admettre Jean-Jacques, prêtre de la nature. Plus tard, après l'invention de l'écriture, après l'imprimerie, on a instinctivement senti qu'il ne convenait d'exposer au public, multipliés par la copie ou par la lettre imprimée, que des pensées, des récits, des images propres à intéresser tout le monde ; qu'il était peu probable que la personne intime et secrète de l'écrivain importât aux autres hommes, et qu'il y aurait du reste, impudeur à l'exprimer publiquement. L'individualisme en littérature, l'antiquité l'a ignoré (sauf dans quelques strophes ou distiques d'élégiaques). Le moyen âge, le XVI e siècle, le XVII e, le XVIII e, jusqu'à Rousseau, ne l'ont presque pas connu ». (…) L'influence de Rousseau s'est exercée sur Goethe, Schiller, Byron ; sur Kant, Fichte, Jacobi, Schleiermacher ; et, avec une évidence éclatante, sur Tolstoï : « J'ai lu Rousseau tout entier... j'avais un culte pour lui ». Marx a été aussi influencé par Rousseau, dans la perspective communiste il n'a jamais défendu cette idée imbécile, stalinienne et doctrinaire, d'individu collectif, mais la redécouverte de l'individu comme être à part entière vivant librement dans la communauté humaine, et non simple pion, esclave ou infernaute. (le néologisme est du moi de moi)
La bourgeoisie décadente a su piller et détourner la naïveté individualiste de Rousseau, et par son double langage perpétuel, psychologique et sentimental (cette sentimentalité démagogique que Marx avait si bien dénoncée dans ses écrits des années 1850) jusqu'à déifier un individualisme crétin, aliéné, où le moindre internaute se sent investi d'écrire ou de rabâcher ce qui lui passe par la tête avec une orthographe ridicule et des insultes à la portée du moindre peigne cul. Il est certain que la communisme supprimera la fonction hiérarchique méprisable de professeur, mais nous lui sommes encore redevables, et avant de contester les enseignants il faudrait sans doute abattre l'Etat bourgeois.

lundi 24 avril 2017

Fin de stabilité gouvernementale: la mise en orbite réussie du banquier Macron





Tu es libre! Tu choisis le banquier ou la raciste!
"La politique du président? La lettre du président? Le président lui-même? Allons donc? Allons donc? Qui diable prend monsieur Bonaparte au sérieux? Croyez-vous monsieur Victor Hugo, que nous vous croyons quand vous nous dîtes que vous croyez au président? Allons donc! Allons- donc!". Marx (Les luttes de classe en France 1848-1850).


Revenant d'un long périple à des centaines de kilomètres de Paris, j'étais surpris de voir tant de véhicules crossover, la voiture des encravatés, foncer aussi vite dans l'après-midi du samedi, veille de l'auscultation électorale. Dans mon quartier, peuple de bobos mélenchoniens je fus également surpris de ne point trouver une place pour me garer, alors que pendant les weekends ils sont tous dans leur résidence secondaire. Je comprenais enfin, la bourgeoisie avait mené de main de maître son suspense électoral au point de réussir à mobiliser furieusement les couches moyennes qui se sont réparties entre Macron et Mélenchon dans un vote qu'ils crurent "utile" pour "faire barrage au FN". L'enseignante retraitée qui me faisait face dans le Fish and Ships m'avait quelques heures avant éclairé sur la conclusion de ce long et déprimant suspense présidentiel: "je suis de gauche depuis toujours mais là j'ai voté Macron pour éviter un second tour Fillon-Le Pen avec le risque d'une victoire finale de l'extrême droite". La messe était dite.
Onction suprême, lundi matin la Bourse faisait un bond de 4%, du jamais vu lors d'un premier tour présidentiel. La Bourse bandant pour un banquier! Bon sang ne saurait mentir! Mais gare à la gueule de bois du prolétariat!

La victoire sous forme de subterfuge du système bourgeois – chantée par Léa Salamé nouvelle prêtresse cathodique: "la partition droite/gauche a éclaté" – est une forme de renouvellement du vieux et même clivage bons/méchants, sauf que le choix est entre droite et extrême droite, un banquier et une "raciste" selon les endeuillés gauchistes 100% gauche ringarde! Il fallait faire avaler à nouveau l'alternance lassante en la refilant sous une autre forme, comme une prétendue recomposition du tableau impressionniste politique français: la bande héréoclite du jeune banquier se revendiquant pourtant d'une pléthore de vieux machins ralliés du dernier moment, auxquels s'ajoutent pêle-mêle les Fillon, Hamon, Dray1, Autain (merde à Méluche), El Khomeri, Taubira la vertueuse et tutti quanti pour "faire barrage au FN".

Mais le "aucune voix ne doit manquer" a tellement cet air de déjà vu en 2002 que la gauche électorale majoritaire (Mélenchon + Hamon auraient été en tête du panel), restée divisée pour machiavéliquement faire jouer quand même une alternance de type droite libérale (aucunement différente de la gauche libérale) est restée sans voix. Il y a loin de cet espèce de structuralisme institutionnel où l'actuel chef de l'Etat et les financiers ont tiré les ficelles (qui a balancé Fillon? Comment Macron a-t-il été si largement financé?). La quasi victoire du petit arriviste eût été impossible surtout, au fond, sans cette ambiance d'état de siège anti-terroriste, dont Marx nous expliquait il y a plus d'un siècle et demi qu'elle permet au gouvernement en place d'être "maître des élections".

Mélenchon, individu imbu de sa personne avait fini par "s'y croire"2. Contrairement à la joie de son principal fan Ruffin, qui dort debout à Amiens – et à la pauvre déclaration de son guru "chacun fera son devoir, ma belle patrie, ma patrie bien-aimée, un matin tout neuf commence à percer" – le mouvement mélenchonien n'était pas un parti, mais une alliance hétéroclite des vieux staliniens qui ruaient contre la personnalisation à outrance, et cela un peu honnêtement pour une fois, plus la noria écolo partagée avec le résidu du PS derrière Hamon, plus des déçus du FN appâtés par l'usage immodéré des termes "ma patrie bien-aimée" par l'ex-soumis de Mitterrand. Pas plus que la droite, le camp de la gauche bourgeoise avec sa masse d'électeurs bobos ne pouvait triompher, cinq ans de Hollande ça suffisait comme ci.
Le score à Mélanchon, non négligeable, n'est qu'une victoire à la Pyrrhus comme naguère la mère Royal. La forfanterie et la personnalisation hologrammique n'aboutissent qu'à l'impasse. Pour se refaire une santé la gauche aurait pu compter sur les syndicats, mais las, comme en 2002 ils vont tous appeler à faire barrage au "fâchisme", mais en faveur d'un banquier pro-américain, dont la directrice de campagne n'était autre que la rugueuse Haïm, accréditée journaliste newyorkaise, ex- fan de la famille Busch. Les électeurs sauveurs de la République face à Hitler avec une perruque et sans moustache, auront intronisé l'inventeur du 49.3 et des stupides et dangereux cars à bas coût. La gauche politique subit sa deuxième défaite après la défaite de la gauche syndicale face à l'ubérisation et à la flexibilité mises en place par les Hollande et Macron. La décrédibilisation de Fillon a donc bien fonctionné, mais comme Hamon il est fustigé comme le responsable de sa défaite, et cela n'empêchera pas les chaises musicales lors de la nouvelle louche électorale législative qu'on va nous resservir par après, avec en perspective le retour à la quatrième République.

La bourgeoisie a réussi son pari au court terme, mais elle estaffaiblie dans son ensemble par le choix d'un Bonaparte de bric et de broc, même pas général et plutôt fils à maman (ce qui explique son succès dans les maisons gériatriques). La clintonisation avec paillettes du gamin Macron si peu viril – il eût l'air pitoyable lorsqu'il en référa à sa "maman" sans qui il ne serait rien! - quand les journaputes ne cessèrent de nous signaler de successifs ralliements "de poids", était un foutage de gueule. Qu'est-ce que ça peut nous foutre que Machin ou tel chanteur de variété supporte un encravaté "en marche" vers le poste de potiche de la finance et des armées? Que la moitié des ministres de Hollande le rejoignent... Que Obama lui ait téléphoné... Que finalement la plupart des candidats battus le soutiennent dans le dernier ballet des voitures noires... Sous le sourire emprunté du petit Macron, qui va déchanter sous une paire de mois face à une "opinion" colérique, perce la chute de la réputation de la fonction présidentielle: les moutons "démocratiques" et manipulés élisent n'importe qui; la dégringolade s'était accentuée avec Sarkozy et Hollande. On va en voir le terme dans la transparence du petit encravaté. La gauche déconfite a de la chance que Fillon ne soit pas passé, elle aurait eu plus de mal à jour sa fonction d'opposition dans une lutte sociale avivée par un programme brutal; mais le flou de la gestion à venir de Macron, s'il peut éviter de premiers affrontements émeutiers3, n'empêchera pas des confrontations sociales bien plus importantes qu'un président anormal puis un autre normal surent tout de même juguler.

LE "BLOC PROGRESSISTE" DECONFI

Les plus "radicaux", Mélenchon et Poutou (qui fût assez bon voire le meilleur sur les plateaux malgré la grosse Bertha écolo qui lui intimait de voter pour le banquier), ne purent que se réfugier dans l'attitude abstentionniste. Poutou clairement appelant à refuser ce faux choix du deuxième tour, Mélenchon, plus coincé appelant chacun "à prendre ses responsabilités" pour le matin gris de mai.

L'abstention devient ainsi partie du jeu électoral pour ce cartel de partis de gauche déchue s'il veulent garder un semblant de crédibilité pour continue r) prétendre parler au nom de la "population" (Poutou) et de notre "chère patrie" (Mélenchon). Cette abstention ne dérange pas la bourgeoisie, qui s'est plus fait peur en craignant que Le Pen ne soit pas au second tour – ne nous avait-on pas assuré que Marine la radoucie allait planer dans les 30%? - aucun média ne nous informe sur une abstention ce coup-ci plus importante qu'aux élections similaires antérieures, et ils se fichent de celle qui apparaîtra au second tour tellement l'infrapolitique "faire barrage à" gonfle d'importance l'électeur bobo de base. 2002 une tragédie? 2017 une farce? Comme disait notre grand penseur prolétarien du dix-neuvième.

L'abstention prônée par dépit des Poutou et Mélenchon est plus alignée sur le dégoût des milieux prolétaires français comme dans les banlieues "diversifiées"- où le dimanche électoral est passé inaperçu comme je l'ai constaté à Pierrefitte et Grolay - que véritable dénonciation de la supercherie électorale basée sur un fric énorme dont on ne sait la provenance, quoique en grande partie de l'Etat lui-même; traversant divers petits bleds j'étais effaré d'imaginer des milliers, de voir ces tonnes d'affiches des neuf potiches collées devant chaque mairie ou école, période faste pour les imprimeurs! Sans oublier des meetings géants multiples et répétés qui on en effet irradié et favorisé la soumission électorale à de minables bateleurs d'estrade sans réel projet de société alternative, dans un ordre immuable respecté de bout en bout qui octroya nirvana et satisfecit aux sondagiers, redevenus les grands manipulateurs incontournables de "l'opinion".

La bourgeoisie a gagné la guerre électorale mais ouvert en même temps une période d'instabilité. Ce n'est pas la première fois que le suffrage universel anéantit l'autorité et menace de faire de l'anarchie l'autorité (Marx) mais en se drapant dans la "légitimité populaire", et avec la nécessité de continuer à dépouiller le prolétariat de toute garantie sociale et salariale, le prochain gouvernement, de coalition ou de cohabitation, devrait persister à dévier l'attention de la lutte de la classe opprimée face au dehors, "l'invasion", le retour effrayant des djihadistes, l'exaltation de "l'union patriotique" comme préparation à la guerre, seule échappatoire et seul exutoire pour "redonner de la compétitivité à la France", avec une nouvelle politique, la même, un nouveau personnel politique, les mêmes.



NOTES:

1L'argumentaire de Dray peut obtenir la palme de l'argutie perverse: "ma famille politique a été prise en otage par Fillon" et "le débat démocratique n'a pas pu avoir lieu à cause des affaires". Vous connaissez l'histoire de la grenouille qui se voyait plus grosse que le boeuf? La même perversion éjaculait tous les jours dans les colonnes de Libé-Rothschild, en particulier contre le machisme supposé de Fillon évoquant la grossesse de Léa Salamé, une démonstration féminosto-débile s'étalait dans un long article. Heureusement qu'une Elisabeth Lévy a déconstruit cette bêtise crasse qui caractérise l'infantilisme anorexique du gauchisme où un sentimentalisme répugnant tient lieu de raisonnement politique, tout en soutenant l'orientation voulue par la gauche encore au pouvoir et les lobbies financiers, pirates en vigies. Le Monde confirma que Fillon avait rendu les vrais costumes, mais les coups redoublés avaient porté par la masse des petits bourgeois, si naïfs en politique, ulcérée que ce voleur ait "trop piqué dans la caisse"! Défaite morale pour la droite, a semblé regretter Dati, trop heureuse de la déconfiture fillonesque.

2Moins utopiste radical que les Hamon et Poutou, le programme de Mélanchon, bouillie de promesses et de garanties intenables, révèle le doctrinaire impuissant si bien décrit aussi par Marx: "Ainsi donc, pendant que l'utopie, le socialisme doctrinaire qui subordonne l'ensemble du mouvement à un de ses moments, qui met à la place de la production commune, sociale, l'activité cérébrale du pédant individuel et dont la fantaisie supprime la lutte révolutionnaire des classes avec ses nécessités au moyen de petits artifices ou de grosses sentimentalités, pendant que ce socialisme doctrinaire qui se borne au fond à idéaliser la société actuelle, à en reproduire une image sans aucune ombre et qui veut faire triompher son idéal contre la réalité sociale, alors que le prolétariat laisse ce socialisme à la petite bourgeoisie, alors que la lutte entre les différents systèmes entre eux fait ressortir chacun des prétendus systèmes comme le maintien prétentieux d'un des points de transition du bouleversement social contre l'autre point, le prolétariat se groupe de plus en plus autour du socialisme révolutionnaire, autour du communisme pour lequel la bourgeoisie elle-même a inventé le nom de Blanqui

3Quelques agités gauchistes ont commencé à se ridiculiser à nouveau en jouant à l'émeute parisienne "antidémocratique" comme disent les journaputes. L'émeute est tout pour les nanars sauf une lutte de classe indépendante mais toujours favorable aux gouvernements bourgeois comme Marx l'explique si bien dans "Les luttes de classes en France": "Méprisé par ses ennemis, maltraité et journellement humilié par ses prétendus amis, le gouvernement ne voyait qu'un moyen de sortir de sa situation répugnante et insupportable: l'émeute. Une émeute à Paris aurait permis de proclamer l'état de siège dans la capitale et dans les départements et d'être ainsi maître des élections" . Il ajoute plus loin: "Le prolétariat ne se laissait provoquer à aucune émeute parce qu'il était sur le point de faire une révolution".