PAGES PROLETARIENNES

mardi 27 avril 2010

LE CAILLASSAGE DES BUS AURAiT-IL DU BON?



(ci-contre, Jerry Bornstein, sa compagne l'irlandaise Sandie et moi sur la colline de Fontenay aux Roses en 1988, face à l'atelier Marie Curie (la plus vieille centrale atomique du monde), à une époque où seules étaient caillassées les BMW). Pauvre Jerry décédé en ce début d'année d'une crise cardiaque. Il me dit un jour qu'il était fier de porter le même nom que Trotsky. Nous avions échangé nos logements (pas nos femmes, pourtant deux belles), et j'étais parti en famille pour Brooklyn, heureux comme un prolétaire devenu pape d'aller vivre à NY. Sous son nom on peut trouver sur le web la liste des nombreux ouvrages qu'il a écrit en compagnie de Sandie, et qu'aucun des hommages des groupes maximalistes n'a jugé utile de notifier, alors que ce sont des traces durables de sa passion révolutionnaire. ET AUSSI je peux fournir une video du Baruch college, the city of university of New York -où il était aimé et admiré par ses élèves.

POSSIBLE LETTRE OUVERTE A M; LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE

Jamais dans ces colonnes ne seront encouragés les actes de voyous, encore moins les lâches agressions contre les conducteurs de bus. Mais dans ce que les médias n’arrivent pas vraiment à identifier – incivilités ou violences gratuites – il nous faut bien observer une violence sociale implicite (médiatisée en faveur d’une répression accrue) dans la mesure même où elle se répand, même si comme je l’ai cru au début, il est possible comme à Tremblay que certain incendie de bus ait été téléguidé par les « services spéciaux » policiers de l’Etat ; ces actes délictueux venant conforter le stupide scénario gouvernemental autour du niqab, de la polygamie et des allocs.
Caillasser un bus présente une autre différence qu’il y a par exemple 30 ans, l’incendie de BMW. On ne s’en prend plus à un symbole de richesse qu’on ne peut s’offrir, d’autant que les chefs dealers qui ont pignon sur rue peuvent s’offrir la voiture préférée des parvenus douteux. On s’en prend à un maillon de la vie sociale qui, que le conducteur soit blessé ou pas, va entraîner la paralysie de tout le quartier car les syndicats corporatifs appellent immédiatement à la grève (qui va frapper avant tout les usagers prolétaires) et nos caillasseurs font la une de l’actualité avec mention pour leur village dans les médias simplistes. Il faut oser le dire, le caillassage (plus que l’intifada nationaliste palestinienne) est non seulement une forme de protestation contre le mépris bourgeois dans lequel sont tenus les échoués du système scolaire (et même ceux qui ont réussi à obtenir des diplômes qui ne servent à rien) mais aussi contre ces « privilégiés qui ont du travail » et qui passent tous les matins, certes la gueule enfarinée pour aller au chagrin, mais qui, certes compatissant envers les laissés pour compte, ne lèvent pas un petit doigt pour faire montre de solidarité de classe. Pourtant un exemple encourageant de solidarité avec les chômeurs et leurs enfants a été montré par les grévistes du pôle emploi de Graulhet et d’Albi et par la démission d’un directeur de cette institution (note 1).
Vous n’êtes pas sans le savoir dans votre forteresse de l’Elysée, votre classe dominante est inquiète, ainsi qu’en témoigne le principal organe de l’élite intellectuelle (mal en point financièrement comme un pays africain telle la Grèce) qui interroge depuis trois jours avec angoisse comme ceci :
« Vous avez plus de 55 ans et vous avez perdu votre emploi, témoignez.La France à l'un des taux d'emploi des seniors les plus faibles d'Europe. En moyenne, les salariés sortent du marché du travail à 58 ans et demi. Vous étiez salarié et vous avez quitté votre emploi avant 60 ans, âge légal de départ en retraite. Comment avez-vous vécu cette situation ? Quelle a été l'attitude de votre employeur ? A quel âge avez-vous fait valoir votre droit à la retraite ? Une sélection de témoignages sera publiée sur Le Monde.fr. »
Il faudra bien l’admettre, même chez les plus chevronnés maximalistes révolutionnaires gréviculteurs et leurs ennemis gauchistes, les grèves corporatives sont devenues plus nuisibles à la notion de solidarité ouvrière qu’un caillassage de bus. D’une certaine façon vous avez été prémonitoire en considérant au début de votre mandat que « quand il y a des grèves plus personne ne s’en aperçoit plus ». Regardez la dernière grève des cheminots : ils sont restés entre eux, bien cachés dans leurs réduits, soucieux de la pérennité de l’entreprise nationale mais tout aussi hypocritement désolés de la corvée supplémentaire dans laquelle ils plongeaient des centaines de milliers de prolétaires se rendant au travail. Je ne me hasarde pas à sous-entendre qu’il eût fallu caillasser les wagons à l’arrêt ou ceux qui circulaient, non parce que la colère des passagers n’eût pas été légitime, mais parce que de tels actes, assimilables à ceux des cailleras de banlieue, auraient renforcé le corporatisme étroit et l’obstination opaque et crade-unioniste de ces pauvres cheminots esseulés volontairement.

FACE A L’EXPLOSION DU CHOMAGE LES GOUVERNEMENTS BOURGEOIS ONT-ILS DES SOLUTIONS ?

Si j’avais été un citoyen ordinaire, confiant dans le gouvernement bourgeois et la justice de mon pays, je vous aurai écrit personnellement une lettre à vous-même, président en titre de la République, pour vous suggérer premièrement de virer conseillers et ministres débiles, les Hortefeux, Besson et Cie. Deuxièmement, j’aurais affirmé que ce n’est pas avec une politique sécuritaire à tout va, avec une impunité assurée aux forces de police dans des tâches de répression répétitive, impuissante finalement, que les délégués politiques de la classe bourgeoise pourront endiguer les réactions violentes, qui relèvent encore trop souvent du « fait divers », qui sont mensongèrement attribuées à des catégories criminalisées de la population ou à des jeunes désoeuvrés, toutes produites par une misère grandissante et une perte des repères sociaux, qui, tôt ou tard, débouchera sur l’explosion généralisée encore inédite. La misère grandissante qui se répand est évidemment le produit de cette persistante et inguérissable crise systémique qui sonne l’hallali du capitalisme et face à laquelle, vous, les dirigeants capitalistes, dans vos délires de profit éternel pacifiquement accepté, restez aveugles quand même vous eussiez souhaiter l’éviter.
Troisièmement j’aurais insisté sur le fait qu’il n’y a plus assez de travail pour tous dans cette société. Je vous aurais donc suggéré, à mon corps défendant, à vous, président mal en point auquel plus personne ne veut serrer la main et qui êtes lâché de plus en plus par les vôtres complices du pouvoir, de vous pencher sur l’histoire du travail. Non pas que je veuille sauver le soldat Sarkozy ou tout autre émule de la classe dominante, mais parce que je pense que, dans l’hypothèse que je souhaite le plus sincèrement, si le capitalisme devait s’effondrer à brève échéance, il nous laisserait en héritage à peu près les mêmes horreurs de sa désindustrialisation et les ravages d'une lumpénisation planétaire. Donc si vous M. Sarkozy aviez disposé de conseillers intelligents (et non pas de vulgaires cire-pompes archi-payés à inventer des parades idéologiques incrédibles) vous auriez pu étudier sous les lambris de votre palais à réformes iniques l’histoire des Ateliers nationaux en 1848 et celle des « chantiers de jeunesse » du maréchal Pétain, néanmoins putain des nazis mais honorable bourgeois soucieux de pacification sociale surtout en temps de guerre.
Ne m’en veuillez point, pour aller vite en besogne, sans phrases de ma propre conception, à ce que je me livre pour la partie qui suit à un simple copier-coller de Wikipédia.
Les ateliers nationaux en France au XIXe siècle désignaient une organisation destinée à fournir du travail aux chômeurs parisiens après la révolution de février 1848. L'État intervient en fournissant, en organisant et en payant le travail. Dans l'Organisation du travail (1839), Louis Blanc prévoyait, sous le nom d'Ateliers sociaux, la création de coopératives de production, associations d'ouvriers de la même profession, sans patron. L'État devait en favoriser la création en fournissant le capital initial. Créés dans l'urgence, les Ateliers nationaux cherchent à contrecarrer ce modèle en s'inspirant des ateliers de charité existant déjà sous l'Ancien Régime. Par ailleurs, Olympe de Gouges avait aussi préconisé la création de tels ateliers lors de la Révolution française. La révolution de 1848 avait porté Louis Blanc au gouvernement provisoire qui proclama, le 25 février, le droit au travail. Louis Blanc demanda vainement à ses collègues du gouvernement, la création d'un ministère du travail, avec une équipe, un budget et la possibilité politique de prendre des décrets. Afin de l'obliger à rester solidaire du gouvernement et de calmer les classes populaires (dixit Lamartine le membre le plus influent du gouvernement), tout en l'éloignant du centre de prise de décisions Louis Blanc fût chargé de diriger la Commission du Luxembourg où économistes libéraux, théoriciens socialistes et délégués des ouvriers parisiens durent mettre sur pied un Plan d'organisation du travail. L' "ouvrier Albert", également membre du gouvernement était nommé vice-président. Créés par le ministre des Travaux publics Marie, les Ateliers nationaux, considérés comme ayant été ouverts le 27 février 1848, sont fermés le 21 juin 1848. La direction des Ateliers nationaux est confiée, dès son origine, à Émile Thomas, un ingénieur (chimiste, donc sans compétence particulière en rapport avec la mission qui lui est confiée) aidé par les élèves de l'École Centrale.
Au départ les ouvriers chômeurs doivent se rendre à la mairie de leur arrondissement (Paris en compte alors 12) avec un certificat du propriétaire ou du logeur de leur garni qui garantit leur domicile à Paris ou dans le département de la Seine. Ce certificat visé par le commissaire de police du quartier est échangé contre un bulletin d'admission aux Ateliers nationaux. Mais les mairies sont débordées par l'afflux des chômeurs, dont le nombre passe de 6 000 le 15 mars, à 30 000 le 30 mars, puis à 64 000 le 16 avril pour culminer à 117 000 le 30 avril. Le travail susceptible de leur être fourni ne suit pas, et les chômeurs éconduits récriminent. Aussi pour prévenir le risque de troubles, et de regroupement d'ouvriers de la même profession pouvant devenir un ferment de coalition, Thomas décide rapidement de centraliser les demandes par un bureau au niveau de l'arrondissement où les chômeurs devront se rendre à un jour fixé.
Les Ateliers nationaux sont organisés militairement. Le cadre du recrutement ("l'embrigadement") est l'arrondissement administratif (12 à l'époque) à la mairie duquel les candidats à l'embauche doivent se faire inscrire. A la base se trouve l'escouade de 11 hommes sous la responsabilité d'un escouadier (portant un brassard de laine bleu-ciel). Cinq escouades forment la brigade commandée par un brigadier arborant un brassard frangé de rouge. Quatre brigades forment une lieutenance de 225 hommes. Quatre lieutenances forment une compagnie de 901 hommes. Trois compagnies sont sous la responsabilité d'un chef de service qui dépend d'un chef d'arrondissement, le nombre des services dépendant de l'importance de l'arrondissement. Cette organisation vise à ce que jamais plus de 10 hommes soient réunis pour le travail ou pour la paye. Les escouadiers et les brigadiers sont élus par les membres des escouades et des brigades ; au-dessus, les chefs sont nommés par le directeur.
Sur le plan politique, le ministre Marie, dans un entretien rapporté par Thomas, évoque la possibilité que les ouvriers des Ateliers nationaux soient appelés un jour à "descendre dans la rue" pour soutenir la république, et fait afficher dans les chantiers qu'"ils (les ouvriers) doivent être prêts à défendre la Patrie" au premier appel des autorités. Les ouvriers sont d'ailleurs membres de la Garde nationale qui, depuis le 8 mars, est ouverte à tous (ses effectifs passent alors de 56 751 hommes le 1er février à 190 299 le 18 mars). Tout ouvrier qui effectue un tour de garde reçoit 2 francs contre la présentation de son billet de garde. Le 7 mai 1848, au cours de la première réunion des délégués des Ateliers nationaux, nouvel organisme destiné à faire pièce à la Commission du Luxembourg, on fait savoir "que le drapeau de l'Atelier national est un signal d'ordre". Certains membres du gouvernement républicain considèrent les ouvriers des Ateliers nationaux comme une armée de réserve qui, aux côtés de la Garde mobile et de l'armée, peut intervenir dans la répression d'un soulèvement ouvrier.
Le départ pour le chantier est fixé à 6 heures et demie. Le "repas du matin" a lieu entre 9 et 10 heures et celui "du soir" entre 14 et 15 heures. Le chantier est quitté à 18 heures. La présence est vérifiée par deux appels quotidiens et toute absence est sanctionnée par une amende de 25 centimes si on ne répond pas au premier appel de la journée, et la journée n'est pas payée s'il y a absence au second appel. Pour toute absence non autorisée l'amende est de 50 centimes, et deux jours consécutifs d'absence non autorisée entraînent la radiation de l'organisation. Le simple ouvrier perçoit 2 francs par jour de travail, l'escouadier 2,50 francs, le brigadier 3 francs, le lieutenant 4 francs, les élèves de l'École Centrale 5 francs quel que soit leur grade. Comme il est impossible d'employer tous les jours les ouvriers (on estime à un jour sur quatre le travail effectif) une indemnité d'inactivité de 1,50 franc est versée, soit une réduction de 50 centimes sur la paye ordinaire. Dès le 17 mars, en raison du gonflement considérable des effectifs, on réduit encore de 50 centimes l'indemnité et la paye du dimanche est supprimée. A ce moment la livre de pain coûte en moyenne 35 centimes. Les ouvriers dans le besoin peuvent bénéficier également d'une aide procurée par le bureau de secours. Des bons de pain, de viande et de bouillon sont alloués chaque jour aux ouvriers nécessiteux. Si l'ouvrier est malade les frais d'hospitalisation sont pris en charge par le bureau et sa femme et ses enfants sont secourus à leur domicile. En cas d'accident du travail, la famille perçoit le montant de l'indemnité d'inactivité. Les Ateliers nationaux disposent d'un bureau médical formé de douze médecins que l'on peut consulter et qui font des visites à domicile.
Les Ateliers nationaux prennent en charge divers chantiers. Le travail fourni n'est pas obligatoirement celui de la qualification de l'ouvrier chômeur, la plupart n'étant ni terrassiers ni ouvriers du bâtiment. Une enquête du 19 mai 1848, recense 216 professions différentes parmi eux, dont beaucoup d'artisans, la grande spécialité parisienne (bijoutiers, serruriers, ciseleurs sur bronze, ébénistes...). Selon la déposition d'Emile Thomas devant la commission d'enquête créée après leur dissolution, à la fin de leur fonctionnement, on peut penser que sur 115 000 hommes, 70 000 appartenaient à une profession en rapport avec le bâtiment, et de 10 à 15 000 n'avaient aucune profession déclarée. Les autres exerçaient différentes profession, certaines en rapport avec l'industrie du luxe (bijouterie, travail du bronze, "articles de Paris")1. On emploie ces ouvriers surtout dans les travaux publics. Le nivellement de la Place de l'Europe (près de la gare Saint-Lazare) est leur œuvre. Ils participent aux travaux des compagnies privées de chemin de fer: le prolongement de la ligne de Sceaux à Orsay, le creusement de la tranchée de Clamart ; ils assurent des travaux sur la ligne de Paris à Versailles et préparent le terrassement de la future gare des chemins de fer de l'Ouest. Mais le travail manque pour occuper une main d'œuvre aussi abondante. Aussi voit-on les ouvriers dessoucher les arbres abattus pendant les évènements de février pour les remplacer par de nouveaux arbres provenant des pépinières nationales. Cependant beaucoup de chômeurs restent désœuvrés.
Symbole de la fraternisation et de l'unanimisme républicain qui prévalent au lendemain de la révolution de février, les Ateliers nationaux sont les victimes du changement politique qui s'opère au printemps 1848. La révolution est l'œuvre des Parisiens, mais l'instauration du suffrage universel masculin donne à la province un énorme pouvoir politique. Les notables qui ont provisoirement disparu réapparaissent et reprennent le pouvoir réel. Les résultats des élections du 23 avril à l'Assemblée nationale sont une grande déception pour les milieux républicains progressistes. La très grande majorité des députés élus sont des républicains modérés ou bien des républicains du lendemain. Le 10 mai, le gouvernement provisoire installé au moment de la révolution de février cède le pouvoir à la Commission exécutive d'où Louis Blanc et l'ouvrier Albert ont été exclus.
Pour les nouveaux (en fait anciens) dirigeants de la France, les Ateliers nationaux sont une horreur économique et sociale et un danger politique. Élus par des propriétaires, des boutiquiers, des rentiers, ils sont révulsés à l'idée que l'on paye des ouvriers à ne rien faire et que des secours soient organisés, alors que pour eux la charité privée doit y pourvoir. Plus fondamentalement ils sont opposés à une intervention de l'État dans le domaine économique et dans la régulation des relations entre les entrepreneurs et leurs salariés (la grève et les syndicats sont alors interdits et la loi de 1841 sur le travail des enfants à bien du mal à être appliquée en France). Pour eux les Ateliers nationaux sont un gouffre financier et un désastre moral ("une grève organisée à 170 000 francs par jour, soit 45 millions par an..., un foyer actif de fermentation permanente..., l'altération la plus affligeante du caractère si glorieux et si fier du travailleur" selon le Comte de Falloux). En réalité le coût des ateliers nationaux dans le budget du gouvernement est minime (autour de 1%). De plus l'incapacité de l'organisation à leur fournir un emploi rend, sur leurs lieux de rassemblement ou sur les boulevards, de nombreux ouvriers désœuvrés et disponibles, sensibles aussi bien à la propagande politique des républicains et des socialistes que des bonapartistes dont le prétendant Louis Napoléon Bonaparte est l'auteur d'une brochure à caractère social, L'Extinction du paupérisme (1844).
L'échec de la manifestation populaire du 15 mai décapite le mouvement républicain progressiste. Dès le 16 mai, la Commission du Luxembourg est supprimée et Louis Blanc menacé de poursuites par l'Assemblée nationale. Les listes d'inscription aux Ateliers nationaux sont closes. Le Comte de Montalembert et le Comte de Falloux, membres influents de la majorité conservatrice de l'Assemblée nationale attaquent sans cesse l'existence des Ateliers nationaux, que certains désignent ironiquement comme les « râteliers nationaux ». Le 26 mai, Ulysse Trélat, ministre des Travaux publics, renvoie le directeur des Ateliers depuis leur création, Émile Thomas, et le remplace par l'ingénieur Léon Lalanne, prélude à leur fermeture. Mais la Commission exécutive rechignant à supprimer ce symbole de l'esprit de février et de la nouvelle république, le décret est suspendu. Cependant le 30 mai, l'Assemblée décide que les ouvriers résidant depuis moins de trois mois à Paris et dans le département de la Seine doivent regagner la province, espérant ainsi dégonfler les rangs de possibles résistants à une action gouvernementale. Le projet gouvernemental de nationaliser les compagnies de chemin de fer, qui permettrait ainsi à l'État de surmonter la mauvaise volonté des ingénieurs des compagnies privées à ouvrir de nouveaux chantiers, précipite les évènements. Le 19 mai l'Assemblée crée une commission spéciale sur les Ateliers nationaux, dont Michel Goudchaux est le président et Falloux le rapporteur. Le 20 juin, l'Assemblée vote la fermeture des Ateliers et le 21 juin la Commission exécutive décide l'application du décret du 24 mai : les ouvriers âgés de 18 à 25 ans doivent s'enrôler dans l'armée, et les autres doivent se tenir prêts à partir en province (dans les faits, pour effectuer divers travaux de terrassements, notamment en Sologne où doit être mis en chantier le canal de la Sauldre). Ce décret est publié le 22 juin au journal officiel de l'époque, Le Moniteur. Une délégation ouvrière est violemment éconduite par Marie membre de la Commission exécutive. Les premières barricades s'élèvent alors dans Paris : c'est le début de l'insurrection populaire des Journées de Juin.
Comme vous le voyez, M.Sarkozy, à une époque où le capitalisme était encore dans sa prime jeunesse, la tentative humaniste et bien intentionnée de favoriser « l’extinction du paupérisme » avait fini par capoter et provoquer l’insurrection des prolétaires. La répression et le régime paternaliste social de votre principal maître en politique, Badinguet, purent par après, circonstanciellement « sauver le meubles » en alliant autoritarisme et réformes sociales repiquées à Bismarck. Je le répète, le capitalisme était alors un système encore plein de ressources. Voyons à présent l’autre cas d’espèce, d’un maréchal – pourtant honni par le prolétariat et le peuple contemporain pour sa collusion avec Hitler – mais dont vous interdisez dans les écoles de la République qu’on évoque sa lamentable soumission à l’occupant teuton pour ne rappeler que le boucher de Verdun, gloire nationale usurpée mais sanctifiée par la noblesse d’Etat démocratique, qui lui reste reconnaissante. Le maréchal Pétain, ou plutôt ses conseillers occultes n’étaient pas sans savoir que si une grande partie de la jeunesse prolétaire adulte était prisonnière du travail forcé en Allemagne, il demeurait grand risque pour la patrie humiliée et militarisée que la jeunesse adolescente, inoccupée, désoeuvrée, ne fomente des troubles naturels en ces circonstances spéciales et inusitées. C’est dans le cadre de ces soucis que furent créés les « chantiers de jeunesse ». Il ne faut pas négliger de préciser que ces « chantiers de jeunesse » ne sont pas tombés des cerveaux étroits des conseillers pétainistes bourgeois. Avant de connaître une destinée internationale pour la reconstruction du capitalisme après 1945, des chantiers internationaux avaient démarré dans les années 1920 en Europe. En France, ils étaient popularisés en 1936 à l’initiative de l’association Service civil international, qui propose aujourd’hui encore de 500 à 600 chantiers d’été tous les ans. D’autres associations lui ont emboîté le pas pour « promouvoir la paix et le rapprochement entre les peuples ». Depuis, les chantiers se sont élargis à d’autres domaines d’intervention comme le social, l’environnement, le patrimoine ou encore l’éducation, et concernent aujourd’hui un bon nombre d’associations dites « non gouvernementales » mais en réalité très gouvernementées.
Les « Chantiers de la jeunesse française » relookés Pétain, souvent appelés chantiers de jeunesse, furent avant tout une organisation paramilitaire française de 1940 à 1944. L'armistice du 22 juin 1940 ayant supprimé le service militaire obligatoire, les chantiers de jeunesse furent créés comme substitut à l’encadrement de la jeunesse non encore « socialisée » le 30 juillet 1940. Les jeunes hommes de la zone libre et de l'Afrique du Nord française en âge (20 ans) d'accomplir leurs obligations militaires y étaient incorporés pour un stage de six mois. Ils vivaient en camps près de la nature, à la manière du scoutisme, mais avec le volontariat en moins, et accomplissaient des travaux d'intérêt général, notamment forestiers, dans une ambiance militaire. Ils étaient encadrés par des officiers d'active et de réserve démobilisés, ainsi que par des aspirants formés pendant la guerre de 1939-1940. A partir de 1941 l'obligation des chantiers de jeunesse est étendue à tous les français de zone libre devant accomplir leurs obligations militaires pour 8 mois.1
Dirigés par le général Joseph de La Porte du Theil, les chantiers de jeunesse étaient une institution ambiguë. Il s'agissait d'inculquer les valeurs de la Révolution nationale, prônée par le Régime de Vichy. Les Chantiers, initialement ouverts aux chefs et aux jeunes juifs français, leur furent d'abord interdits en Afrique du Nord, à la demande du colonel Van-Ecke, commissaire régional, soutenu par le général de La Porte du Theil. Puis l'année suivante (2ème semestre 1942) le même général obtint que cette exclusion soit étendue aussi à la métropole. Le culte de la hiérarchie et de la discipline passait notamment par l'importance donnée à tous niveaux au Chef. La vénération du Maréchal Pétain imprégnait profondément les cadres. Alors que le régime exaltait le retour à la terre et le provincialisme, la vie en groupements dans les bois pouvait aussi se lire comme une réaction contre la ville industrielle et corruptrice, foyer de l'individualisme et de la lutte des classes. Par ailleurs, aucune "politique" n'était toléré dans les chantiers. Ce qui signifiait l'interdiction de la propagande des partis collaborationnistes et bien sûr des organisations de Résistance, mais aussi l'absence de radios, de débats et autres moyens de communication qui même censurés, auraient permis aux jeunes de suivre l'évolution de la guerre et de la politique du régime, et de se faire une opinion personnelle.
Surtout après la guerre, les anciens dirigeants des CJF affirmeront avoir voulu préparer une troupe mobilisable en cas de reprise de la guerre contre l'Allemagne. Les faits leur donnent effectivement raison en Afrique du Nord, province où les anciens des Chantiers, après le débarquement allié de novembre 1942, furent rappelés, militarisés, entraînés et répartis dans l'Armée d'Afrique. Ils participèrent ensuite aux campagnes de Tunisie, d'Italie, de France et d'Allemagne de 1943 à 1945, le plus connu étant le 7e régiment de chasseurs d'Afrique du Lt.Colonel van Hecke; à qui est dédié Le Chant des Africains en 1943.
Les détracteurs des Chantiers font remarquer :
• l'implication active des Chantiers dans l'envoi de 16.000 jeunes au Service du travail obligatoire (STO) en Allemagne,
• que l'historiographie démontre un processus de résistancialisme des Chantiers alors que dans les faits l'organisation est toujours restée fidèle à Vichy (excepté en Afrique du Nord). Seuls des hommes issus des Chantiers se sont engagés dans la Résistance et non pas toute l'organisation. Les chefs des Chantiers n'ont pas appelé les jeunes à rejoindre la Résistance. La thèse (références ?) et le livre de C. Pécout analysent très bien ce mythe résistancialiste des Chantiers,
• que le général La Porte du Theil choisit de revenir d'Afrique du Nord en novembre 1942 au moment même du débarquement anglo-saxon, au lieu de rejoindre le camp allié comme le firent les officiers vichystes conduits par Darlan et Giraud.
Les défenseurs des Chantiers mettent en avance (outre la militarisation des Chantiers d'Afrique du Nord):
• le sabotage des départs de jeunes pour le Service du travail obligatoire (STO) en Allemagne dans certains groupements (notamment ceux des Alpes),
• la prise en charge des jeunes des Chantiers partis de leurs groupements pour le STO en Allemagne dans le cadre de la "mission Chantier en Allemagne" à laquelle furent affiliés plusieurs dizaines de jeunes cadres des Chantiers volontaires pour les suivre et les encadrer(voir notamment le sous-titre suivant avec le cas de Georges Toupet),
• l'esprit de revanche animant les cadres, et notamment l'implication du lieutenant-colonel Van Hecke dans le "Groupe des Cinq" visant à faciliter le débarquement allié en Afrique du Nord,
• une entreprise de camouflage : camouflage de jeunes alsaciens (réfractaires à l'incorporation dans l'armée allemande) qui recevaient une fausse identité ; camouflage de certains matériels de l'armée d'armistice,
• l'esprit de responsabilité de La Porte du Theil revenant d'Afrique du Nord vers le 10 novembre 1942 à l'égard d'environ 70.000 jeunes des Chantiers en métropole,
• l'existence de rapports secrets établis par le Commissaire au Pouvoir Bernon à l'attention de Pierre Laval critiquant très sévèrement les Chantiers du point de vue de leur manque de loyauté vis à vis du gouvernement et de leurs sentiments anti-allemands.
Lorsqu'ils envahirent la Zone Sud les Allemands supprimèrent l'Armée d'Armistice mais, divisés sur le sujet, choisirent de maintenir les Chantiers. Toutefois, ils modifièrent profondément leur implantation à partir de mars 1943 : les groupements de Provence, des Pyrénées, et des Alpes furent respectivement délocalisés dans le Massif Central, dans le département de la Dordogne et dans les Landes. L'occupant craignait en effet leur concours à un débarquement allié par la méditerranée (groupements de Provence), le concours ou la participation à des évasions par l'Espagne (groupements des Pyrénées), et l'aide aux maquis (groupements des Alpes). Il est également à noter une série de contrôles musclés opérés par la Wehrmacht vers le 20 septembre 1943 dans les trois quarts des groupements des Chantiers.
Plusieurs anciens des chantiers rejoignirent la Résistance, certains passèrent en Afrique du Nord. Les stocks de vivres et de vêtements des Chantiers devinrent une proie classique pour les maquis en manque de tout. De multiples coups de main, bénéficiant parfois de complicités dans la place, permirent aux maquisards de faire main-basse sur ces dépôts - ce qui explique que sur nombre de photos, des maquisards soient habillés en uniformes des chantiers, certes non prévus au départ pour leur servir !
C'est à partir de septembre 1943 que le général La Porte du Theil, devant de nouvelles exigences allemandes qui auraient équivalu à l'envoi en Allemagne de la quasi-totalité des effectifs restant des Chantiers, refuse catégoriquement toute mise à disposition supplémentaire au bénéfice de l'occupant (d'où les contrôles musclés de la part de la Wehrmacht). Mais il décline également les invitations de la Résistance à passer à la dissidence et à gagner Alger. Averti d'une arrestation imminente à la fin de décembre 1943, il refuse également de s'enfuir. Destitué, arrêté le 4 janvier 1944 à son bureau de Châtel-Guyon, il est assigné à résidence en Allemagne jusqu'à la fin de la guerre.
Il obtint un non lieu en Haute Cour de Justice en 1947. A la lecture de son dossier de justice, on peut en donner quatre principales raisons :
• les Chantiers de jeunesse furent un rempart, pour la jeunesse, contre les influences allemandes ou collaborationnistes,
• il ne put être établi, de par la centaine de témoins interrogés (qui étaient les anciens chefs de groupements subordonnés à l'inculpé) que le général de La Porte du Theil avait servi avec zèle les intérêts de l'occupant ; son caractère constamment germanophobe fut même confirmé,
• le général de La Porte du Theil refusa catégoriquement tout envoi ou mise à disposition de main d'oeuvre des Chantiers en faveur de l'occupant à partir de septembre 1943,
• Les anciens des Chantiers participèrent en nombre aux combats pour la Libération en 1944/1945 : 38.000 en provenance d'Afrique du Nord, 60.000 engagés volontaires de métropole dans la période de mai à septembre 1944, puis 100.000 jeunes de la classe 1943 mobilisés à partir de janvier 1945.
Dans le cadre de la loi sur le Service du travail obligatoire (STO) qui concernait les jeunes garçons nés en 1920, 1921 et 1922, les Chantiers mobilisèrent la classe appelée sous leurs drapeaux en novembre 1942, au nombre de 32.000 jeunes Français. 16.000 d'entre eux furent effectivement envoyés en Allemagne(Archives nationales [cote F60 1452 p.ex.]). Sur les 16.000 autres jeunes des Chantiers non partis en Allemagne, 7.000 s'évanouirent dans la nature, parfois avec le concours des chefs de groupement (notamment dans la Province Alpes-Jura) et 9.000 furent astreints au travail obligatoire en France.
En Allemagne même, de nombreux chefs de chantiers requis étaient partis avec leurs jeunes. Un certain nombre se porteront volontaires pour aller les encadrer sur place, les groupements étant restés intacts. En Allemagne perdureront ainsi, jusqu'en 1945, les pratiques d'une Révolution nationale discréditée dans la France occupée puis disparue en France libérée : culte du Maréchal, cérémonies patriotiques collectives tels les levers de couleurs ou les "face-à-l'ouest", etc. Les chefs ayant redonné des uniformes à leurs jeunes démobilisés, on vit des jeunes Français défiler dans des rues d'outre-Rhin en uniforme, en rangs, bannières déployées, encadrés par leurs chefs, et parfois musique en tête.
Mais ces mêmes chefs, tout en restant pour la plupart indéfectiblement pétainistes, contrecarreront aussi la propagande des extrémistes de la collaboration - par exemple en dissuadant les jeunes du STO de s'engager dans la Waffen SS. Ils lutteront également pour une amélioration des conditions d'existence dans les camps de travailleurs civils. L'expérience la plus connue est celle mise en œuvre par le jeune chef Georges Toupet en Silésie. Agé de quelque 25 ans, il parvient à prendre la tête d'un camp à la dérive regroupant 2.500 travailleurs français, et situé à deux pas du complexe d'extermination d'Auschwitz-Birkenau. Lui et ses adjoints luttent contre le laisser-aller, la saleté, le manque d'hygiène, l'alcoolisme et la prostitution, développent une riche vie culturelle, sportive et éducative, et rétablissent spectaculairement l'ordre et la discipline. Parallèlement, Toupet participe à une filière d'évasion de prisonniers de guerre et à un réseau de renseignement allié, auquel il communique des informations sur le camp de la mort voisin. Si les Allemands apprécièrent au début la discipline et l'organisation efficace des Chantiers, qui pouvaient leur servir à maintenir l'ordre parmi des milliers de jeunes travailleurs forcés exilés, les relations se tendirent progressivement. Au total, sur près de 200, une trentaine de Chefs de chantiers présents dans le Reich paieront de leur vie des actes de résistance avérés, autant subiront une arrestation prolongée ou reviendront d'une déportation en camp de concentration. Quant aux jeunes gens envoyés en Allemagne par les Chantiers, beaucoup d'entre eux, sans forcément pardonner à l'institution de les avoir livrés au STO, reconnaîtront du moins ne pas avoir été laissés livrés à eux-mêmes outre-Rhin. La vie en groupe, le prestige de l'uniforme et la discipline présentèrent aussi pour eux quelques avantages.

Comme vous le voyez avec ce deuxième exemple, plus proche de notre époque de chômage massif, M.Sarkozy, la maîtrise étatique de cette jeunesse « désoeuvrée » ne fut jamais totale et ne pouvait point l’être dans les circonstances dramatiques, pourtant mieux contrôlables dans la situation de guerre mondiale que dans la crise systémique si envahissante et si dangereuse pour l’ordre social que vous défendez de nos jours.
Vous m’objecterez que « travaux d’utilité publique » et « chantiers de jeunesse » existent toujours au jour d’aujourd’hui comme disent les cadres intermédiaires, quoique un peu à la marge de la déliquescence du marché de l’emploi. Les «chantiers » actuels sont des séjours de courte durée, encadrés par une structure associative ou une organisation non gouvernementale (ONG), organisés en France ou à l’étranger. Ils sont conçus autour d’une vie d’équipe. Leur vocation : mêler les objectifs personnels aux objectifs collectifs de transformation sociale pacifique autour d’un projet associatif gnangnan. Il peut s’agir, par exemple, de favoriser un développement comme la reconstruction d’une école ou des cours d’alphabétisation, dans une ville ou une zone géographique précise. Ils s’étendent, généralement, d’une semaine à un mois. La période estivale est le moment idéal pour se lancer. En s’engageant, les volontaires s’investissent pour combattre l’ennui et l’échec scolaire en vue d’une occupation précise. Dans quoi s’investir ? Tout dépend des motivations et des affinités mais aussi de la nature des projets. Le choix ludique est vaste : soutien scolaire, préservation d’un patrimoine, construction d’un centre de santé, d’une école, travaux d’irrigation, actions culturelles, sportives ou sociales, investissement auprès des animaux… Les projets doivent s’inscrire dans un « tissu social local » (quartier, ville ou village) pour pouvoir être reconnus comme « utiles» par les autorités de tutelle. Planifier son départ presque six mois à l’avance est conseillé, sachant que les chantiers sont organisés entre mai et juin. Car les places offertes sont souvent bien inférieures à la demande. Tout le monde ou presque car il faut avoir au moins 18 ans, voire 21 ans pour des chantiers à l’étranger. En principe, les volontaires n’excèdent pas 30 ans. Quelques structures, comme l’ASMAE, proposent des chantiers sans limite d’âge pour favoriser les échanges entre les générations, mais la plupart des chantiers sont exclusivement réservés aux adolescents à partir de 14 ans. Pour démarrer, un chantier doit compter au minimum 5 personnes, sans dépasser la vingtaine, sous la responsabilité d’un ou plusieurs animateur(s). Aucune formation préalable, ni compétences particulières ne sont demandées, mais plutôt des qualités qui rendent la vie en communauté possible (esprit d’équipe, d’entraide et d’adaptation) et une bonne condition physique. Un stage de préparation, peu avant le démarrage, est à prévoir par les professeurs de gymnastique à la retraite ou les pensionnés de la police.
ALORS QUE FAIRE M.SARKOZY ?
Les bourses s’effondrent à nouveau. La planète financière va encore s’affoler sur les pertes vertigineuses des grandes banques, face à la faillite non circonscrite de la Grèce, face aux faillites multiples de villes entières mais pas pour le pic des vingt millions de chômeurs en vue depuis la crise dite des subprimes. La prude bourgeoisie européenne et son hypocrite concurrente américaine ont pensé « localiser » le cas grec, et pensent encore relativiser la « spécificité grecque en la remisant au niveau d’un pays sous-développé du tiers-monde. Pourtant vous n’êtes pas sans savoir que le lâchage de la Grèce signifie l’éclatement de l’Europe, ce qui est un moindre mal pour cette entité molle, mais que d’autres faillites étatiques se profilent pour des pays plus important. Vous n’y pouvez rien nationalement. Vous êtes aussi impuissant que les autres dirigeants capitalistes à endiguer le tsunami social tant attendu. En plus la nature se met de la partie, le volcan d’Islande (en faillite terrestre) persiste à menacer de ses vapeurs les profits de moins en moins aériens du capitalisme.
J’aurais pu vous « conseiller » à mon tour. Par exemple, en vous inspirant des ateliers du travail du XIXe siècle ou des Chantiers de jeunesse de feu Pétain, vous engager à mettre en place un ministère de la solidarité sociale et conviviale (surnommé ABRIBUS). C'est-à-dire à organisant à grande échelle de nouveaux chantiers de jeunesse en vue de l’été prochain. C'est-à-dire à appeler les jeunes désoeuvrés de banlieue à se préparer à venir camper en Vendée pour participer à la construction de solides digues dans les zones à risques. Ainsi, dans leurs vastes campements de toile en bord de mer, des milliers de jeunes des banlieues ouvrières dites déshéritées, auraient pu, dans la joie et avec leurs groupes de rap, venir porter chacun leur sac de sable contre la fureur des éléments incontrôlés de la nature. Vous imaginez bien sûr la fraternisation dont ils seraient l’objet de la part des populations de retraités dont on veut détruire les maisons « en zone noire » pour faire table rase des erreurs des requins de la mafia immobilière, dont votre ami De Villiers a été complice quoiqu’il en dise. Vous auriez eu l’occasion, du même coup, en promouvant de tels chantiers humanitaires de lutter efficacement contre les préjugés racistes assez répandus dans cette population vendéenne (qui comporte peu de noirs et d’arabes), tout autant que de mettre fin au caillassage des bus de transports des prolétaires des zones urbaines. Et évidemment de prouver au monde entier qu’il est possible d’occuper à des tâches utiles l’ensemble de la population dans un esprit plus universaliste que national.
Mais il est trop tard M.Sarkozy. Le meilleur service que vous avez à rendre à votre classe d’obligeance et aux malheureux proles de la classe ouvrière, serait de démissionner avec fracas. L’histoire vous en serait reconnaissante.
Avec mes meilleures salutations communistes.









<
(note 1) Benoît Genuini, l'ancien médiateur du Pôle Emploi qui a démissionné le 15 avril, déclare ce lundi dans un entretien au Monde qu'aucune de ses deux propositions pour améliorer le service rendu par son ex-employeur faites à la direction de l'organisme, n'a été retenue. Son rapport donne des exemples récents de trois personnes inopinément privées de leur indemnisation pendant plusieurs mois, dont l'un, maçon inscrit au chômage le 12 août 2009, et qui, sans allocation ni ressource, a épuisé ses économies, vendu sa voiture, été frappé d'interdit bancaire alors que ses anciens collègues perçevaient normalement leurs allocations chômage. En juillet 2007, le comité CGT-chômeurs avait déjà fait état de nombreux cas de radiations erronées exposant les chômeurs à l'absurde et à l'arbitraire. Trois ans plus tard, et malgré la réforme et la fusion avec les Assedic, le mal est toujours là: «Pôle Emploi donne très peu d'explications, prend rarement la peine de justifier ses décisions, ce qui accroît le sentiment d'arbitraire, d'injustice, fréquent chez les chômeurs, et peut déclencher des réactions de colère», selon l'ex-médiateur.


(µ)

lundi 26 avril 2010



LE MARIAGE DE LA CARPE


ET DU LAPIN


« Une des principales causes de la dégénérescence en Italie est cette mauvaise et vieille habitude de mélanger la morale aux questions politiques et de classe ».


Histoire de la Gauche communiste (tome I bis)



Voici un épisode que Cervantès était loin d’imaginer. Dans l’entreprise chevaleresque de « Controverses », le chevalier Michel Olivier (ex ponte du CCI) et Sancho Sabatier (anti-léniniste acharné) s’associent pour une belle imposture titrée « Thèses sur la Révolution d’Octobre et sa dégénérescence ». Brûler le passé révolutionnaire, voici l’heure de la synthèse bilanesque. Aujourd’hui, le noyau de la folie révisionniste touche le niveau de la conscience, cela coïncide avec l’extraction du marxisme d’un monde dont le capitalisme est caillassé. Il ne s’agit pas d’un retour au monde du temps de la chevalerie du regroupement des révolutionnaires convaincus et disparus, mais pour Don Olivier de rester assis sur la rossinante du parti, même si Sancho, malin comme une teigne, est prêt à le cueillir par terre. Sancho Sabatier, qui pense avant tout à être publié, tout en profitant de l’accueil aimable de l’aubergiste Marc Lavoine, n’est pas illuminé et pense bien agir en faveur des opprimés et aider Don Olivier à retrouver la bonne destinée « prolétarienne ».



Don Olivier à la manque s’obstine à ne plus être seulement membre de la première secte venue, fût-elle italienne (TCI…), mais à être celui qui baguenaude pour entrer dans ce monde parallèle de la bonne conscience qui fait feu de tout bois et vivre une nouvelle vie, une vie qu’il croit militante. En noble chevalier, l’idéaliste il se bat contre les moulins à vent de feu la révolution russe, il croit prendre aux rets du parti imaginaire le brave Sancho avec ses hallucinations sur le traité de Brest-Litovsk[1]. Le valet semble pourtant avoir plus les pieds sur terre que le maître. Le duo lénino-conseilliste, allié et adversaire aurait-il résisté au temps ?


Leur roman à quatre mains retrace les voyages et les aventures de la dialectique en toc. Don Olivier est obsédé par la chevalerie des « communistes de gauche » dont il pense qu’ils possédaient la science infuse ou le remède anti-bureaucratique interne. Le premier est un chevalier errant et illuminé du maximalisme qui part combattre le mal à travers la Belgique désunie sur un vieux cheval : Rossinante Parti. Le second, tout en se remplissant la panse, sait que son maître est fou mais décide de l’accompagner quand même tellement il s’ennuyait dans sa ferme. Auberges-châteaux, guerres révolutionnaires, paysans bolcheviques, moulins étatiques, amour-regroupement, prolétaires, inquisition : le roman ne manque pas de péripéties, mais Don Olivier semble rester fidèle à Rossinante et ne cède pas. Sauf à la fin, où vaincu, il rentrera chez lui, malgré les suppliques de Sancho Sabatier. Il abandonnera ses lectures communistes chevaleresques, retrouvera la raison et mourra entouré et aimé des siens.


« Les thèses… » seront sans doute considérées par la poignée de lecteurs de « Controverses » comme le premier roman moderne, en rupture avec la tradition stalinienne et sectaire. Les nombreux virages du roman délivrent une étude idéaliste de la Russie de l’époque héroïque. Il sera considéré comme un roman comique par les lecteurs les plus sérieux restés fidèles à la tradition maximaliste.


Le début du livret à quatre mains commence par la publicité pour une douzaine d’œufs donquichotesques : « Saluons les prolétaires russes qui sont partis en février, puis en octobre 1917, « à l’assaut du ciel ». Nous revenons sur cet événement qui « ébranla le monde » suite à nos travaux (voire note) qui vont de la création d’une Gauche bolchevik en 1917 à celle du Groupe ouvrier en 1923, et jusqu’à la formation du Parti communiste ouvrier de Russie en 1928 (à Moscou), précédant celle de la Fédération des communistes de gauche quelques temps après. Il nous apparaît nécessaire de synthétiser sous la forme d’une douzaine de thèses un certain nombre d’étapes du mouvement ouvrier. Celles-ci se rapportent au cycle de luttes de classes qui se déroulèrent entre 1917 et 1923, dans le monde russe et à l’échelle internationale. Il est évident que nous n’écririons pas aujourd’hui tout à fait exactement de la même façon que l’ont fait les gauches communistes à l’époque… »[2]. Peu à peu Sancho Sabatier semble opérer lui une métamorphose, et du lourd conseilliste qu’il était, il se transforme en un être plus éduqué, pouvant susciter même par sa clairvoyance et la finesse de son jugement l’étonnement du prolétariat qu’il vénère. Don Olivier, quant à lui, reste invariablement fidèle à Rossinante, il ne cède à aucune pression extérieure, il brave les archers du CCI qui sont à ses trousses depuis qu’il a libéré les archives. Quoique séduit par les thèses anarchistes de Sancho sur Brest-Litovsk, Don Olivier pense ramener au parti un Sancho qui le supplie de ne point l’abandonner (lui pas le parti) : il lui suggère de garder le rôle de berger, souvent mis en scène dans les éditions bucoliques Smolny. Les deux compères pensent vivre ensemble beaucoup de découvertes, même en provoquant souvent de nombreux dégâts dans la théorie marxiste. Le clou du spectacle est la trame historique reconstituée par nos deux compères qui exaltent la théorie controuvée de la plus grande mystification politique du XXe siècle, la guerre de partisans, chanson de tous les nationalismes, reprise aux anarchistes et socialistes-révolutionnaires russes :


« Il ne s’agissait pas de mener une guerre classique comme le fera Trotski en créant une Armée rouge avec d’anciens officiers tsaristes et en rétablissant la hiérarchie militaire. Il fallait essayer de développer une guerre de partisans plus propice au succès dans un vaste territoire difficilement contrôlable par les armées régulières des puissances impérialistes. Pas d’autre solution…. à moins de quitter le pouvoir comme l’ont envisagé les communistes de gauche pour éviter que la pourriture de la dégénérescence ne retombe sur le prolétariat de l’avenir. Ce combat de partisans n’était pas une solution idéale mais c’était la moins mauvaise. Pour le prolétariat en armes, mieux vaut périr pour éviter les fausses solutions puis les mauvaises leçons (l’identification d’un capitalisme d’État avec le socialisme) et pour que le Phénix prolétarien renaisse plus fort et plus conscient de ses cendres ».


Entré en résistance dans les bois de Sibérie, on imagine fort bien les partisans bolcheviks faisant le coup de feu avec Makhno contre l’Etat stalinisé et finissant aussi lamentablement que les divers Che Guevara… Pour l’anecdote en passant, il faut savoir qu’en des temps lointains, lors de la parution de l’ouvrage enluminé de Sancho Sabatier, c’est votre serviteur (JLR) et Don Olivier qui avaient été délégué par le CCI pour aller porter la contradiction à cet auteur, encore membre d’un cénacle nommé PIC, et lui indiquer que nulle part, dans le camp des défenseurs de l’expérience en Russie les plus lucides ne considéraient le traité de Brest-Litovsk comme le « coup d’arrêt de la révolution » dite prolétarienne dont l’extension n’a jamais dépendu d’une guerre de partisans anarchistes ou blanquistes. Théoricien de la fin de la mystification de la « guerre révolutionnaire », je dois avouer modestement que je dois cet approfondissement théorique d’abord à la grande Rosa Luxemburg et ensuite au groupe Révolution internationale qui m’avait permis de comprendre que toutes les dites « luttes de libération nationale » étaient de la foutaise tout au long du XXe siècle ; je n’ai eu qu’un pas supplémentaire à accomplir pour en tirer les conclusions pour le prolétariat… mais cela avait déjà été conçu bien avant ma petite personne.


Déjà dans L’Avanti du 25 mai 1918, les compagnons de combat socialiste du jeune Bordiga dénonçaient une méthode « anti-maximaliste » : « La tactique de la « guerre sainte » aurait au contraire creusé l’abîme entre les deux peuples et lié le peuple allemand au char de ses dirigeants, posant d’insurmontables difficultés au développement historique à venir de la révolution russe ; et elle aurait troublé la totalité du processus social d’éliminations des institutions capitalistes, préparant la voie à un néo-nationalisme russe qui aurait asphyxié le socialisme ». (…) La révolution contrainte à la guerre : c’est le triomphe commun des tendances contre-révolutionnaires tant des Empires centraux que de l’Entente. La guerre est la fin certaine d’une révolution ouvrière parce qu’elle tue le contenu vital de la politique socialiste et asphyxie son économie politique » (…) « Ce truc, la guerre révolutionnaire doit être éventé ».


Dans la trame romancée de banalités bien connues sur les causes de l’échec de la révolution, nos deux lascars – en fait sous l’influence dominante de l’écuyer Sancho – font passer le parti futur pour la vieille Rossinante bolchevique, et c’est le rédacteur en chef de « Controverses » qui les remet fort justement en place : « Rappeler que des révolutions ont été possibles sans l’intervention d’un parti dont l’action fut décisive comme en Octobre 1917 n’enlève en rien à l’idée du caractère crucial de celui-ci pour maximiser la réussite d’un processus révolutionnaire, mais ce caractère doit se fonder sur une argumentation pertinente, et non pas sur l’exhortation de la nécessité du parti en soi. Or, assez paradoxalement, il y a plus d’exemples de révolutions (ou de quasi révolutions) sans influence significative d’un parti… (Russie 1917, Espagne 1936) ».


Marc Lavoine se moque aussi correctement de l’apologie, dans la tradition maximaliste de la gauche italienne, de la « guerre sainte » par Don Olivier qui brandit sa lance en bois et Sancho Sabatier qui le tient par les étriers :


« La troisième thèse développe une position sur les événements de Brest-Litovsk (1918) qui est propre aux rédacteurs de ces thèses et qui n’a correspondu à aucune de celles en présence à l’époque. Elle affirme que la seule politique correcte face à l’offensive militaire allemande


eut été de « gagner ou périr comme la Commune de Paris en avait donné l’exemple » : « Il fallait essayer de développer une guerre de partisans ». Les rédacteurs de ces thèses affirment même qu’il n’y avait « Pas d’autre solution», que « Ce combat de partisans n’était pas une solution idéale mais c’était la moins mauvaise ». Or, la gauche communiste russe à cette époque avait avancé une position qui était tout à fait pertinente : « à moins de quitter le pouvoir comme l’ont envisagé les communistes de gauche pour éviter que la pourriture de la dégénérescence ne retombe sur le prolétariat de l’avenir ». En effet, lorsque le rapport de force est en défaveur de la classe ouvrière, que ce soit dans une grève, un processus révolutionnaire, ou sur le plan militaire, mieux vaut battre en retraite et reconstituer ses forces que de sacrifier ses meilleurs éléments dans un combat perdu d’avance, combat qui tient plus alors d’une vision militaire et sacrificielle de la révolution que de la véritable nature du projet communiste : l’héroïsme ‘jusqu’auboutiste’ relève avant tout d’une conception bourgeoise ou petite-bourgeoise de la lutte émancipatrice. Dans une configuration défavorable à la classe ouvrière, seule la retraite constitue la moins mauvaise des solutions car elle permet de regrouper ses forces, de tirer les leçons, et de se préserver pour la prochaine tentative, et cela sans risquer de trahir les principes de la révolution. Ce dernier aspect nous paraît particulièrement crucial car toutes les révolutions où ses acteurs ont transigé sur les principes au nom de l’efficacité, pour gagner du temps, par expédients tactiques, … tous ces épisodes ont peut-être permis de grignoter quelques mois de répits, mais : a) ils ont finalement tous mené à la défaite ; b) ils se sont retournés contre la classe ouvrière au final ;


De deux choses l’une : si le parti bolchevik était déjà « en dehors du camp prolétarien » dès «les grèves ouvrières de Petrograd et … Cronstadt », alors il ne peut pas passer une seconde fois à la bourgeoisie en 1925 ou en 1928 ! encore thèse CCI


Certes, le parti Bolchevik a fait de très graves erreurs dès le lendemain de la révolution, erreurs qui ont notablement accéléré la contre-révolution : répression des grèves, constitution de la Tcheka, relégation au second plan et substitution au pouvoir des soviets, répression de Cronstadt, etc., cependant, ce n’est que lorsque les Bolcheviks abandonnent le principe de l’internationalisme prolétarien que l’on peut dire qu’ils quittent définitivement le camp de la révolution ».


Marc Lavoine démonte par après la corruption idéologique de Don Olivier :


« La thèse 9 affirme que : « Seule la Gauche communiste internationale … porte le devenir des leçons révolutionnaires au niveau mondial comme en Russie ». Cette idée est à nouveau soulignée dans la douzième thèse où l’Opposition Internationale de Gauche de Trotski est purement et simplement rejetée aux oubliettes : « C’est pourquoi, l’opposition de gauche n’avait plus rien à dire ni à faire dès le milieu des années 20. […] Seule la Gauche Communiste ouvrière qui était présente parmi les ouvriers a sauvé l’honneur du communisme ». Ceci est en contradiction flagrante avec l’esprit des courants historiques de la Gauche Communiste. Ainsi, Bilan ne se concevait que comme une des gauches parmi toutes celles critiquant la dégénérescence de la révolution d’Octobre, et non pas comme « la seule » ! Lorsque la Fraction italienne s’adressait aux autres forces révolutionnaires, elle affirmait clairement qu’elle « n’entend pas se prévaloir de ses précédents politiques pour demander des adhésions ».(…) « Si Bilan considérait que le courant autour de Trotski n’avait plus rien à dire dès le milieu des années 1920, on se demande alors dans quelle galère la Fraction italienne a été se ferrer en discutant avec l’Opposition Internationale de Gauche, en espérant élaborer une plateforme commune avec elle, en proposant que sa revue soit celle de tous les groupes de l’Opposition, etc. L’on ne peut d’avantage soutenir que « l’opposition de gauche n’avait plus rien à dire ni à faire dès le milieu des années 20 » puisque l’analyse de la nature de l’URSS de Bilan partagera encore pendant longtemps bien des aspects avec celle de Trotski ! A bien y regarder aussi, la position que Bilan développera sur « La décadence du capitalisme » vient en droite ligne de Trotski. Il en va de même concernant la position sur « L’impossibilité de réformes réelles et durables en décadence » que reprendront ses héritiers de la GCF. Dès lors, gardons-nous de ce triomphalisme consistant à crier haut et fort que «SEULE la Gauche Communiste internationale… » ![3]



SANCHO SABATIER DROIT DANS LE MUR DE L’ARGENT


Pour ne pas en rester à une seule hérésie anti-maximaliste, Sancho en rajoute sur son maître. Il fait sienne la théorie du cartel des gauches bourgeoises en 1924 en se livrant à un cocasse survol journalistique des « murs » du XXe siècle, imaginant (théorie fabuleuse) que les prolétaires, en particulier, auraient été à l’origine de la chute du mur de Berlin :


« En novembre 1989, tout implosa et les prolétaires berlinois du secteur/est cassèrent des pans entiers de la Muraille qui leur obstruait l’horizon. Ce fut une véritable liesse populaire avec les ouvriers de l’ex-secteur/ouest. Mais les dirigeants d’alors : R.F.A./Bloc occidental d’un côté, R.D.A./Bloc oriental de l’autre, tentèrent une ultime récupération. Peine perdue. Autant en emporte le vent. La R.D.A. implosa à son tour ainsi que le bloc de l’Est deux ans après (effondrement de l’U.R.S.S., comme un château de cartes, en 1991). Les ouvriers de l’ex - R.D.A. et de l’ex-Berlin/Est ne parvinrent pas à intégrer facilement le marché « libre » du travail de l’Allemagne réunifiée dont le territoire fut délimité à l’Est par la ligne Oder-Neisse. Ils eurent même une certaine nostalgie (traduite par exemple dans le film : Goodbye Lénine) d’une vie « protégée » des aléas (baisse des salaires, chômage, manque de logement…) qu’ils avaient connue sous l’ancien régime de capitalisme d’État baptisé « socialisme ».et par les ravages sociaux de la crise économique (chômage massif, immigrations de toutes sortes…), le prolétariat du monde entier assista, impuissant, à l’histoire qui se déroulait sans lui et se replia dans des luttes revendicatives, corporatistes. Il fut à nouveau repris en mains par les syndicats et les partis politiques de toute obédience ». Seuls des mouvements sociaux (en cas de radicalisation politique comme en Iran) pourront troubler le jeu inter-capitaliste dans les pays de toute la zone moyenne-orientale, en dépassant le cadre de simples émeutes de la faim. S’ils parvenaient à poser leurs intérêts de classe au-delà des sirènes nationalistes, ce Mur symbole de la misère sociale et humaine tomberait avec fracas : il laisserait alors place à une unité prolétarienne dépassant le pouvoir des États en les détruisant de fond en comble. »


Du mur de Berlin, notre berger Sancho, à dos de mulet, nous balade ensuite vers le Mur de Nicosie (Chypre) entre la Turquie et la Grèce. Noyé sous un bla-bla littéraire théâtral allié à une méconnaissance crasse de la structure sociale et des particularités de la Grèce et du cas de Chypre, il chevauche cette cuistrerie de « mur de l’argent » (théorie gauchiste moderne) en oubliant de faire un véritable travail d’historien : les murs, celui de la « France libre » (1941), celui de Berlin (1945-1991), celui d’Israël, etc. ont toujours eu pour fonction de casser en deux le prolétariat. Là est la leçon principale, pas de s’enferrer dans ces histoires invraisemblables de « mur de l’argent ». Le mur de Nicosie c’est tout autre chose que ce bla-bla sur l’histoire antique grecque mais un jeu impérialiste multiple où la bourgeoisie US a damé le pion à sa consoeur anglaise (je l’ai déjà expliqué dans un vieil article). Sancho se perd ensuite dans les délires gauchistes sur les « potentialités » présumées de la lutte de classes en Grèce, où il n’y a qu’une très faible classe ouvrière, et où chaque jour apporte la preuve que la bourgeoisie internationale enferme les Grecs dans l’ornière nationaliste, un peu comme le traité de Versailles pour l’Allemagne de Weimar (et cela suppose donc une toute autre analyse sur laquelle je reviendrai).


Avec autant de fausses analyses historiques, on peut ensuite s’emballer sur ce nouveau masque de l’hydre « mondialisation » en ridiculisant le maximalisme révolutionnaire :


« Le Mur de l’argent sera un adversaire coriace jusqu’à l’instauration du communisme. Pour abolir le marché mondial et tous les États, les Conseils ouvriers devront prendre le pouvoir politique à l’échelle internationale. Pour lutter contre le développement inégal hérité du mode de production capitaliste, c’est une période de transition qui s’ouvrira alors pour se débarrasser de tous les antagonismes de classes et établir une société fondée sur la satisfaction des besoins humains, donc sans comptabilité prisonnière de l’équivalent argent. Même, si cette lutte risque d’être longue, ce n’est pas une raison pour baisser nos bras nus et abdiquer notre pensée critique ». Avec toujours la même vision grèvegénéraliste simpliste typique d’une ultra-gauche radoteuse :


« Seule une prise en main des luttes par la classe ouvrière elle-même et une extension à tous les secteurs pourraient créer un rapport de force en mesure de faire reculer la bourgeoisie et ouvrir une autre perspective. Cette solidarité, les ouvriers ne peuvent la construire qu’en prenant confiance en eux-mêmes à partir du développement de leurs propres luttes et au moyen de leurs propres formes d’organisation (assemblées générales, délégués élus et révocables…), et non en les laissant dans les mains des syndicats et des organisations traditionnelles de gauche, ou en regardant à la télévision les bombes placées par des éléments qui ne cherchent qu’à présenter les travailleurs comme des terroristes, à discréditer la lutte des classes, et à faire croire que celle-ci n’a pas d’autres perspectives à offrir que l’anarchie et la violence ».



Il est minuit pour les minorités réduites au musée d’Alzheimer,mais pourquoi ne pourraient-elles pas parader encore, s’exclame le grand chambellan Sancho montrant ses moulins à vent:


« Dans ce combat qui s’engage, les minorités révolutionnaires ont et auront un rôle important à jouer malgré leurs faibles forces. Leurs responsabilités sont énormes et nous appelons tous et chacun à être à la hauteur des enjeux ».



Nous examinerons ensuite dans un troisième volet les lectures fécondes d’un autre preux chevalier bedonnant, Maxime le preux, de ce vieux conte à dormir debout si ancien et si décalé par rapport à la réalité d’un monde défragmenté où certains vont chercher dans les antiquités mirifiques des solutions à leurs errements actuels.










[1] Dont il nous est livré une publicité sans critique : « Traité de Brest-Litovsk, coup d’arrêt à la révolution », Spartacus ; 1977. Ajouté à cette oeuvrette anarchiste, sous la responsabilité de Don Olivier, est annoncée laTraduction intégrale des 4 numéros de la revue Kommunist, Éditions Smolny (à paraître). Quant aux deux œuvres majeures de Don Olivier elles existent à compte d’auteur sous forme de libelles depuis 2009 : La gauche bolchevik et le pouvoir ouvrier, 1919-1927 et Le Groupe Ouvrier du Parti communiste russe, 1922-1937. J’ai démonté les affabulations du livre de Sabatier et de l’anarchisme impuissant dans un ouvrage en 2005 : « La guerre révolutionnaire de Robespierre à Lénine ». A l’époque je n’avais pas encore connaissance des deux tomes de l’histoire de la Gauche communiste d’Italie, qui décrypte si bien les âneries de la « guerre sainte » ou « guerre de défense » qui a toujours mené à la défaite, y compris à celle de la Commune de 1871. Cet ouvrage lumineux m’avait été offert par un ami, avec cette dédicace : « René Girard écrit que c’est toujours comme tombeau que s’élabore la culture ». Tu es la preuve vivante du contraire. Tes ouvrages, ton œuvre politique est là pour nous prouver le contraire. Puisse ta retraite te permettre de continuer à écrire. A nous instruire et à nous aider à nous orienter dans une époque et un monde de plus en plus illisibles ». Pour moi qui ne suis jamais l’objet de félicitations ni d’encouragements, cette dédicace reste une belle preuve d’amitié et de confiance.




[2] Traduit de l’espagnol : « En un lugar de la Mancha, de cuyo nombre no quiero acordarme, no ha mucho tiempo que vivía un hidalgo de los de lanza en astillero, adarga antigua, rocín flaco y galgo corredor. »




[3] M.Lavoine pose par contre, d’une façon marxiste et cruciale une question à laquelle il faudra répondre mais qui dépasse le cadre de ma réponse polémique aux dérives anarchistes des deux compères : « Mais alors se pose le problème théorique et pratique suivant : si le prolétariat détient le monopole de la violence et qu’il est le seul à pouvoir la mettre en oeuvre, alors, de fait, il assume une des attributions essentielles de l’État. Or, la GCF affirme que le prolétariat ne peut s’identifier à l’État. De fait, cette position contient une contradiction de fond qu’il est nécessaire de résoudre, car, si les conseils ouvriers exercent le monopole de la violence, ils assument inévitablement un des rôles essentiels de l’État, ils s’identifient à l’une de ses fonctions principales ».