PAGES PROLETARIENNES

vendredi 25 mai 2012

TRACT DE KLASBATALO SUR LE MOUVEMENT ETUDIANT AU CANADA


Pour en finir avec le réformisme étudiant ! Vers une solution révolutionnaire

Dernière heure  24 mai 2012

Depuis le début de la grève étudiante en février dernier, il y a eu plus de 270 manifestations dont au moins 80 ont été déclarées illégale. Depuis 30 jours, des manifestations ont eu lieu tous les soirs contre la hausse des frais de scolarité à Montréal et depuis quelques jours à Québec et Sherbrooke. Depuis le vendredi 18 mai, des prolétaires, des étudiants, des parents et des enseignants vont manifester non seulement contre la hausse des frais de scolarité mais contre la loi 78 qui met de sévères restrictions aux manifestations et au piquetage des grévistes étudiants devant les cégeps et universités. Le 22 mai, une manifestation de 300 000 personnes a eu lieu à Montréal. Rappelons que depuis le début de la grève étudiante en février, il y a eu  2700 arrestations. Durant la nuit du 24 mai, la police a encerclé des manifestants et séquestré 518 personnes qui ont passé la nuit menotté dans des autobus. À Québec, 170 personnes ont aussi été arrêté. Le nombre d’arrêtés dans d’autres villes nous ait inconnu pour le moment. Un étudiant et trois étudiantes qui ont placé des bombes fumigènes non-toxique dans le métro le 10 mai, sont accusé en vertu d'une loi anti-terroriste votée en 2001. Depuis le début de la grève, il y a eu des vitrines brisées de grandes entreprises comme les banque mais jamais il n’y a eu de vol. La mobilisation des étudiants se maintient toujours et de plus en plus de prolétaires se joignent aux manifestations légales ou illégales dans plusieurs villes du Québec. Des manifestations de soutien ont  eu lieu à Ottawa, Toronto, Paris, Cannes et New-York.


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Retour sur l’appel du premier ministre du Québec, Charest aux grandes centrales syndicales.
Quand le chat sort du sac où quand l‘État sort de son sac, ses chats
Il est très intéressant d’étudier le comportement des syndicats lors de la négociation étudiante  avec l’État.

Charest connaît bien ses alliés. C’est pour cela qu’il a invité les dirigeants syndicaux : Arsenault de la FTQ, Parent de la CSQ et Roy de la CSN.
Selon Michel Arsenault, qui a expliqué aux négociateurs syndicaux étudiants «  que négocier, c'est concéder. Ça prend un rapport de force que tu puises dans la mobilisation. J'appelle ça: monter le chat dans le poteau… »
La mobilisation des syndicats, on connaît ça très bien, c’est mobiliser de façon divisée, secteur par secteur, usine par usine autrement dit un chat à la fois et chacun sur son poteau. Comment se fait la montée du chat ? par des pressions plus ou moins inutiles sur des députés, par des grèvettes d’une journée ou deux comme c’est le cas lors des négociations dans le secteur public. Dans le secteur privé c’est laisser les prolétaires seuls comme ce fut le cas à Shell ou au Journal de Montréal. Ailleurs dans le monde, les syndicats font la même chose.

Le but des trois chefs appelés à la rescousse par Charest était de convaincre les leaders syndicaux étudiants d’être capable de redescendre le chat du poteau selon Arsenault. En plus d’accepter des négociations secrètes ce qui au départ fait toujours le jeu des patrons, les leaders étudiants abandonnaient la lutte contre la hausse des frais de scolarité.
Très conscients que les leaders étudiants avaient fait un recul énorme, les trois dirigeants se sont exclamés suite aux vérités lancées par Charest et par la ministre Beauchamp (qui a démissionné) qui se sont vantés de  n’avoir cédé pas devant les étudiants.
Arsenault : «Quand tu attrapes un gros poisson et qu'une personne te demande où tu l'as pêché, tu réponds: dans le lac, ferme ta yeule. C'est la même chose au lendemain d'une négo, l'employeur se tait jusqu'à la fin du vote. C'est pas compliqué, tu fermes ta yeule!» 
Le gros poisson attrapé... les étudiants, Charest et les syndicats pensaient que les étudiants seraient dupes mais ils ont rejeté massivement "l'offre" de l'État malgré que les chefs étudiants aient eu une attitude neutre.
Et Parent : « C'était une comédie d'erreurs. J'avais l'impression que Charest avait pris un fusil et avait tiré dans sa chaloupe. C'est comme s'il avait dit aux étudiants: "On vous a fourrés et on est bien contents."» Et Parent plus hypocrite encore que Charest, il ne fallait pas le dire.

Voilà le rôle des syndicats de combat ou non : servir d’éteignoirs des luttes en les isolant et en montrant au patronat et à l’État comment fourrer les travailleurs et les étudiants. À part des discours pour endormir, les syndicats n’ont fait aucune grève de solidarité avec le mouvement étudiant. Il faut dire que les syndicats étudiants sont de bons élèves de leurs grands frères en continuant à isoler le mouvement étudiant des revendications historiques de la classe ouvrière.
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Tract distribué lors de plusieurs manifestations étudiantes.

La crise économique fait ses ravages aux quatre coins de la planète. La bourgeoisie mondiale tente évidemment d’instaurer des plans d’austérité afin de tenter de rétablir ses taux de profits et ainsi réactiver l’accumulation du capital. Ces plans crasseux sont voués à l’échec tellement le capitalisme est aujourd’hui en complète décrépitude. Mais la bourgeoisie reste toujours maîtresse absolue de la société, tant au niveau social que politique, et se débat violemment pour maintenir sa domination. Les plans d’austérité, souvent dernier souffle de la bourgeoisie, créent un processus intense de paupérisation chez de nombreuses couches sociales. Le prolétariat voit ses conditions de travail et de vie se dégrader et ses salaires stagner, sinon diminuer. La petite-bourgeoisie est flouée et les couches moyennes se voient nettement se prolétariser. C’est cet effet de paupérisation au niveau international qui est à la base des divers mouvements des indignés de la Tunisie à l’Espagne en passant par Montréal. Cependant, dans les divers mouvements des indignées, ce sont les couches moyennes et la petite-bourgeoisie qui mènent le bal politiquement, ce qui explique leurs revendications illusoires : la gauche caviar (genre Québec Solidaire) nous ressasse invariablement son « capitalisme à visage humain », comme si le problème n’était que la « finance amorale » et non pas le capitalisme comme tel.

Les étudiants sont aussi du lot des victimes des plans d’austérité capitaliste. En effet, avec la hausse des frais de scolarité, leurs conditions de vie vont se dégrader. Ils auront encore plus besoin de se trouver des jobs à temps partiel pour un salaire ridicule. Bref, les étudiants venant des milieux modestes seront, et c’est déjà largement le cas, de plus en plus des prolétaires à temps partiel!

La lutte pour la gratuité scolaire est légitime aux premiers abords. Les étudiants doivent cependant dépasser cette revendication qui vise en réalité la mobilité sociale et diriger leur lutte contre la société de classe, le capitalisme. Les syndicats, que ce soit l’ASSÉ ou la FECQ/FEUQ, veulent les entraîner dans une lutte illusoire, soit pour la gratuité scolaire, soit pour un autre gel des frais de scolarité. Cette lutte est vaine, une voie de garage, puisqu’elle n’est pas une lutte dirigée contre le capital, mais une lutte pour une autre forme de capitalisme, un « capitalisme à visage humain » et une « éducation humaniste » réactionnaire. Que l’éducation soit gratuite et publique ou privée et chère, le capitalisme, lui, est toujours debout. On essaie de faire croire que la hausse entraînera une commercialisation de l‘université la rendant dépendant du capital. Mais, l’université est déjà bourgeoise et a déjà comme fonction la reproduction des classes sociales. En effet, l’université n’est en rien indépendante du capital, elle fut historiquement constituée et financée par l’État bourgeois pour le maintien de sa domination tant au niveau technique qu’intellectuel.

Plusieurs étudiants constatent que ce ne sont pas les libéraux avec leur hausse des frais de scolarité qui sont seulement à condamner mais le système capitaliste entier. Plusieurs manifestants constatent aussi que la police est là pour défendre l’état et la propriété privée des capitalistes. Un étudiant qui manifestait pour la première fois a eu un œil crevé par les forces policières à Montréal, une dame agée s’est faite matraquer parce qu’elle défendait, lors d’un encerclement policier à l’université du Québec en Outaouais, une étudiante qui avait osé uriner dans un coin. Pendant ce temps la ministre de l’éducation dénonce la « violence » de manifestants qui brisent les vitres de grosses banques. La réponse de l’État depuis les 2 mois de grève a été le poivre de cayenne, les gaz lacrymogènes et les coups de matraque pour finir par offrir  la même augmentation  des frais de scolarité sur 7 ans au lieu de 5 ans. C’est une génération perdue pour le capitalisme car il n’a rien à leur offrir. Mais les étudiants résistent en attaquant un poste de police au centre ville de Montréal et comme dans plusieurs villes, ce sont  les pires symboles du capitalisme qui sont la cible des manifestants comme les banques, les chambres de commerce et les bureaux des ministres et députés.

Cependant, il faut que le mouvement étudiant rompe avec les attitudes corporatistes et carriéristes du mouvement étudiant officiel. La prolétarisation les oblige à faire de l’agitation autant à l’université, au cégep que sur leurs lieux de travail. Les étudiants restent encore cantonnés sur leur propre lutte, ils n’ont pas fait le lien avec la classe ouvrière. À part une manifestation avec les travailleurs d’Aveos, rien de concret n’a été fait. Ce ne sont pas les lieux de travail qui manquent. Plusieurs prolétaires ont perdu ou perdront leur emploi ou sont en lock out chez MABE Canada, Merch, Rio Tinto, Electrolux, Rocktenn, Papiers White Birch et bien d’autres. Le mouvement étudiant doit faire le lien et manifester son soutien à la lutte des travailleurs, c’est seulement la classe ouvrière qui peut mettre fin à la crise. Il faut aussi que celui-ci sorte du cadre nationaliste dans lequel les syndicats et les partis politiques bourgeois veulent maintenir tous ceux qui sont en lutte contre le système capitaliste en crise.

Les étudiants doivent faire leurs les revendications historiques du prolétariat qui commencent à peine à surgir : la destruction du capitalisme pour sauver l'humanité et édifier une nouvelle société sans classe, sans État et sans frontière, donc sans exploitation et sans guerre.

Nous invitons les étudiants à nous contacter pour renforcer les forces révolutionnaires internationalistes.

Les Communistes Internationalistes – Klasbatalo

mardi 22 mai 2012

POURRONT-ILS SAUVER LE CAPITALISME EN France ?



Quel gouvernement pourrait être contre la croissance? Pas celui de cette innocente cuvée scolaire hollandaise "paritaire" que nous a si bien croqué le subtil dessinateur Placide.
L’économie capitaliste est programmée de telle façon qu'une croissance nulle ou faible, c'est forcément beaucoup de chômage. Hollande a fait le beau en Amérique avec son thème électoral engageant à stimuler la croissance (la relance), mais comment et avec quels moyens, oui avec quels moyens? En flattant les PME, en lançant de grands travaux ? En priant Keynes de revenir parmi nous avec de nouvelles recettes pour, au moins, sauver le capitalisme en France ?
Le système économique actuel peut être vu comme un éternel cycle offre/demande. Depuis la fin du XIXe siècle, la théorie de l'offre et de la demande a peu évolué.
L’offre est la quantité d’un bien économique que les producteurs souhaitent vendre à un prix donné. Ses principaux déterminants sont le prix du marché et les coûts de production. En fait, les fonctions d’offre sont obtenues à partir des coûts de production de l’entreprise à long terme.
La demande est la quantité voulue d’un bien, à un prix donné, par les consommateurs ayant les moyens de l’acheter.  Ses principaux déterminants seront donc le prix du bien, le revenu, les goûts, mais aussi l’offre et la demande des biens de substitutions (ainsi l’évolution des prix du pétrole a un effet sur la demande de gaz par exemple).
Une société crée un produit qu'elle met sur le marché, les consommateurs l'achètent donc le carnet de commandes de l'entreprise grossit, elle embauche et ainsi de suite (sachant que l'Etat prélève des taxes au passage). Il faut imaginer la même chose au niveau d'un pays. On parle beaucoup de Keynes depuis le début de la crise et on l’invoque à nouveau pour parler relance ou croissance. Keynes a bâti une théorie, notamment à partir de la crise de 1929. Pour lui, s'il y a crise, c'est que le cercle offre/demande s'est grippé par manque de demande. Sous l'effet d'un événement déclencheur (la crise de 1929), les ménages et les entreprises sont devenus profondément pessimistes. Les premiers ne consomment plus assez et les seconds n'investissent plus. La «roue de l'économie» ralentit, le chômage monte.
Pour dégripper la roue, Keynes proposait deux moyens: la monnaie et le budget. Le premier consiste à injecter de la liquidité (de la monnaie) dans le système. Cela consiste à baisser les taux d'intérêts, ce qui a été fait par toutes les banques centrales occidentales depuis le début de la crise (ils sont proches de 0% aux USA). On peut également faire tourner la planche à billets, ce qui est pratiqué (massivement) aux Etats-Unis ou en Angleterre. On sait que la BCE est très réticente dans ce domaine mais elle a aussi injecté de la liquidité par des moyens alternatifs, notamment le prêt récent de 1.000 milliards d'euros aux banques européennes. Si ce dernier plan a donné de l'oxygène aux banques, la monnaie ne semble pas infuser dans l'économie «réelle». Les parades des banques centrales ne parviennent pas à huiler un système grippé où « l’argent-roi » permet toutes les tricheries, des enrichissements faramineux qui ne sont pas réinvestis dans l’industrie. Marc Roche raconte très bien comment le grand truandage de Goldman 1 Sachs « dirige le monde » ; en décrivant en particulier l’hypocrisie et la complicité qui ont présidé au camouflage de la dette  grecque (p. 18 et suiv. de son Livre « La Banque » (poche points). Les dettes sont un puits sans fond et ne pourront jamais être honorées dans la crise croissante, malgré les mensonges des économistes qui raisonnent pour le public au cas par cas, et dans des hypothèses d’école, toutes impuissantes à redonner du tonus à un capitalisme essoufflé.
Le second moyen de feu Keynes était budgétaire, se servir dans les caisses de l'Etat pour relancer l'économie. La façon de procéder la plus immédiate est de donner de l'argent aux ménages (ce que Hollande fait avec l'augmentation de l'Allocation de Rentrée Scolaire). Ils vont alors consommer plus, ce qui remplira les carnets de commande, créera des embauches, augmentera la consommation et les recettes de l'Etat. C'est ce que Keynes appellait le multiplicateur d'investissement: pour 1 Euro dépensé par l'Etat, X euros de richesse sont créés. Pour que ce X soit intéressant, il faut que le cycle soit complet. Or, celui-ci peut être rompu de différentes façons. La première, c'est l'épargne. Si l'argent donné par l'Etat vient remplir les livrets A et ne se retrouve pas dans la consommation, c'est perdu. Or, vu le désarroi face à la crise et l’incertitude grecque, le taux d'épargne est très haut (7,4% des revenus). Le moyen le plus sûr consisterait donc à donner plus de revenus (allocations, aides, ...) aux plus pauvres qui ne peuvent pas épargner. La seconde manière dont le cycle peut se rompre est beaucoup plus pernicieuse. Si l'argent versé aux ménages les plus pauvres trouve un débouché de consommation dans des produits importés, la relance budgétaire aura permis une aide aux plus pauvres (une fois) et une relance ... de l'exportation chinoise ou allemande. Ce risque est cependant relativement limité. Les biens importés ne représentent que 14% de la consommation des ménages et ce pourcentage est plutôt plus faible pour les bas revenus. 
La dernière possibilité keynesienne est le lancement de «grands travaux». Quand Roosevelt lance le «New Deal», il inclut une politique de grands travaux d'infrastructure - barrages, ponts, autoroutes - qui vont préparer les Etats-Unis à la guerre puis à la fantastique croissance d'après-Guerre. L'avantage des travaux de BTP, c'est qu'ils ne sont pas délocalisables (ou très peu). L'Etat emploie de la main d'oeuvre, ce qui fait baisser le chômage. Le cycle a plus de chance de se compléter qu'en donnant l'argent directement aux ménages. Mais nous ne sommes plus en 1933. S'il y a bien encore des infrastuctures de transport à bâtir en Europe, ça n'est pas la demande la plus urgente. Les think tank hollandais pensent plus à des travaux de conversion écologique (photovoltaïque, éolien), de transport d'électricité ou encore de données. Encore faut-il que les matériaux proviennent d'Europe et non de Chine, le meilleur moyen de s'en assurer étant de mettre une dose de protectionnisme (préférence communautaire dans les appels d'offre), refrain des Montebourg et Mélenchon, refrain plus du domaine du patriotisme idéologique racoleur que transposable dans la réalité de la compétition acharnée où les grandes puissances dictent la partition.
Voilà en quoi consiste l'économie de la demande dont les recettes ont été très largement utilisées depuis le début de la crise, en Europe comme aux USA.
Etudions l'économie de l'offre qui s'attache à travailler sur un autre plan et qui est d'inspiration libérale. Cette fois-ci, la base est que c'est l'offre (les entreprises) qui crée de la richesse qui se transmettra aux salariés créant de la demande. En flexibilisant le travail à outrance. Cette idéologie dite de droite libérale veut qu'il faille libérer tout ce qui entrave les entreprises, principalement la fiscalité et les réglementations. Pas très probant dans la crise actuelle, et l’exemple allemand, efficace dix ans en arrière, n’est pas très porteur. Les prolétaires en Europe comme ailleurs commencent à en avoir marre d’être traités comme du bétail précarisé de plus en plus et respecté de moins en moins.
Le premier obstacle pour le nouveau gouvernement français, c'est la régulation du marché du travail que le petit dictateur déchu s’était engagé à ficeler toujours plus. Le code du travail français est relativement protecteur pour les salariés, n’en déplaise à l’ex-chien de garde, Copé, d’une droite caviar décapitée, mais il est à plusieurs vitesses. Les CDI sont bien protégés et toute la flexibilité porte sur les CDD et les intérimaires. Le modèle français se comporte comme un marché de stabilisés/disqualifiés (lire Serge Paugam : La disqualification sociale, puf) avec un noyau dur bien protégé et des exclus (jeunes, seniors, peu diplômés). L'option rêvée serait alors de casser cette dualité en allant vers un contrat unique qui soit plus protecteur qu'un CDD mais moins qu'un CDI, l'objectif étant de fluidifier le marché du travail et donc d'améliorer la situation de l'emploi. Par ailleurs, il existe aussi une asymétrie entre les grandes sociétés privées et publiques qui peuvent relativement facilement s'accommoder de la complexité du droit du travail et licencier (ou supprimer des postes) sans trop de problème et les PME qui ont toutes les peines du monde à licencier sans débourser beaucoup de pognons et de liquidités pour la justice de classe. 
Enfin, autre possibilité de relance, elle aussi plutôt libérale, la dérégulation de marchés ou de corporations protégées qui ferait baisser les prix.
La politique de l'offre a un désavantage: elle prend du temps à produire ses effets. Mais elle a un gros point positif: elle ne coûte rien ou pas grand chose. Alors que les relances par la demande demandent de l'argent. Il faudrait alors soit retarder un hypothétique retour à un équilibre budgétaire (prévu pour 2017) soit émettre encore et toujours plus de dette, que ce soit de la dette française, européenne (eurobonds) ou des dettes spécifiques à des projets (project bonds).
 François Hollande imagine la relance principalement sous l'angle de la demande et Angela Merkel de l'offre. Quant à Mario Monti, il a mené une politique de l'offre pour le moment. Il cherche certainement à panacher avec un peu de relance par la demande pour relâcher un peu la pression sur son peuple. Il est donc un allié objectif de Hollande pour la demande mais il voudra aussi surement que la France fasse une politique de l'offre comme l'a fait l'Italie. Quant à François Hollande, pour le moment, il cherche surtout une victoire politique aux législatives, sans presser son gouvernement de transition.
Au final, la France va certainement mener une politique restreinte de relance par la demande avec des mesures ciblées comme la hausse de l'ARS (Allocation de Rentrée Scolaire). La chancelière l'acceptera tant que la France suivra ses objectifs de ré-équilibrage budgétaire ( il y a peu de chance que la France, comme beaucoup d'autres pays de l'UE, atteigne ses objectifs). Là ou Hollande peut aller chercher sa victoire, ce sont sur les grands travaux. Il y a environ 80 milliards d'euros de fonds européens non utilisés.
 Nul doute qu'il aura des pressions pour appliquer une politique de l'offre en France. Il y a peu de chances qu'il accepte une réforme du code du travail qui pourrait faire plonger sa popularité dès le début du quinquennat et agiter un chiffon rouge devant les yeux de Jean-Luc Mélenchon et Aubry, moitié d’opposants dubitatifs pour tenir en laisse le prolétariat si toutefois il en venait à se réveiller brutalement contre ses nouveaux exploiteurs, leurs banquiers, leurs patrons et leurs syndicats. 
Le problème n’est pas que français ni qu’européen, même si la bourgeoisie semble s’affoler beaucoup pour l’avenir de l’Europe en ce moment, surtout en tant que marché du monde en train de péricliter, comme un vaisseau à la mer, déjà coulé et qui entraîne par le fond un autre navire et son équipage envoyé pour le tirer à flots, mais, de plus en plus, en peine perdue…

dimanche 20 mai 2012

L’élection de l’Hollando-énarchie : un vote dubitatif



1.      Les illusions de l’alternance démocratique bourgeoise :

Les élections démocratiques bourgeoises ne sont pas complètement un trucage et reflètent tout de même l’opinion d’un peuple à un moment donné, opinion certes largement conditionnée, manipulée, programmée et formatée par les sondages mécaniques. Les factions bourgeoises ne sont pas en compétition pour rire, et travaillent férocement à conquérir le pouvoir d’Etat, clé de la gloire et de l’enrichissement, plus de nos jours pour la deuxième perversion. La détestation du PN Sarkozy l’a finalement emporté, malgré une intense campagne de ragots, d’insultes quotidiennes et d’attaques personnelles incessantes contre « flamby », ce petit chose apparatchik que tout le monde avait sous-estimé, y compris moi-même. Je dois dire mon contentement de l’éviction du blaireau et que, si j’avais été inscrits sur une liste électorale j’eusse été voter pour un bourgeois « normal ». La disparition du paysage du blaireau laisse un vide sidéral, l’impression que cet excité du pouvoir a tondu le gazon derrière son cul comme Attila. Il ne restera  rien de l’ère franco-sarkozienne, sauf cette odeur putride de fin de campagne nauséabonde, infectée par les relents de théories racistes, et ce mépris aristocratique des chômeurs.
Comme ce ne sont pas des classes qui votent mais des individus isolés dans « l’isoloir », les politologues découpent en catégories mais se permettent de nommer telle ou telle classe pour la ridiculiser, surtout s’il s’agit de la classe ouvrière. La classe ouvrière est elle-même clivée depuis si longtemps en secteur public, secteur privé, immigrés et chômeurs. Le secteur public a remplacé les mines et usines de jadis quand il s’agit de faire grève. L’immense majorité des PME est composée d’ouvriers soumis, lâches ou obéissants impuissants à lutter à une poignée. La plupart des immigrés sont plutôt fayots et arrivistes. Les chômeurs sont lâchés par tous et confinés dans la honte de leur situation. Excepté pour la partie nombreuse et sécurisée des fonctionnaires, il était évident que les trois autres catégories de la classe ouvrière votassent pour la droite caviar qui ne promettait pourtant que des heures supplémentaires et se foutait royalement des chômeurs. Dans les élections et au quotidien en ce moment, la classe ouvrière n’est rien que ces catégories corvéables par chaque faction bourgeoise. La solidarité elle ne connait plus. La capacité de se mobiliser au-dessus des catégories elle ignore. Mais il ne faudrait pas la décrire plus bête qu’elle n’est.
Dans le marais souverainiste de « Marianne », hebdo identifié désormais comme plus à gauche que le Nobs ou L’Immonde, un gus se permet encore de considérer que les 18% de la fille Le Pen constituent un « vote de… classe ouvrière ». Ah la classe ouvrière du cru considérée comme « raciste » rétrograde, comme acquise aux thèses du FN. Simplisme quand tu nous tiens ! Chaque classe est composée de différentes couches pourtant, plus cupides et hargneuses entre elles que les composants de la classe prolétarienne ; les artisans, paysans et commerçants votent traditionnellement à droite et à droite puante. Que des « petits blancs » votent protestataire ne peut point cacher que des électeurs immigrés de la première génération (civiquement français) votent aussi FN… (contre l’invasion supposée ou crainte de concurrents sur le marché rétréci du travail). Qu’une large partie de cette classe s’abstienne depuis de nombreuses années n’est jamais pris en compte dans les statistiques et estimations des politologues. Qu’une plus grande partie encore de la classe prolétaire ait voté Hollande et pour sa partie bobo (fonctionnaires et enseignants des mouvances syndicales et professorales) Mélenchon ne met pas fin à cette théorie décennale d’une classe ouvrière en régression depuis l’implosion du stalinisme ; mais au moins le stalinisme ne peut plus renaître de ses cendres même avec les meilleures promesses de nationalisations ringardes.
Ce que révèle la victoire de Hollande, même si une partie de la bourgeoisie gaulliste et centriste y a contribué, révèle tout de même – et cela seul nous intéresse – un vote dubitatif du prolétariat atomisé. Comme nous questionne quel parti bourgeois rigolo va pouvoir se mettre en travers d’une prise de conscience qui crapahute si lentement et si électoralement.
L’alternance est aussi un abominable trucage, puisqu’elle signifie que cette masse veautante des électeurs disposerait du droit de sanctionner un mauvais gestionnaire politique tous les… 5 ans, sans pouvoir le corriger en cours de route, comme peut le rendre possible le système de délégation éligible et révocable du prolétariat en révolution (et après) alternance véritable, en quelque sorte immédiate du vote de classe révolutionnaire des assemblées de prolétaires. L’alternance démocratique qui s’est jouée ce coup-ci, surtout sur une question de comportement, a eu pour bonus la prétention à remplacer l’austérité par « la croissance » (des myriades de PME de petits patrons de merde, qui émargent au moins à 9000 euros/mois). La croissance, qui signifierait travailler plus dans un marché international ouvert à la production nationale franchouillarde, est du pipeau de think tank hollandais, aussitôt repris par Obama et où l’heureux élu français est allé jouer le petit Poucet aux côtés des Schtroumpfs du G8. 

2.      Faibles capacités du personnel politique de rechange :

Les prolétaires qui ont massivement participés à ce premier round des élections françaises ont raison de ne pas se faire d’illusions. Il n’y a d’ailleurs pas eu d’état de grâce (ce sentiment benêt qui avait dominé quelques mois après 1981). Le temps de l’incertitude s’est installé en France comme en Europe simultanément avec le gâchis des élections grecques, qui renforcent l’incapacité d’un Etat déjà faible historiquement, et sans classe ouvrière homogène (dont le gros des troupes est constitué des fonctionnaires corrompus du PC et des syndicats). Voilà nos pauvres financiers européens consternés, alors qu’ils exigent de plus en plus pour un remboursement sans fin (et sans fond) des intérêts de la dette aux Grecs qui ne paient pas d’impôts ! Hollande va-t-il s’inspirer du cirque ridicule du gouvernement aléatoire grec qui multiplie les arrestations spectaculaires de gros fraudeurs pour tenter de calmer les esprits quand ces mêmes gros fraudeurs échappent de toute façon aux sanctions en se mettant en … faillite personnelle ! La Grèce n’est pas la France. C’est un cas particulier qui ne montre ni l’exemple pour la bourgeoisie ni pour le prolétariat. La Grèce est un Etat jeune, créé en 1830 seulement : « Durant les quatre siècles de domination ottomane, éviter de payer ses impôts était un acte de résistance » (cf. le Nobs du 26 avril : Pourquoi les Grecs ne paient pas d’impôts ?). Le cas grec sert et servira toujours plus de repoussoir « égoïste » pour le public européen ; il suffit de lire les multiples commentaires de lecteurs dans les presses française et allemande, lecteurs qui ne sont pas spécialement des bourgeois manipulateurs ni d’angéliques maximalistes ou gauchistes, les quolibets concernant un système avachi – qui n’est pas responsable certes de la crise mondiale ni de tous les hiatus européens – mais qui fonctionne de manière parasitaire, et où tout le monde est complice (y inclus les salariés) ; défendre le cas grec en l’espèce comme simplement victime de la cupidité incessante de la finance internationale, de la part de révolutionnaires semi-professionnels, est non seulement encourager le nationalisme grec (et celui des quolibets ci-dessus évoqués) mais donner bien piètre exemple d’une société future dite communiste d’où toute tricherie, politique de clans et arrangements mafieux devraient être bannis !
Effet boule de neige de l’enfoncement dans la catastrophe grecque, plus l’Europe nordique riche accroit sa pression plus l’Etat grec persiste dans son opacité et les petits arrangements : « Complexe, opaque, inefficace, corrompue : depuis son entrée dans l’Europe, la Grèce promet de réformer son administration fiscale. Mais toutes les réformes se sont soldées par la création de nouvelles lois et… une administration toujours plus byzantine. Cette opacité sert les intérêts de la classe politique qui peut plus facilement intervenir pour arranger les affaires de ses « clients » (ibid).
Or la fille de Vidal-Naquet qui rédigeait cet article pour le Nobs ne connaissait pas encore le résultat des élections de début mai. Patatras, montée des partis dits extrêmes naturellement, face aux magouilles des gouvernements démocratiques successifs le cul sur deux chaises, entre céder aux exigences des banquiers de la mafia européenne et continuer à favoriser les principales couches parasitaires. Sur le terrain électoral, même dans cent ans, il ne faut jamais s’attendre à ce qu’un parti honnête, voire vraiment représentatif du prolétariat, soit « élu ». D’une part le parti d’extrême droite, nationaliste et surtout anti-envahisseurs (depuis les dépenses faramineuses des jeux olympiques, la Grèce a gardé un trop grand nombre d’immigrés et est devenue une passoir pour l’immigration vers l’Europe du nord), fait une entrée remarquée au parlement, ainsi que, d’autre part, le parti Syriza (équivalent du micro-parti mélenchonien en France), parti de rigolos, comme je l’ai déjà dit, nullement internationaliste mais arcbouté comme la gauche bourgeoise française sur de prétendue solutions nationales autarciques. Blanc bonnet et bonnet blanc sont à l’assemblée, et il faut donc faire revoter le bon peuple pour départager ces gangs politiques.
La France n’est pas encore dans cette situation cacophonique pourtant passionnante – la confirmation de l’absurdité d’une austérité sans fin imposée par la mafia banquière et étatique européenne et l’incapacité des politiques grecs à affamer complètement leur population – à la veille des élections législatives. Mais pas loin. La réduction de 30% des salaires ministériels ne sert-elle pas à la même politique vertueusement byzantine que celle des gouvernements grecs ?
Les articles concis de RI de ce mois de mai et l’édito de Marianne de Nicolas Domenach ont assez clairement analysé la situation. Domenach se met le doigt dans l’œil en supposant que la nouvelle oligarchie a pour objet de pourfendre « l’argent-roi », mais sa description de l’accession au pouvoir de cette « famille politique » fait mouche :
« Comment ne pas être inquiet quand on a été instruit par le passé de toutes les concessions, qu’on a devant soi une équipe dont une des forces principales peut se révéler une des faiblesses premières : ils sortent tous du même moule ou presque. La Hollandie, c’est en grande partie l’énarchie ! Le chef en personne, mais la plupart de ses ami(e)s, de ses compagnons d’aventure (sic), des dirigeants du PS, sont passés par cette fabrique des élites. Ce fut un avantage incontestable dans la tumultueuse et incertaine bataille de la crédibilité : Martine Aubry, Laurent Fabius, Pierre Moscovici, Michel Sapin, Marisol Touraine, sans oublier Ségolène Royal, ont une compétence estampillée indispensable pour affronter les responsabilités, mais leur formation comme leurs fréquentations en font une élite qui a une fâcheuse tendance à se refermer sur ses certitudes mondialisées ( ?), sur son petit monde des quartiers aisés et sur un convenable minimalisme réformiste (…) Un ordre à réguler peut-être – ils sont socialistes – mais point à bouleverser. De gauche comme de droite, ils se sont souvent succédé en ignorant tout aussi bien l’aggravation des fractures inégalitaires françaises et mondiales que l’échec radical du néolibéralisme » (cf. Marianne du 9 mai).

La nouvelle oligarchie-énarchie au pouvoir n’est pas sûre de disposer d’une majorité parlementaire pour gouverner. L’absence d’unité des partis composants la gauche dans ce deuxième round critique de la compétition électorale n’est ni la faute aux personnes ni une erreur comparée à la messe mitterrandienne de 1981. La bourgeoisie dans son ensemble ne se fait pas plus d’illusions que les millions qui ont voté pour Hollande le preux. Elle a besoin du délire réformiste radical creux, assaisonné d’un discours national-autarcique impuissant, des Mélenchon et compagnie, d’autant plus inintégrable au gouvernement qu’il ne tient pas debout une seconde, sauf pour aviné cégétiste. Une opposition délirante vaut mieux que pas d’opposition du tout. Et ce n’est pas le bling-bling déchu Sarkozy en villégiature au club des riches à Marrakech qui va aider les prolétaires à protester contre la reconduction de l’austérité. J’oserai même prolonger en disant qu’il faut à l’Etat bourgeois maintenu une opposition remuante, le plus bruyante possible pour couvrir le peu d’étendue de la promesse de croissance hollandaise…
La crise mondiale, depuis ses tréfonds, ébranle la répartition classique des pouvoirs multiples et complémentaires de la bourgeoisie. La France, comme l’Allemagne et d’autres, vont connaître une fragmentation croissante de l’appareillage politique bourgeois. Ce fractionnement ne sera pas forcément un affaiblissement mais au contraire un moyen plus pertinent pour encadrer la révolte des diverses couches, en particulier pour happer la mouvance massive des petits bourgeois « indignés » et autres « anti-politiques ».
Les syndicats, encensés par la nouvelle oligarchie, ne seront pourtant pas à l’aise non plus, vu le souvenir lancinant de leurs constantes trahisons des intérêts de la classe ouvrière internationale.