PAGES PROLETARIENNES

jeudi 26 janvier 2017

La petite bourgeoisie ne veut pas tomber dans le prolétariat


Salafiste serviable et bobo en terrasse
La mixité compartimentée des bobos multiculturels et la classe ouvrière imputrescible

« Même au moment où il n'y a pas une lutte de classes déclarée, il y a lutte de classes latente, par le fait que, dans une hiérarchie il faut que les rangs les plus élevés maintiennent leur position... ». Maurice Halbwachs (cité par Louis Chauvel, p.156)
On ne m'enlèvera pas de la tête l'idée que les sociologues les plus dérangeants se gardent d'en référer aux sources de leur radicalité1, masquant ce qu'ils doivent aux tréfonds, méconnus du public,
du maximalisme ; Michéa n'en a pas tout assimilé et se gargarise avec des notions confusément libérales comme « le peuple », Clouscard et Lasch, comme Guilluy, ignorent la notion de prolétariat, et compatissent accessoirement à un milieu rural irrécupérable2. Sauf que nous les maximalistes n'avons pas besoin de savantes analyses sociologiques ni de grèves à répétition (qui ne sont jamais des hydres de révolution contrairement à ce qu'en disait Lénine) pour affirmer l'existence, la force et l'importance du prolétariat, il suffit de noter les chiffres du taux de profit mondial, et qu'il constitue la moitié de l'humanité. La classe ouvrière ne meurt jamais.

En tout cas ces auteurs, considérés comme iconoclastes, peuvent faire impression à celui qui les découvre pour la première fois. Pourquoi ? Parce qu'ils prennent la pose, la pose de l'auteur qui SAIT, qui combat le monde entier, la pose du chef de parti, même sans parti, même sans avoir été chef ni sous-chef de parti. Mieux encore, l'auteur radical oublie de mentionner qu'il lit en cachette des écrits révolutionnaires sans lesquels il n'aurait pas osé mettre en cause telle ou telle doxa dominante. J'excepterai quelques vrais géographes et des statisticiens qui, comme Michèle Tribalat, avec une démarche rigoureuse, de type scientifique, sont amenés à traiter sur des données brutes, non maquillées, sur la composition des populations, ethnicité et classes sociales, et qui sont donc amenés, forcément, à confirmer le fond de l'argumentation marxiste du maximalisme face aux fables du « vivre ensemble » et de la « paix armée » entre catégories sociologiques illogiques.

Guilluy, qui lance son pavé « Le crépuscule de la France d'en haut » (chez Flammarion) – 3 le patronat, ils occupent les emplois des secteurs stratégiques du CAC 40 ; pourfendeurs de l'idéologie dominante, ils fabriquent l'essentiel du discours médiatique et culturels... ». Il y adéjà un hic, ils ne pourfendent pas l'idéologie dominante, ils sont celle-ci !
lamentation pour une France « périphérique » et non pas dénonciation de la dissolution programmée de la classe ouvrière - espérait bien en faire un best-seller, tout en étant sagement réformiste dans ses conclusions finales. Mais, prenons-le en cours de route. Il nous dit que la bourgeoisie : « … a compris que la défense de ses intérêts ne passait pas par la lutte des classes, mais au contraire par le brouillage des classes » (p.26). Mais ce constat n'est pas une nouveauté. Voyons-en plutôt la spécificité de cette bourgeoisie soi-disant « antithèse de celle d'hier ». Paris est la ville bobo par excellente et la première fédération du PS, avec 40% de cadres : « Contestataires de salon de l'économie mondialisée, les bobos parisiens occupent la partie haute de l'échelle des salaires ; contre (tout contre)

L'auteur utilise une technique un peu facile de généralisation pour scandaliser, en opposant l'enrichissement des cadres supérieurs à la baisse du niveau de vie des employés et des ouvriers, alors qu'un autre auteur, Louis Chauvel, explique qu'une partie des cadres est aussi touchée par la paupérisation. Mais il ne faut jamais trop plaindre les cadres en général, ils disposent en général de pensions de retraite presque trois fois supérieures à celles des ouvriers. Guilluy ne nous explique pas que sans « encadrement » qui ferait marcher l'exploitation de l'homme par l'homme ?
Par contre il tape juste sur la bien-pensance néo-chrétienne de l'élite dominante – tolérante, bienveillante et altruiste- pour « les plus faibles » - comprenez non pas les ouvriers mais les immigrés : « cette compassion (…) est d'autant plus facile qu'elle s'adresse le plus souvent à des catégories populaires immigrées où le rapport de classes est court-circuité par les différences culturelles des catégories populaires immigrées qui ne remettent pas en question la domination sociale de la nouvelle bourgeoisie ».
Comme géographe Guilluy met en évidence l'hypocrisie de la gentrification, un parc de logements au centre ville pour ceux qui « ont les moyens », et un parc de logements réservé aux flux migratoires d'où sont exclues ce qu'il appelle les « classes populaires traditionnelles » (euphémisme qui lui évite de nommer le prolétariat). Le constat est percutant de vérité sur le clivage introduit par la bourgeoisie grande et petit bobo néanmoins : « La ville mondialisée a besoin de catégories supérieures qualifiées et d'exploiter à la marge des catégories populaires immigrées, voilà tout ». Il ne précise pas qu'il y a encore suffisamment d'immeubles vétustes au centre des villes qui comptent, pour y loger la nounou noire et la bonne arabe, sans qu'elles soient toujours reléguées à la Courneuve ou à Bagneux : « Les immigrés dans le parc très social de banlieues, les key-workers dans le parc social intermédiaire de la ville-centre : la bourgeoisie libérale des métropoles sait se faire étatiste quand ses intérêts sont en jeu »4.

Au niveau de l'expression politique publique, l'effacement de la classe ouvrière est ...criant : un baromètre de la « diversité » du CSA a noté que 57% des cadres supérieurs parlent à la télé contre 2% des ouvriers, sans préciser que les ouvriers sont convoqués dans les émissions les plus débiles. Bah tout le monde a fini par le savoir comme le fait que tous les médias sont contrôlés par les banques et le lobby de l'armement dans le cadre de « l'entre-soi médiatique ». Le pire est que l'auteur comme les médias pense que la seule vengeance contre cet abrutissement serait le refuge électoral dans les bras de la mère Le Pen et pas demain dans une guerre civile sanglante !

Guilluy n'est ni dialectique ni connaisseur de la logique orwellienne, c'est pourquoi il est inapte à comprendre que le discours de l'intelligentsia universitaro-médiatique se lamentant de la montée de la xénophobie (et défendant pas exemple le ridicule burkini) est le principal pourvoyeur (fourvoyeur) de cette même xénophobie avec cette compassion envers les immigrés « en général » soupçonnés de se complaire dans leur misère sociale et religieuse, tout comme de produire le djihadisme impérialiste.
A force de pointer du doigt le bobo moyen, il oublie d'analyser qu'il n'est qu'un sous-produit lui aussi de la grande bourgeoisie, ce quadra du NPA, qui a déménagé d'un quartier isalmisé, qui habite les beaux quartiers et qui place ses enfants en école privée !
Le représentant de la mondialisation heureuse, des banques et de la surexploitation des ouvriers, l'encravaté Macron a eu le courage d'affirmer la conviction renversante du gauchiste de base : « L'arrivée de réfugiés est une opportunité économique. Et tant pis si la mesure n'est pas populaire »5. Quelle lâcheté en fait !

Guilluy peut nous éclairer sur la nouveauté de cette immigration rêvée par le patronat et les grandes fortunes : « L'immigration permet de répondre aux besoins du marché de l'emploi peu ou pas qualifié des métropoles, mais aussi de contrôler la masse salariale d'une main-d'oeuvre bon marché et peu syndiquée. Bref un système d'exploitation classique de l'immigration qui repose sur la permanence des flux ». Non, faux, pas classique. Il s'agit surtout d'une immigration de guerre qui, à la fois, sert à faire passer « nos » guerres par perte et profit, mais aussi à répandre une religion de soumission et de repli sur soi, laquelle religion, l'islam pour ne pas la nommer, est très prégnante comme on le voit et ne pose aucin problème aux dominants dans leurs cages dorées. Guilluy s'aligne lui aussi sur les sondages fabriqués, avec questions orientées, où est demandé s'il y a trop d'étrangers en France – ce dont on se fout – et non pas trop d'arrivées musulmanes, certes « exploitées » ; car, comme il le note lui-même plus loin, la haute bourgeoisie a besoin de l'aliénation musulmane : « Une exploitation rendue invisible grâce à la mise en avant de la thématique de l'altérité culturelle qui vient opportunément se subtituer à un rapport de classes plus difficile à assumer » (p.76)6.
On disserte un peu beaucoup sur la baisse du nombre des grèves, mais pas autant sur le nouvel engagement militant des bobos, la pétition, le clic ou le like d'une « gauche hashtag », sorte de « gentrification des luttes sociales ». Et Guilluy d'en référer au super-bobo François Ruffin des fameuses nuits à dormir debout de la petite bourgeoisie parisienne... d'où la classe ouvrière (française et immigrée) a été justement absente ! Il eût été beaucoup plus efficace d'expliquer la mort du gauchisme et de dénoncer le réformisme radical creux de la bande à Hamon.

Incapable de nommer la principale classe exploitée par son nom, Guilluy continue à brasser des « classes populaires », mais ce qu'il note là est très vrai, toujours dans la lignée de l'effacement de la principale classe révolutionnaire, réduite à cette misère nommée « assistanat » : « Tout se passe comme si on avait déjà acté qu'en milieu populaire (sic) désormais la figure du « travailleur » laissait place à celle de l' « assisté ». Dans ce modèle inégalitaire, les classes supérieures produisent et profitent des richesses, les classes populaires (resic) consomment (un peu), tendent la main et finissent par perdre leur autonomie » (p.115).

Ne voyez là nullement la complainte outragée d'un communiste maximaliste. Guilluy est un néo-souverainiste, désolé du gâtisme de Chevènement : « Le rouleau compresseur de la mondialisation, les abandons successifs de souveraineté et le choix de l'immigration par le grand patronat ont mis fin au modèle assimilationniste républicain ». Qu'on le déplore ou qu'on le pérore !

Le capitalisme financier et multiculturaliste n'est certes pas avare de contradictions – Cameron et Merkel ayant reconnu que la multiculturalisme était un échec - « c'était avant que le patronat allemand exige l'arrivée d'un million de migrants en 2015 » (p.121)7. Guilluy ne voit pas que le marketing ethno-culturel américain ne prend pas, non à cause, de Le Pen, mais à cause de l'exploitation des prolétaires par la gauche caviar et ses succédanés gauchistes. Il y a incontestablement une désaffection de la classe ouvrière (française et de souche immigrée issue de la guerre d'Algérie) vis à vis des élites dites socialistes et du gauchisme syndical en général. Lui aussi, en tant que manager sociologique ne voit pas ni ne connaît « l'opinion » en milieu ouvrier sur la question du racisme. Il saisit en partie que l'idéologie bisounours antiraciste sert à contrer « moralement » toute remise en cause du capitalisme « tolérant » à l'égard des « minorités » (mais pas des classes), « échangiste » et « multiculurel », mais seulement sur les plateaux de télévision où règne la discussion de comptoir entre journaputes.

Guilluy, sans référence ni tradition historique prolétarienne, ne sait pas que la concentration urbaine de la classe ouvrière a toujours été un bain pour sa conscience de classe, et que de fait la bigarure multiculturaliste a pour but de détruire toute notion d'internationalisme dans la cité, en expulsant les « en trop », les « relégués », les divers « exclus » vers les zones à faible densité urbaine toujours représentatives du « désert français » face à Paris (cf. Lessing) et de l'emprise de la calotte et du pouvoir paternaliste patronal et syndical. Il sait par contre quel est l'épouvantail agité par Big Brother média (qui est confondu par les bobos désormais avec le méchant Trump) pour protéger l'ordre bourgeois.

Pour cacher qu'il a découvert la critique de l'antifascisme de salon du pouvoir et de ses gauchistes résiduels dans le milieu ultra-gauche, dit tel en tout cas, Guilluy en réfère à Pasolini qui disait, fort justement d'ailleurs, à propos d'une gauche qui abandonnait la question sociale : « il s'agit de mettre en scène un antifascisme facile qui a pour objet un fascisme archaïque qui n'existe plus et n'existera plus jamais » (p.172). Je ne résiste pas à citer la suite pour mes lecteurs gauchistes et trotskiens voyeurs :
« C'est d'ailleurs en 1983, au moment où la gauche française initie son virage libéral, abandonne les classes populaires (resic) et la question sociale, qu'elle lance son grand mouvement de résistance au fascisme qui vient. Lionel Jospin reconnaîtra plus tard que cette « lutte antifasciste en France n'a été que du théâtre » et même que « le Front national n'a jamais été un parti fasciste ». Ce n'est pas un hasard si les instigateurs et financeurs de l'antiracisme et de l'antifascisme sont aussi des représentants du modèle mondialisé (…) du medef aux entreprises du CAC 40, de Hollywood à Canal Plus, l'ensemble de la classe dominante se lance dans la résistance de salon. « No Pasaran » devient le cri de ralliement des classes dominantes, économiques ou intellectuelles, de gauche comme de droite (…) les groupes « antifa » (…) recrutent essentiellement des jeunes diplômés de la bourgeoisie » (p.173)8.

LE DESIR DE REVOLUTION N'EST PAS ETERNEL MAIS IL N'EST PAS MORT

Si près de 80% de ces salauds de cadres et les vieux machins de plus de 65 ans croient que le régime démocratique est irremplaçable et le meilleur système possible, près de 40% des jeunes, des ouvriers et des employés considèrent que « d'autres systèmes politiques peuvent être aussi bons que la démocratie » (p.200).
Guilluy a raison de conclure qu'on assiste bien plus à une mondialisation de la sédentarisation qu'au nomadisme à la con d'Attali, que la mobilité pour tous est un mythe sauf pour les bourgeois sur les tarmacs.

Louis Chauvel, avec « La spirale du déclassement, essai sur la société des illusions » (Seuil), fournit un travail plus scientifique et donne des annotations pertinentes sur l'état du prolétariat. Mais la lecture est aride au milieu de plus nombreux graphiques que chez Guilluy. Il faut parvenir à la page
164 pour trouver une réflexion sur l'amenuisement des grèves à partir des années 2000 :
« Dans les années 1970, 2 millions de journées de travail ont été consacrées à la grève, contre seulement 75000 au début des années 2010, moins qu'au début du XX e siècle. Ces écarts sont considérables et signifient une baisse de vingt à un de ce type d'action collective depuis la période qui suit immédiatement les événements de 1968 ».
Chauvel écarte d'emblée ceux qui ont abandonné le prolétariat et la causalité du chômage de masse, tout comme une lutte supplétive à travers les blogs. Il souligne plutôt deux causes : l'institutionalisation des syndicats (dont les théoriciens s'appuient d'ailleurs sur l'usine à mystification de la gauche caviar (terra nova) et les intellos négateurs de la classe ouvrière, mais sans le dire ouvertement) et la non transmission du savoir militant par la génération de 68 :
« Plus vraisemblablement , l'institutionnalisation des syndicats les a orienté vers un rôle d'agence de négociation et de cogestion des carrières et des ressources plus que de coordination des luttes.
L'aspect générationnel est peut-être aussi important : une génération mobilisée a disparu sans transmettre le savoir-faire organisationnel de la conflictualité sociale alors même qu'elle hésite à saisir le contexte nouveau vécu par les générations suivantes et leurs enjeux ».
Je ne suis pas d'accord avec des deux affirmations, d'abord parce que les syndicats sont devenus des collabos de l'Etat bourgeois depuis plus d'un demi-siècle, et ensuite que la transmission du militantisme syndical réformiste comme révolutionnaire se fait toujours même à petite dose. Mais nos sociologues raisonnent toujours à courte vue sur l'hexagone comme si les événements du monde n'influaient guère sur l'interne « conflictualité sociale ». Chauvel passe à côté de l'explication majeure de la chute du muer de Berlin et, hors d'une compréhension du développement de la conscience de classe ; il l'avoue d'ailleurs quelques lignes plus loin : « ...les aspects subjectifs des classes sociales (culture ouvrière, comportement politique et syndical, conscience de classe, identité collective, mouvement social, etc.) demeure un mystère des sciences sociales ».

Chauvel fait parfois des remarques très justes, sans jamais se placer au niveau historique international non plus, différenciant par exemple le petit nombre de grèves très gentiment réformistes de nos jours comparé à des grèves d'une autre envergure dans les années 1930 où, derrière la grève d'époque il y avait en effet l'hydre de la révolution (qui pourtant venait d'échouer en Allemagne comme en Russie) : « Il est vrai que celle-ci (la lutte des classes) a culminé dans les années 1930, l'enjeu était moins la mobilisation de rue et la grève, même générale, que celui de la prise du pouvoir par un parti communiste versant dans la clandestinité et l'organisation secrète. L'indicateur même de participation aux grèves peut réduire la visibilité de l'action de classe (TB » (p.168). La conscience de classe a eu la vie dure : « A partir des trente glorieuses et de l'édification d'un système social-démocrate, les inégalités ont été fortement régulées sans que la conscience de classe se soit dissoute pour autant ». Si le tournant des années 1979 a déjà vu s'atténuer la mobilisation sociale, et que le rêve de la société sans classes s'est éloigné selon Chauvel, il a conclu que le discours égalitariste n'aurait plus d'effet à une époque de creusement d'inégalités plus fortes que jamais. Bizarre ! Car il exprime le contraire quelques lignes plus loin : les dernières décennies montrent « un contenu et des contours plus stables des classes sociales » !

LA GRANDE « ANOMIE » IDENTITAIRE

En reprenant ce terme de la langue de bois des sociologues Chauvel veut traiter de la crise d'identité si étalée partout comme concept justifiant la confusion capitaliste. Reprenant les termes flous de « classes moyennes », il envisage que la petite bourgeoisie soit amenée « à partager le sort de ce qui reste de la classe ouvrière » laquelle est « à peine au-dessus d'une classe de post-travailleurs – ce qu'en anglais nous pourrions appeler post-working class, constituée d'individus a priori atomisés, spécialement subventionnés pour se tenir hors de la sphère de l'emploi ». Suit cette curieuse analyse d'une non-classe (certainement les subventionnés universel de Hamon coupés de toute conscience et responsabilité de classe) avec des individus rêvant d'une révolution hors classe dont ils seraient les prochains meneurs : « Cette position sociale située en dehors du sens collectif offert par la participation à la production collective étant intolérable à la majorité des individus, au long terme, les personnes dans cette non-position sociale s'inventent nécessairement d'autres supports identitaires, en se constituant l'idéologie d'une révolution spécifique dont ils pourraient se sentir les nouveaux leaders ». (p.173)
Chauvel croit identifier donc une forme idéologique spéciale d'accompagnement de l'effondrement économique du système capitaliste par un « post-prolétariat » « pour qui les néomarxismes en vogue dans les classes moyennes intellectuelles pourraient ne pas avoir les mêmes attraits ». Dans son langage peu clair et heurté de sociologue Chauvel s'avoue inquiet, sans taxer ni de populisme ni de fascisme ce nouveau « post-prolétariat assisté » dans un monde où la coupure avec les élites (bourgeoises) est béante, dans un « ensemble civilisationnel où le tiers-monde côtoie à quelques kilomètres de distance, parfois moins, les zones les plus privilégiées de la planète ». Il ne voit une restructuration des classes que dans une ou deux générations et le remplacement du support identitaire de classe par les substrats religieux plus que par le « marxisme occidental ». Il est très pessimiste : « La constitution d'un noyau d'exclusion , d'un précariat diplômé, et la diffusion de nouvelles approches religieuses de la question sociale sont de nature à désagréger ce qui reste de l'héritage idéologique populaire (sic) et solidaire de la Reconstruction ».
A part comparer avec la décadence de l'Empire romain et noter « les risques s'accumulent mais l'apocalypse promise tarde », notre sociologue pas plus que son compère Guilluy n'a de cheminement politique révolutionnaire à indiquer, il espère tout au plus au final une jeunesse capable de « travailler par elle-même ».



NOTES


1Les Philippe Murray, Michel Clouscard, Hervé Algalarrondo, Christopher Lasch, Jean-Claude Michéa, l'ex NPA Robin (et sa reprise de l'expression « la gauche du capital » au courant maximaliste de la Gauche communiste) ; Bourdieu et Jacques Julliard ont des fulgurances presque marxistes, Julliard restant toutefois un bon démocrate jacobin... Géographes comme Guilluy et démographes statisticiens comme Michèle Tribalat par leurs analyses méthodologiques arrivent à peu près aux mêmes conclusions que les révolutionnaires maximalistes concernant la répartition des classes sociales, leurs confrontations et de cette plaie : la petite bourgeoise (même si elle est qualifiée à tort de « couches moyennes »).

2Les limites de Guilluy sont visibles dès son apologie des gougnafiers et poujadistes « bonnets rouges ».
3Selon le mot de Sacha Guitry.
4Les key-workers sont les agents de service public nécessaires à l'ordre bourgeois de proximité et de soin : flics, infirmières, instituteurs... qui peuvent bénéficier de logements de proximité en priorité.
5Page 73. Vu les états de service de Macron chez Rothschild et son train de vie, on comprend son besoin de personnel de service...
6Avec une belle image : « Ainsi, quand un bobo achète les services d'une nounou africaine, cette « exploitation traditionnelle du prolétariat » sera habillée d' « interculturalité ». Sans noter que nombre de vedettes du cinéma, journalistes ou richissimes « hommes de gauche » sont passés au tribunal pour surexploitation ou sévices sur femme de peine...
7Lire aussi pour le comique de la cohabitation des bobos émancipés mais cannabissophiles compartimentés avec les barbus en pyjamas : Géraldine Smith « rue jean pierre timbaud » stock 2016
8Et d'autres bonnes formules qui clouent au pilori des imbéciles utiles du système comme Coleman et ses amis communisateurs : « ce n'est pas le FN qui influence les classes populaires, mais l'inverse »). OU mieux pour la lutte qui est la nôtre POUR le communisme : « Si elle (la bourgeoisie) perd la guerre des représentations, la classe dominante est nue » p.175). « Le « théâtre de la lutte anti-fasciste » se joue devant des salles vides ». « La quincaillerie « révolutionnaire » proposée par les tenants d'une petite bourgeoisie n'attire plus personne, surtout pas dans les milieux où l'urgence est de boucler les fins de mois » (p.195). Cependant, comme je l'ai constaté, dans les médiathèques de la gauche au pouvoir dans les municipalités de banlieue tout ce qui n'a pas le label anti-fasciste part à la poubelle, ainsi les mémoires de Wagner et de Cosima son épouse et divers ouvrages de penseurs considérés comme off... un nouvel autodafé à la Hitler...démocrate multiculturaliste !